Lettre ouverte à la ministre du Développement Durable, de l'Environnement et des Parcs, Mme Line Beauchamp, à la ministre des Transports, Mme Julie Boulet, et à la ministre des Finances, Mme Monique Jérôme-Forget.

Signée par: Daniel Breton, écologiste, André Bélisle, Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique, Yvan Croteau, Réseau québécois des groupes écologistes, Christian Simard, Nature-Québec, Patrick Bonin, Coalition Québeckyoto, Pierre Lambert, Mouvement Vert Mauricie, Pierre Lussier, Jour de la Terre, Pierre Véronneau, écologiste, Richard Gendron, anthropologue, Vincent François, Coalition Québeckyoto, Jérôme Normand, Environnement JEUnesse

Le réchauffement climatique est, selon la plupart des observateurs des milieux scientifique, économique, financier et écologique, le plus important défi auquel la planète est et sera confrontée. 

Le bilan du Québec en ce qui a trait aux émissions de gaz à effet de serre (GES) est plus favorable que celui d'autres régions du Canada. Il doit cependant être amélioré, particulièrement dans le domaine des transports, qui constitue le premier vecteur d'émissions de CO2 de la province.

Rappelons que pour respecter les objectifs du Protocole de Kyoto, le Québec doit ramener ses émissions de GES à 6% sous les niveaux de l'année 1990, et ce pour la moyenne des années 2008 à 2012. Pour l'instant, malgré ses efforts, le Québec n'est pas en voie d'atteindre ces objectifs.

Afin de diminuer ces émissions, plusieurs moyens doivent être entrepris. Un accès plus facile aux différents modes de transport collectif et l'encouragement au transport actif en sont deux

fondamentaux. Cependant, toutes les régions et tous les gens du Québec n'ont pas accès à ces modes de transport.

Ainsi, beaucoup de Québécois et Québécoises se déplacent en automobile ou en camion léger. Or, nous avons appris que vous avez l'intention de supprimer du budget 2009-2010 le remboursement partiel de TVQ à l'achat ou à la location d'un véhicule écoénergétique.

Permettez-nous d'attirer votre attention sur le danger qu'une telle décision fait porter sur le momentum nécessaire pour changer durablement les habitudes de consommation. Ce processus long et ardu doit être soutenu afin que ces habitudes deviennent naturelles pour la population.

Il y a deux ans, vous avez, grâce à cette mesure positive et populaire, mis en marche un tel processus de changement d'habitude des consommateurs. L'an dernier, cette mesure a d'autant plus contribué à l'achat et la location de véhicules écoénergétiques que la préoccupation envers l'environnement était multipliée par le coût élevé du carburant.

Depuis quelques mois cependant nous nous retrouvons face à un triple problème :

1. Le prix du carburant a de nouveau baissé.

2. Certains constructeurs automobiles offrent d'alléchants rabais sur leurs véhicules énergivores.

3. Le gouvernement fédéral a laissé tomber le crédit qu'il offrait à l'achat ou à la location de

véhicules écoénergétiques.

Tous ces facteurs mènent à une augmentation de la consommation de carburant et donc des émissions de CO2.

Si en plus, le gouvernement du Québec, qui se dit particulièrement sensible au dossier du réchauffement climatique, laisse lui aussi tomber ce programme, le message sera que le réchauffement climatique est sans grande importance, brisant ainsi ce momentum que nous avons mis tant d'efforts à créer et qui commence à porter ses fruits.

Vous avez imposé une taxe dédiée sur le carbone, perçue à la pompe, de 0,8 cents par litre d'essence et de diesel vendu au Québec qui a pour but spécifique de financer les programmes de lutte aux changements climatiques. Nous considérons que cette taxe doit obligatoirement mener à un système de bonus-malus et aider financièrement les acheteurs de véhicules qui consomment peu et pénaliser ceux qui achètent encore des véhicules énergivores. Cela pourrait de plus se faire à l'immatriculation.

Mais en attendant un tel système, le remboursement partiel de TVQ doit rester en place. Il nous semble qu'une taxe dédiée doit mener à un tel programme dédié. Et la taxe sans le programme lancera un très mauvais signal. De la même manière, les vélos, les motos électriques et autres moyens de transport qui n'émettent aucun GES devraient aussi être dispensés de TVQ.

Résumons-nous:

- Les objectifs de diminution de CO2 de Kyoto sont de -6% en moyenne de 2008 à 2012, par

rapport à 1990.

- Les objectifs de diminution de CO2 de KYOTOplus sont de -25% en 2020, par rapport à 1990.

- À kilométrage égal, un automobiliste qui passe d'un véhicule consommant 12 l/100km à un

véhicule consommant 6 l/100km diminue à lui seul ses émissions de CO2 de 50%, c'est

considérable!

Les États-Unis, l'Europe, le Japon et même la Chine et l'Inde possèdent tous des programmes d'aide à l'achat ou à la location de véhicules écoénergétiques. Mettre fin à un tel programme constituerait un recul alors que nous devons avancer.

Cette période historique de double crise écologique et économique est issue de décennies d'absence de vision et d'actions à courte vue. Il est maintenant plus que temps de penser et d'agir à long terme.