La publication, la semaine dernière, d’un rapport sur le REM de l’Est a suscité beaucoup de commentaires, avant tout pour des projections de coût pharaoniques : entre 21 et 43 milliards de dollars, pour un métro souterrain allant de 22 à 47 km. Sans surprise, une majorité de voix se sont élevées pour décrier un projet hors de prix et exiger son tablettage immédiat. Comment aller de l’avant avec un tel projet avec un si faible nombre potentiel d’usagers ?

Personne, ou presque, pourtant, ne semble s’être demandé comment, à un tel prix, ailleurs dans le monde des villes, souvent bien plus petites que Montréal, peuvent continuer à se payer des métros neufs. La réponse est simple : s’appuyant sur des équipes compétentes et expérimentées, elles construisent plus vite et pour beaucoup moins cher !

Ainsi, Toulouse, qui a inauguré sa première ligne de métro il y a 30 ans, construit actuellement sa troisième. Cette ligne souterraine de 27 km et 21 stations, commencée en 2021 et dont l’inauguration est prévue pour 2028, devrait coûter 3,5 milliards d’euros, soit environ 5,1 milliards. Beaucoup moins cher, au kilomètre, que le REM actuel, et presque six fois moins cher que l’évaluation du REM de l’Est ! Surtout que les coûts du métro de Toulouse sont tout à fait dans les normes de ce qu’on observe ailleurs en Europe.

Si la France est capable de déployer des infrastructures publiques à des coûts raisonnables et en respectant ses échéanciers, pourquoi le Québec et le Canada ne peuvent-ils le faire ?

Les causes de cet échec sont multiples. Mais force est de constater que nos institutions publiques ont perdu la capacité de mener à bien de grands projets de manière efficace et à des coûts raisonnables. Et la liste des échecs ne cesse de s’allonger : des maisons des aînés à plus de 1 million la chambre ; le garage Bellechasse de la STM à plus de 1 milliard ; des usines de compostage que Montréal ne parvient pas à terminer ; et un projet de voie de contournement à Lac-Mégantic qui n’a pas encore démarré, plus de 10 ans après la catastrophe.

Résultat : devant notre incurie collective, les gouvernements s’enlisent et pellettent toujours plus en avant des investissements en infrastructure pourtant essentiels. Parlez-en à Laval, qui a dû abandonner son projet de centre de biométhanisation devant l’explosion des coûts.

Agir dès maintenant

Or, l’atteinte des objectifs climatiques couplée à l’augmentation significative de la population prévue au cours des deux prochaines décennies signifie qu’il faudra tout à la fois augmenter de manière importante la production d’électricité, et renforcer et multiplier les réseaux de transport et de distribution d’électricité tout en densifiant les villes autour d’infrastructures lourdes en transport collectif.

Il faudra donc changer nos façons de faire afin d’apprendre – ou de réapprendre – à agir rapidement avec une productivité élevée, et ainsi réduire de manière importante les délais et les coûts.

On ne peut espérer que ces gains se produisent d’eux-mêmes. Au contraire, à chaque échec, la machine s’enlise un peu plus, ajoutant des barrières, des normes et des contraintes qui ralentissent les projets et font encore grimper les coûts déjà exorbitants. Il faut plutôt adopter une approche volontaire, qui s’appuie sur les meilleures pratiques à l’étranger, dont l’objectif est de faire en sorte de ramener le Québec et le Canada dans le peloton des pays les plus efficaces dans la conception et le déploiement des infrastructures.

Le temps presse. Les gouvernements dépensent déjà des milliards de dollars chaque année dans la lutte contre les changements climatiques avec, malheureusement, des résultats qui sont bien en dessous des attentes et des promesses. À moins d’une stratégie forte pour renverser la tendance, nous continuerons à prendre du recul par rapport au reste du monde. Il ne fait aucun doute : nous n’avons pas les moyens de continuer sur la voie de la médiocrité, nous devons agir dès maintenant.

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