Les drones présentent un énorme potentiel dans les efforts de conservation de la faune. Mais ils présentent aussi un énorme potentiel de nuisance pour la faune.

« Quand on va sur l’internet, c’est facile de trouver des cas où on voit des drones qui sont en train d’achaler la faune », déplore Patrick Charbonneau, biologiste responsable des projets de recherche sur les drones au ministère québécois de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs.

Normes à respecter

Le problème est surtout lié à l’utilisation récréative de drones. « En recherche, on a des normes à respecter pour ne pas déranger la faune, indique M. Charbonneau. Si on veut publier nos articles dans les revues scientifiques, on a besoin d’un certificat de bons soins aux animaux délivré par un comité de protection. »

M. Charbonneau et un collègue, Jérôme Lemaître, ont effectué un survol de la recherche en la matière dans un article paru dans Le naturaliste canadien sous le titre « Revue des applications et de l’utilité des drones en conservation de la nature ».

Ils concluent que les drones auraient des effets sur la faune en volant d’un peu trop près. « La distance à respecter pour ne pas déranger la faune, ce serait entre 60 et 100 mètres », indique M. Charbonneau.

PHOTO FOURNIE PAR LE MINISTÈRE DE L’ENVIRONNEMENT, DE LA LUTTE CONTRE LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES, DE LA FAUNE ET DES PARCS

Deux tortues géographiques captées à 50 mètres par un drone

Plus précisément, on parle de 100 mètres pour les mammifères terrestres, les nids de rapaces et les colonies d’oiseaux, d’une cinquantaine de mètres pour les mammifères marins et d’une vingtaine de mètres pour les poissons, les amphibiens et les tortues.

Les microdrones (d’un poids de 250 grammes et moins) seraient moins dérangeants pour la faune, mais il faudrait quand même respecter une distance minimale, soit une cinquantaine de mètres pour les mammifères terrestres et les oiseaux et une dizaine de mètres pour les poissons, amphibiens et tortues. Mais pas question de survoler un nid de rapaces : le stress pourrait amener les petits à sauter hors du nid et les adultes à attaquer le drone.

Il faudrait aussi porter attention à l’angle d’approche des oiseaux.

PHOTO FOURNIE PAR LE MINISTÈRE DE L’ENVIRONNEMENT, DE LA LUTTE CONTRE LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES, DE LA FAUNE ET DES PARCS

Un faucon pèlerin et ses petits. Photo captée par un drone à 100 mètres. Agrandie à ce point, la photo perd de la netteté.

Selon la littérature, ce n’est pas une bonne idée d’approcher les oiseaux du haut vers le bas, ce serait perçu comme de la prédation. Avec une approche à l’horizontale, ou avec un angle peu prononcé, il semble y avoir peu de réactions.

Patrick Charbonneau, biologiste responsable des projets de recherche sur les drones au ministère québécois de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs

Il semble également que les vols plus longs aient plus d’impacts que les vols plus courts.

M. Charbonneau rappelle que la chasse avec un drone est interdite au Québec, de même que la pêche assistée d’un drone dans les rivières à saumon.

PHOTO FOURNIE PAR LE MINISTÈRE DE L’ENVIRONNEMENT, DE LA LUTTE CONTRE LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES, DE LA FAUNE ET DES PARCS

La méthode traditionnelle pour faire l’inventaire des nids de rapaces : un observateur au sol avec un télescope

Pas une solution miracle

Par ailleurs, en faisant une revue de la littérature scientifique et en procédant à ses propres recherches, M. Charbonneau a constaté que les drones ne constituaient pas une solution miracle pour les chercheurs qui étudient la faune.

« Beaucoup de gens pensent que le drone va répondre à tous nos problèmes parce qu’on est en pénurie de main-d’œuvre et qu’avec les drones, ça va coûter moins cher et être tout aussi efficace », indique M. Charbonneau.

Selon la littérature, l’efficacité varie selon les animaux étudiés. Les drones seraient plus avantageux pour les gros animaux et les oiseaux. Mais pas toujours.

M. Charbonneau et ses collègues viennent justement de terminer une étude sur l’aigle royal et le faucon pèlerin. Pour suivre l’évolution des oisillons jusqu’à leur envol, il faut faire quatre sorties d’observation.

« Nous nous sommes rendu compte que les deux premières sorties sur le terrain ne sont pas efficaces avec le drone, c’est encore préférable d’avoir recours à un observateur au sol, relate Patrick Charbonneau. C’est seulement la troisième qui est efficace avec le drone, qui permet de mieux compter le nombre d’œufs ou le nombre de jeunes. Quant à la quatrième sortie, on ne veut pas y aller avec un drone parce que ça peut faire peur aux jeunes et les inciter à sauter hors du nid. »

PHOTO FOURNIE PAR LE MINISTÈRE DE L’ENVIRONNEMENT, DE LA LUTTE CONTRE LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES, DE LA FAUNE ET DES PARCS

Ces tortues géographiques ont été captées par un drone à 70 mètres de distance.

L’équipe a également constaté que, dans le cas des tortues, le drone était capable de les détecter, mais pas de les identifier.

« L’ADN environnemental serait probablement plus efficace pour ça », affirme M. Charbonneau. Ce procédé consiste à détecter l’ADN de la tortue dans des échantillons d’eau. « En ce moment, l’ADN environnemental, c’est une grande tendance », ajoute-t-il.

Le drone peut être appelé à remplacer l’hélicoptère, une des principales causes de mortalité des biologistes dans l’exercice de leurs fonctions. Mais lorsqu’il est question de longues distances, comme dans le Grand Nord, l’hélicoptère peut demeurer la méthode la plus efficace pour effectuer des inventaires.

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Chiffre de la semaine 

57 100

C’est le nombre de visites enregistrées dans les parcs nationaux l’hiver dernier au cours des 24 journées d’accès gratuit, projet du gouvernement du Québec qui a permis de doubler l’achalandage.

Source : SEPAQ