(Toronto) La Ligue professionnelle de hockey féminin enchaîne les soirées magiques. Les salles combles. Les records de foule. Mais vendredi soir, la LPHF s’est vraiment surpassée.

Son affiche Montréal-Toronto, présentée au Scotiabank Arena, domicile des Maple Leafs, a été un triomphe spectaculaire. L’assistance officielle ? 19 285 spectateurs. Une nouvelle marque mondiale pour un match de hockey féminin, toutes compétitions confondues. Ce succès est d’autant plus remarquable que les billets ont tous été vendus en quelques minutes.

Dans les gradins, l’ambiance était bon enfant. Des centaines de jeunes filles et d’adolescentes, vêtues de leurs uniformes de hockey, se sont chargées de faire lever le party. Elles chantaient. Elles dansaient. Elles s’époumonaient. Lorsque Jesse Compher a brisé une égalité de 0-0 en début de troisième période, les adultes s’y sont mis à leur tour. Après ce but décisif, ce fut une longue célébration, jusqu’au coup de sifflet final confirmant la victoire de 3-0 des Torontoises.

  • Pour la première fois de sa jeune existence, la Ligue professionnelle de hockey féminin (LPHF) présentait un match au Scotiabank Arena de Toronto, domicile des Maple Leafs dans la LNH.

    PHOTO CHRIS YOUNG, LA PRESSE CANADIENNE

    Pour la première fois de sa jeune existence, la Ligue professionnelle de hockey féminin (LPHF) présentait un match au Scotiabank Arena de Toronto, domicile des Maple Leafs dans la LNH.

  • Le match a établi un record d’assistance en présentant une salle comble de 19 285 spectateurs, surpassant aisément l’ancienne marque (13 316) établie au Minnesota, le 6 janvier dernier.

    PHOTO CHRIS YOUNG, LA PRESSE CANADIENNE

    Le match a établi un record d’assistance en présentant une salle comble de 19 285 spectateurs, surpassant aisément l’ancienne marque (13 316) établie au Minnesota, le 6 janvier dernier.

  • Quoi de mieux qu’une affiche Montréal-Toronto pour ajouter un peu de piquant à cette rencontre à saveur historique ?

    PHOTO CHRIS YOUNG, LA PRESSE CANADIENNE

    Quoi de mieux qu’une affiche Montréal-Toronto pour ajouter un peu de piquant à cette rencontre à saveur historique ?

  • Petit caucus dans le camp torontois avant le début des hostilités

    PHOTO CHRIS YOUNG, LA PRESSE CANADIENNE

    Petit caucus dans le camp torontois avant le début des hostilités

  • À l’action, Jesse Compher (à gauche) et ses coéquipières ont été sans pitié pour leurs rivales, l’emportant 3-0.

    PHOTO CHRIS YOUNG, LA PRESSE CANADIENNE

    À l’action, Jesse Compher (à gauche) et ses coéquipières ont été sans pitié pour leurs rivales, l’emportant 3-0.

  • Jesse Compher tente de loger la rondelle au-dessus de l’épaule d’Ann-Renée Desbiens en troisième période.

    PHOTO CHRIS YOUNG, LA PRESSE CANADIENNE

    Jesse Compher tente de loger la rondelle au-dessus de l’épaule d’Ann-Renée Desbiens en troisième période.

  • Blayre Turnbull fait preuve d’une belle coordination devant le filet adverse… mais sans succès.

    PHOTO CHRIS YOUNG, LA PRESSE CANADIENNE

    Blayre Turnbull fait preuve d’une belle coordination devant le filet adverse… mais sans succès.

  • Jesse Compher (au centre) et Hannah Miller (à droite) ont été deux des trois marqueuses de ce match.

    PHOTO CHRIS YOUNG, LA PRESSE CANADIENNE

    Jesse Compher (au centre) et Hannah Miller (à droite) ont été deux des trois marqueuses de ce match.

1/8
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

« Je suis un homme au mitan de sa vie, derrière un banc, et j’étais ému », a commenté l’entraîneur-chef des Torontoises, Troy Ryan. « Je ne peux même pas imaginer ce que vivent toutes ces femmes qui se sont battues si longtemps pour avoir une occasion comme celle-là. La foule était tellement énergique que nos entraîneurs recevaient des notifications sur leur montre les informant que le bruit environnant était trop fort ! »

« C’était surréaliste », s’est exclamée Marie-Philip Poulin, souriante malgré la défaite. « Le résultat n’est pas celui qu’on espérait. Après, tu regardes toutes ces pancartes dans les gradins. Tu vois toutes ces filles, tous ces garçons, toutes ces familles qui se présentent à nos matchs. C’est incroyable. » La capitaine des Montréalaises a même eu droit à des applaudissements nourris de la foule torontoise avant la partie. « Ça m’a un peu surprise, parce qu’à Ottawa j’avais été huée [rires]. Ça m’a fait chaud au cœur. »

Une fois toute cette énergie absorbée, on ne peut pas s’empêcher d’espérer un rendez-vous sportif comme celui-là au Centre Bell. Après la rencontre, Marie-Philip Poulin et Erin Ambrose ont confié leur souhait de disputer un match de la LPHF au Centre Bell dans un avenir rapproché. Leur entraîneuse-chef, Kori Cheverie, en a ajouté une couche.

J’aimerais qu’on batte le record. Ce serait bien. C’est mon côté compétitif qui ressort [rires]. J’espère que ça arrivera.

Kori Cheverie, entraîneuse-chef de l’équipe de Montréal

Ce n’est pas prévu dans le calendrier d’ici la fin de la saison, quoique je n’exclurais pas le déplacement d’une partie de Verdun au Centre Bell, en avril. Autrement, si les Montréalaises se qualifient pour les séries, serait-ce possible ?

J’ai posé la question à la directrice générale Danièle Sauvageau, croisée dans les coulisses du Scotiabank Arena. « Il n’y a rien d’impossible », m’a-t-elle répondu, emballée par les succès de la LPHF. « Il faut regarder ça. Ça va arriver un jour. Quand ? Je ne peux pas te le dire. Mais ça arrivera. Le record de Toronto sera battu à un moment donné, car le plus grand amphithéâtre, c’est le Centre Bell. »

Chose certaine, elle y travaille. Erin Ambrose l’a d’ailleurs confirmé après la rencontre. Et croit-elle que ce serait possible de remplir le domicile du Canadien pour un match de hockey féminin ?

« Oui ! Heille, c’est Montréal ! »

Pour vendre 19 000, 20 000, 21 000 billets, ça prend néanmoins des conditions gagnantes. Le meilleur coup de la LPHF, c’est d’avoir réussi à créer un effet de rareté avec un calendrier limité à 24 parties. C’est plus facile de vendre un abonnement de 12 matchs que de 30 ou 40 parties. On se retrouve ainsi dans une situation où l’offre est inférieure à la demande. C’est surtout apparent dans le marché de Toronto, où l’équipe joue habituellement dans un petit aréna de 2500 sièges, qui sont tous vendus depuis longtemps. La LPHF étudie d’ailleurs ses options, ici, pour s’installer dans un aréna deux fois plus grand, la saison prochaine. En parallèle, la ligue compte limiter son calendrier 2024-2025 à 32 matchs par équipe.

« Il faut réussir à créer cette rareté-là pour jouer dans le plus grand amphithéâtre disponible à Montréal », fait valoir Danièle Sauvageau. Puis la DG d’enchaîner : « À Verdun, c’est plein. À Toronto, c’est plein. À Laval, dimanche, ce sera plein. » Ces derniers jours, on a également vu des foules de 6000 et 8000 spectateurs au Minnesota et à Ottawa. « Et ça fait des petits. Il y a récemment eu des matchs avec plus de 2000 personnes en France et en République tchèque. »

Au début, je disais qu’il fallait vendre un billet à la fois. Puis deux. Maintenant, il n’y a plus de billets disponibles. Notre sport est rendu là.

Danièle Sauvageau, directrice générale de l’équipe de Montréal

« Avant, lorsqu’il était question de hockey féminin, on parlait surtout de développement de l’athlète à long terme, ou de championnats du monde. Aujourd’hui, on en parle comme d’une industrie. Le discours a changé. »

Le public aussi.

Il est possible que le hockey féminin ne soit pas votre tasse de thé. Soit. Sachez toutefois qu’il réussit à convertir bien des gens qu’on ne voit pas souvent dans les autres arénas.

« Je remarque qu’il y a beaucoup de nouveaux amateurs, note Danièle Sauvageau. Des petits garçons. Leurs parents. Des gens qui étaient en périphérie du hockey féminin, avant, et qui désirent maintenant faire partie [du mouvement]. Pense aux enfants qui ont 7, 8, 9, 10 ans. Ils n’ont aucune idée que le hockey professionnel féminin vient tout juste de commencer. Pour eux, c’est tout ce qu’ils ont connu. Aussi, les joueuses sont accessibles. Il y a quelque chose de pur dans leurs intentions. Tu ne regardes personne en te disant qu’elle, elle fait 64 millions. Le regard sur les joueuses a changé. La reconnaissance également. Les gens se sont approprié l’équipe. Ils sont derrière elle. »

Vivement un match revanche contre Toronto au Centre Bell !