À moins d'un an de l'élection présidentielle américaine, le Parti républicain offre un spectacle pitoyable et désolant. Les aspirants à la candidature républicaine étalent chaque jour leur incompétence ou leur ignorance. Pire encore, les pitres occupent le haut du pavé et la chasse aux modérés est de plus en plus vicieuse.

La semaine dernière, les huit candidats républicains ont tenu leur 10e débat télévisé afin de se positionner en vue d'affronter les électeurs lors des caucus de l'Iowa du 3 janvier 2012, la première échéance d'une course qui mènera à la désignation en août du candidat républicain à l'élection présidentielle du 6 novembre. Côté démocrate, il n'y aura pas de course, Barack Obama étant le seul candidat.

Les républicains ont débattu de la sécurité nationale, un thème, selon les experts, où ils battent les démocrates. Il y avait en effet de la testostérone dans l'air. Les chaînes de télévision, toujours aussi friandes de clichés réducteurs et simplistes, ont ouvert le débat en diffusant un montage vidéo fait de bombardements, d'explosions, de chasseurs décollant dans un bruit d'enfer, de mitrailleuses en action et de manifestants déferlant dans les rues.

La scène était mise, et les candidats les plus importants n'allaient pas décevoir. C'était à qui dirait le plus d'énormités afin d'être perçu comme le seul à pouvoir défendre l'Amérique. Herman Cain a promis la manière forte envers les ennemis de l'Amérique, lui qui une semaine plus tôt ne savait pas au juste ce que son pays faisait en Libye. Newt Gingrich, l'intellectuel de groupe, a placé la sécurité avant la liberté en réclamant encore plus de contrôles et de lois antiterroristes. Michele Bachmann, la seule femme en lice, a divagué sur les nouvelles technologies (lesquelles?) qui menacent les États-Unis. Enfin, Rick Perry, l'homme pour qui la prière est la solution aux problèmes du pays, n'avait rien d'intelligent à dire.

Le débat sur la sécurité nationale et la politique étrangère est toujours le plus difficile à tenir. Les candidats n'y connaissent généralement rien. Et celui-là était, selon Peggy Noonan, assez lamentable. Mme Noonan, ancienne collaboratrice du président républicain Ronald Reagan, est chroniqueuse aux pages éditoriales du très conservateur Wall Street Journal. Elle est quand même vue comme une traîtresse auprès des conservateurs, elle qui avait appelé à voter Obama en 2008. Après le débat, ses commentaires n'étaient pas tendres, et elle aurait aimé que les candidats se calment un peu et ne paraissent pas comme les représentants du parti de la guerre.

Que pouvait-elle espérer? N'avait-elle pas écrit, en septembre dernier, après le premier discours de Rick Perry sur la politique étrangère, où il pestait contre les décisions du président à propos du Proche-Orient, que le candidat républicain «avait l'air d'un pitre, doublé d'un populiste cynique.»?

Depuis trois ans, le Parti républicain est devenu le parti des extrémistes, le parti de la haine. La haine contre le président, les libéraux, les immigrés, l'Europe et les valeurs qu'elle représente, les musulmans. C'est un programme. Ça peut même rassembler une majorité. Mais le ver est dans la pomme. La haine est maintenant installée dans le parti.

Mitt Romney, le seul candidat à peu près présentable, est dorénavant la cible de tous les tirs. Il est accusé, non sans raison, d'être le pire des opportunistes. Mais, pour un parti dorénavant purgé de ses modérés et soucieux de pureté idéologique, ce n'est pas là son pire défaut. Non. Le crime de Romney est de vouloir briser le seul ciment qui peut unir ce parti, la haine. Alors, oui Mme Noonan, les pitres ont de beaux jours devant eux.