Les aveux nébuleux publiés sur son site web ne font que raviver l'intérêt des médias à dénicher la vérité

À titre de gestionnaire de crises, j'ai vécu mon lot d'enjeux majeurs au cours de mes 20 ans de carrière dans le domaine des relations publiques. Qu'il s'agisse du départ précipité de Patrick Roy du Canadien de Montréal en décembre 1995, de l'épisode du retrait des bouteilles de Molson au début des années 90 à la suite d'un problème de détergent dans certaines bouteilles, d'une grève chez Labatt en pleine saison estivale 2003, ou encore du retrait aussi subit qu'unilatéral du Grand Prix du Canada à l'automne 2008, il existe un dénominateur commun ayant permis de gérer ces situations de façon habile et sans conséquence grave à long terme: la rapidité d'intervention et la transparence du «supposé contrevenant».

 

D'abord, il faut comprendre que, contrairement au domaine judiciaire où toute personne accusée de quelque crime que ce soit est présumée innocente jusqu'à preuve du contraire, le domaine de l'opinion publique est, à l'opposé, beaucoup moins subtil: quand c'est écrit dans le journal, c'est que ça doit être vrai!

En matière de relations publiques, dès qu'un soupçon pèse sur une personne, connue ou non, et que ce soupçon prend une ampleur démesurée dans les médias sans que quiconque ne tente d'y mettre fin, on peut parler d'une erreur de gestion importante. Dans ce genre de situation, il y a un remède efficace: affronter la horde médiatique, rapidement et avec sincérité.

J'entends d'ici les personnalités/vedettes clamer haut et fort leur droit à l'intimité. Pourtant, elles doivent comprendre et accepter que ce titre de «personnalité» vient habituellement avec la tâche ingrate d'avoir à servir de chair à paparazzis à longueur d'année. Monsieur et Madame Tout-le-monde adorent se nourrir d'histoires salées concernant les personnalités.

Et comme la nature (... ou le chef de pupitre) a horreur du vide, dès que l'on tente de cacher ou d'éviter la situation, l'intérêt à notre cause, fondée ou non soit-elle, augmente! C'est là l'erreur monumentale que fait présentement Tiger Woods.

Et il en remet! Les quelques aveux nébuleux publiés hier sur son site web ne font que raviver l'intérêt des médias à dénicher ce qui s'est réellement passé!

Le meilleur exemple d'une saine gestion de crise récente: la situation gérée récemment par l'animateur américain David Letterman. Rappelons les faits: l'animateur de la populaire quotidienne américaine Late Show with David Letterman faisait l'objet de chantage de la part d'un collègue de travail, qui le menaçait de dévoiler les infidélités matrimoniales de l'animateur au grand jour, preuves à l'appui. Pour acheter le silence de ce collègue, l'animateur devait lui payer une rançon de plusieurs millions de dollars. Solution de David Letterman: après avoir averti les policiers de la situation (et fort probablement aussi sa femme...), Letterman prend les choses en main et, pendant son émission, à la surprise de tous, explique calmement la situation à ses téléspectateurs, avouant du même coup qu'il a mal agi! Il en profite pour s'excuser auprès de sa femme, de ses collègues de travail ainsi que de ses téléspectateurs. Et voilà, fin de l'histoire. Aucune incidence sur la suite de sa carrière.

Que les rumeurs soient exactes ou non, Tiger aurait intérêt à avaler la pilule et à clarifier la situation une bonne fois pour toutes, en personne. Ennuyé par une vérité probablement trop banale, le public passerait rapidement à une autre histoire salée. Et Dieu sait qu'il y en a dans le merveilleux monde des «stars»!