Il est midi à Montréal et il fait 31 degrés. Je suis allongée dans mon lit, réduisant mes actions pour ne pas souffrir de la chaleur, je parcours La Presse et je tombe sur l’article de Marissa Groguhé sur votre décision d’abandonner le cinéma.

Je ne suis qu’à moitié étonnée ; je vous ai toujours considéré comme une étoile filante, un talent éclatant dont l’art de vouloir tout maîtriser côtoie de près l’irréel. Je regardais, il y a quelques semaines encore, un reportage sur votre carrière et j’en étais essoufflée. Qui ne se brûlerait pas en plein vol avec cette incroyable énergie qui a toujours caractérisé votre travail ? Vous noterez l’emploi du verbe « brûler », nous y reviendrons.

Vous avez atteint les sommets en une poignée d’années, vous avez attiré les caméras sur notre petit bout d’Amérique francophone. Je ne commenterai pas votre décision d’arrêter le cinéma, je compatis sincèrement, au contraire.

Cependant, le dernier extrait de l’article m’a interloquée, ou plutôt non, j’en ai été révoltée.

Je vais me construire une maison et aller m’y réfugier avec mes amis et regarder le monde brûler.

Xavier Dolan

Je n’ai pas le contexte en entier et je ne lis pas l’espagnol pour lire votre entrevue d’El Mundo, mais…

Comment un artiste de votre trempe, d’une générosité inégalée dans ses réalisations cinématographiques peut-il avoir une réflexion aussi égoïstement propre à l’homme blanc riche de l’hémisphère Nord ?

Outre votre richesse, qui pourrait vous aider à vous mettre à l’abri, vos amis et vous, dans une maison fraîchement construite quelque part en Gaspésie et observer passivement le cours des choses (ce dont je doute, observant votre hyperactivité qui vous caractérise), vous possédez quelque chose de précieux, dont 99,9 % des gens qui travaillent de leurs petites mains à un changement pour le futur sont dépourvus. Vous possédez le porte-voix !

Et en ce sens vous avez une responsabilité, la responsabilité d’utiliser ce porte-voix, ce micro qui vous est tendu en tant qu’artiste internationalement connu. L’utiliser comme moteur de changement et non comme thérapie à votre anxiété. Vous n’ignorez pas que vos maux font le tour du monde.

C’est une gifle en plein visage que vous lancez à tous ceux qui se battent au quotidien, sans couverture médiatique.

Prenez un pas de recul, prenez le temps de vous reposer, de vous éloigner des paillettes si superficielles. Et revenez-nous avec des idées, comme vous savez si bien le faire. Parlez à Roy, à Christine et à tant d’autres qui utilisent leur notoriété pour faire avancer les choses. Réalisez un documentaire sur Greta et invitez-moi à la projection de presse, je serai dithyrambique, promis !

Il est midi à Montréal, le ressenti est de 37 degrés, je vais aller gratter la terre au jardin communautaire, je vais changer les choses à mon niveau. Votre niveau est bien plus important que vous ne semblez le croire.

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