L’auteure, cheffe du département d’urgence CISSS de l’Outaouais, s’adresse au ministre de la Santé, Christian Dubé.

M. le Ministre,

Les médecins d’urgence de la région de l’Outaouais, d’une voix unanime, s’adressent à vous, car la situation critique qui prévaut dans notre région n’est plus tenable et notre population est en danger. Il ne sera bientôt plus possible, en Outaouais, d’offrir des soins d’urgence sécuritaires et de qualité.

Comme urgentologues, nous recevons les patients les plus malades et notre mission est de les soigner. Dans les dernières années, nous avons été témoins de l’effritement de notre capacité à donner des soins de qualité à ces patients. Les délais d’accès à l’urgence pour les tests de laboratoires et pour l’imagerie ainsi que l’importante pénurie d’infirmières compromettent notre capacité à répondre aux besoins de nos patients. La proximité de notre région avec l’Ontario engendre un exode massif de travailleurs de la santé vers cette province qui offre des conditions salariales et de travail largement plus attrayantes.  Il n’est plus possible pour nos équipes de faire compétition à notre voisin.

La région de l’Outaouais, qui comprend la quatrième plus grande ville au Québec, n’a plus aucun accès à l’imagerie dans son urgence du CLSC de Saint-André-Avellin. Le scan de l’hôpital de Papineau fonctionne de soir exclusivement sur la base de temps supplémentaire et ne fonctionne de nuit que sur appel. Il n’y a plus d’imagerie après 20h à Wakefield et Maniwaki, un centre de trauma. L’unité mobile d’IRM a été fermée à Gatineau. Le Pontiac fonctionne déjà sur appel de nuit. Récemment, nous avons appris le départ imminent de trois autres technologues de notre centre de traumatologie secondaire régional à Hull. Cette situation critique causera inévitablement un bris de service en imagerie dans l’installation qui reçoit la traumatologie, la neurologie, la neurochirurgie et la cardiologie.

Rappelons qu’en 2020, il n’a fallu que 2h30 après le bris du scan de l’hôpital de Hull pour qu’un décès, attribuable en partie à ce bris, ne se produise. Opérer une urgence sans capacité en imagerie est tout simplement impossible. 

Rappelez-vous, M. Dubé que nous avons dû fermer l’urgence de Gatineau en 2021 par manque d’infirmières. Nous avons rouvert huit mois plus tard, mais l’urgence aujourd’hui ne tient de nouveau qu’à un fil grâce à notre équipe d’infirmières dévouées, qui ne compte que 29% de ses effectifs.

N’abandonnez pas les citoyens de l’Outaouais! Vous avez les moyens de poser des gestes concrets pour prévenir des décès qui seraient autrement attribuables à l’absence d’une solution immédiate de votre part. En tant que cheffe du département d’urgence de l’Outaouais, je vous exhorte, Monsieur le Ministre, à prendre les mesures nécessaires, immédiatement, pour remédier à cette situation. La seule solution qui puisse assurer le maintien des services, au-delà des remplacements ponctuels, est d’offrir à nos professionnels de la santé les mêmes conditions salariales que l’Ontario offre aux leurs.

Sans votre intervention, il n’est plus possible d’assurer la sécurité et le bien-être de la population de l’Outaouais. Les citoyens de l’Outaouais ne devraient pas être pénalisés parce qu’ils habitent à côté d’Ottawa.

C’est une question de vie ou de mort. 

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de mes salutations distinguées. 

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