Peu de Québécois comprennent les réalités de la profession infirmière. Cela est normal, car nous sommes très occupées à soigner et peu portées à faire de la politique ou à faire entendre notre voix.

Un peu défaitistes aussi : tellement habituées à voir tous les projecteurs tournés vers les autres professions, peu enclines à mettre de l’avant que notre rôle et nos compétences ont complètement changé depuis l’époque des religieuses. Nous ne devons pas nous plaindre de ne pas être considérées à notre juste valeur si nous nous taisons sur notre réalité.

Après un (trop) court diplôme d’études collégiales (DEC), il est possible de passer l’examen de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) et de devenir infirmière (bonne chance !). Il y a 20 ans, une technique était suffisante pour débuter dans la profession, et les techniciennes actuelles devraient se voir reconnaître dans toute l’étendue de leurs connaissances et de leurs compétences avec des « clauses grand-père ».

Par contre, pour les prochaines cohortes, le baccalauréat devrait être vu comme le minimum pour accéder à la profession. La médecine et les soins infirmiers se sont considérablement complexifiés dans les dernières décennies.

Lors du DEC, nous apprenons un peu de tout, nous survolons les différentes spécialités : médecine, chirurgie, obstétrique, pédiatrie, gériatrie, etc. C’est un véritable « saupoudrage » et poursuivre ensuite au baccalauréat permet d’approfondir un peu plus les connaissances, sans faire de nous des spécialistes pour autant. Nous exerçons notre profession ensuite dans un domaine particulier et nous nous « spécialisons » ainsi sur le terrain.

Cela prend en moyenne deux ans pour se sentir à l’aise dans un domaine particulier et cinq ans pour être en plein contrôle de notre rôle dans un milieu de soins ou un département donné. Les médecins, eux, se spécialisent à l’école et on ne demanderait jamais à un gériatre d’aller faire de l’obstétrique. C’est pourtant ce que l’on demande aux infirmières, d’être compétentes dans tous les secteurs et spécialités et d’être « mobiles ». Ce n’est pas réaliste, ce n’est pas sécuritaire, ce n’est pas une bonne idée.

Je le répète, peu de Québécois comprennent les réalités de la profession infirmière. Peu de politiciens aussi. On entend les politiciens dire qu’« une infirmière, c’est une infirmière » et qu’« elles doivent être envoyées là où il y a le plus de besoins ».

Je vais donc tenter une comparaison qui frappera peut-être l’imaginaire de certains politiciens : envoyer une infirmière contre son gré dans un département où elle n’est pas spécialisée, c’est comme envoyer Wayne Gretzky gardien de but. Un joueur de hockey, c’est un joueur de hockey ! Apparemment non, un centre et un défenseur, c’est très différent, même un ailier gauche et un ailier droit, ce n’est pas la même chose, paraît-il. Est-ce que Wayne Gretzy serait capable d’arrêter quelques rondelles ? Probablement. Mais c’est Patrick Roy qu’on veut devant les buts.

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