Depuis quelques années déjà, les pharmaciens de partout au Canada ont à composer avec une pénurie sans cesse croissante de médicaments.

Bien avant les déboires de la compagnie Sandoz, plusieurs dizaines de médicaments n'étaient sporadiquement plus disponibles et forçaient les pharmaciens à user de stratégies originales pour éviter que les patients ne soient privés de traitements essentiels. Au Québec, selon les données de l'Institut national d'excellence en santé et services sociaux, 38 médicaments ont été en rupture de stock en 2008, 63 en 2009 et 116 en 2010.

Bien avant que les médias nationaux ne s'intéressent à la question, il y a eu d'innombrables situations problématiques où l'on a frôlé l'absence totale de médicaments dont peu de patients, médecins ou infirmières ont eu connaissance grâce à de nombreuses interventions des pharmaciens. À titre d'exemple, en 2010, les pharmaciens eux-mêmes ont dû fabriquer des solutés d'héparine, un anticoagulant essentiel aux hôpitaux.

Le gouvernement fédéral ne semble pas être conscient que nous avons dépassé un seuil critique: chaque semaine, environ 70 à 80% seulement des médicaments injectables nécessaires au fonctionnement des hôpitaux sont livrés. Les 1300 pharmaciens des hôpitaux québécois et leurs assistants passent d'innombrables heures chaque semaine à chercher des produits de remplacement et à proposer des solutions de rechange aux médecins. Malgré ces efforts, la logique est implacable : nous manquerons sous peu de médicaments très difficiles à remplacer.

La situation est grave : comme le rapportait la porte-parole adjointe de l'opposition officielle en matière de santé lors de la période de questions à la Chambre des communes, le 7 mars dernier, la députée du NPD Anne Minh-Thu Quach, plus de 60 chirurgies ont été annulées récemment en Outaouais.

Bien que le gouvernement du Québec commence à s'organiser, c'est du côté d'Ottawa que devrait venir la solution : il faut d'urgence autoriser l'importation de médicaments à partir des États-Unis le temps que des fabricants canadiens puissent prendre le relais. Cette décision doit être prise très rapidement, sans quoi, des patients en souffriront.

Ce n'est toutefois qu'un remède à court terme afin de contrer la pénurie de médicaments. Il faut se demander comment nous en sommes arrivés là. Comment avons-nous pu laisser se précariser l'approvisionnement en médicaments dans notre pays ? Il est impératif que les parlementaires canadiens se penchent sur le problème pour qu'il cesse de s'aggraver.

Rappelons-le : le premier devoir d'un pays est d'assurer la sécurité de ses citoyens, et l'improvisation dont a fait preuve le gouvernement fédéral dans ce dossier doit prendre fin. Il est impératif de proposer un plan structuré pour qu'une telle situation ne se reproduise plus.