L'adage dit qu'on ne gagne pas les élections, on les perd. Il faut être bon joueur et reconnaître que cette fois-ci, le maire a remporté la victoire contre vents et marées.

Contre toute attente, le maire Gérald Tremblay a conservé le pouvoir, et malgré tout ce qui a été dit, il faut comprendre que la population aura cru en son innocence. Les méchantes langues pourront bien dire que ce résultat est la preuve que le système de financement occulte aura au contraire très bien fonctionné, il n'en demeure pas moins que le maire a gagné son procès face au jugement populaire.

Et si c'était l'opposition qui avait perdu? Chacun des candidats traînait son propre boulet, et il faut croire que le plus léger était finalement celui du maire Tremblay. Dans un contexte où Montréal est de plus en plus une ville allophone, Louise Harel a souffert de son passé indépendantiste, et probablement plus encore de son incapacité à s'exprimer convenablement en anglais. Même pour les francophones, son unilinguisme constituait un sérieux handicap pour gérer une grande ville comme Montréal.

Quant à Richard Bergeron, il devait conjuguer avec une équipe plutôt absente, mais aussi composer avec un passé trouble concernant le 11 septembre, qui en aura fait la risée de nombreux commentateurs politiques. Sans rien enlever à ses projets de transports collectifs, M. Bergeron devra comprendre que Montréal est aussi une ville d'automobilistes et qu'on ne peut l'ignorer. Sur ce point, la mairie de l'arrondissement du Plateau-Mont-Royal étant maintenant entre les mains de son parti, tout est à craindre de ce côté, lui qui déjà déplore la présence trop importante d'automobilistes dans ce quartier pourtant névralgique en termes de circulation.

Mais la grande erreur de l'opposition aura été de proposer une vision de Montréal déconnectée de la réalité des Montréalais. D'où venaient ces idées de plages et d'exposition universelle en 2020, d'où venait cette idée de grande entrée maritime? Des projets sortis d'un chapeau comme par magie. Il aurait été pourtant si simple, à la suite du succès que connaît Québec avec et après son 400e, de rallier tous les Montréalais autour de 2017, année du 375e de Montréal et du 150e de la Confédération canadienne.

Le maire Tremblay ne devra pas voir dans cette victoire quelque forme d'absolution. Il a promis de faire le ménage, il devra maintenant «livrer la marchandise». Il est à espérer que cette pression vienne non pas uniquement des médias, mais également de l'intérieur de son parti. Et il ne faudrait surtout pas que ce grand ménage se résume à faire disparaître les traces compromettantes qu'une enquête pourrait faire ressortir.

Aujourd'hui, Montréal sort très affaibli de cette campagne. Une ville exsangue dont la réputation est profondément entachée, qui peine à suivre la parade et qui, dorénavant, sera menée par un maire qui a perdu une grande partie de sa crédibilité et de sa légitimité avec pour appui uniquement 15% des électeurs inscrits.

Mais derrière tout ça, se cache une grande ironie du sort dont le Parti québécois devra tirer leçon. L'objectif des fusions municipales était de redonner à la Ville de Montréal son pouvoir sur la banlieue. Malheureusement, force est de constater que ce pouvoir est maintenant entre les mains des maires des anciennes villes de l'île qui ont tous été élus sous la bannière d'Union Montréal. Exception faite de Ville-Marie, tous les arrondissements de l'ancienne ville se retrouvent dans l'opposition.

Comme quoi, l'enfer est souvent pavé de bonnes intentions.