Ce fut la semaine de Denis Coderre et de Paul St-Pierre Plamondon, dont la rencontre dans les corridors de l’Assemblée nationale a rappelé aux plus nostalgiques le retour de la polarisation référendaire et des combats entre Capitaine Québec et Capitaine Canada.

Mais les deux politiciens sont dans des situations fort différentes.

Denis Coderre voudrait revenir aux affaires comme chef du Parti libéral du Québec et il s’y prend avec sa bonne vieille méthode : un populisme qui lui autoriserait tous les revirements. Paul St-Pierre Plamondon, lui, a un peu le problème inverse : il est en voie d’être dépassé par son propre succès et il est prisonnier de sa propre rigidité.

Dans sa campagne à la direction du Parti québécois, PSPP avait une stratégie qui visait essentiellement à ramener les vieux péquistes à la maison. Et cela a très bien marché.

D’abord, retrouver le chemin d’une victoire symbolique par l’abolition du serment au roi. Ensuite, reprendre les recettes connues du PQ : le budget de l’an 1, une critique du seuil d’immigration canadien et la promesse de tenir un référendum pendant un premier mandat d’un gouvernement du Parti québécois – toujours populaire auprès des militants péquistes.

En suivant son plan de match – et aussi grâce aux erreurs répétées du gouvernement Legault –, PSPP et le PQ se sont retrouvés au premier rang des intentions de vote et donc dans la position de gouvernement en attente.

Mais ce qui accroche avec l’électorat, c’est la promesse d’un référendum sur la souveraineté dans un premier mandat d'un gouvernement péquiste.

Selon le dernier sondage Léger, l’appui à la souveraineté ne suit pas la popularité du PQ. Seulement 35 % des Québécois voteraient Oui à un référendum⁠1 – une « consultation populaire », dit maintenant le PQ comme si ça devait changer quelque chose. Pour mémoire, ce serait une plus cuisante défaite qu’au premier référendum en 1980.

Ce qui est encore plus embêtant, c’est que le quart (24 %) de ceux qui disent vouloir voter PQ voteraient Non au référendum. Chez Québec solidaire, l’autre parti officiellement souverainiste – mais de moins en moins dans les faits –, c’est 59 % des répondants qui voteraient Non. Notons aussi que 32 % des électeurs caquistes voteraient Oui.

Mais à la fin, le PQ de PSPP serait loin du compte, même sans considérer l’effet refroidissant que pourrait avoir la promesse d’un référendum.

Quand on ne peut même pas compter sur une majorité chez les francophones (43 % pour, 47 % contre), il est difficile de voir comment on peut même songer à un référendum qui serait autre chose qu’un rejet du projet souverainiste par une troisième génération de Québécois.

L’aspirant présumé à la direction du Parti libéral du Québec, Denis Coderre, a le problème inverse de PSPP. Il n’a toujours eu qu’un seul credo, le populisme, qu’il définit aujourd’hui comme suit : « Il faut s’ajuster aux gens et non le contraire. »

Ce qui lui permet d’être désormais en faveur du troisième lien à Québec, ce qui est d’autant plus commode qu’il songerait, s’il devenait chef, bien entendu, à se présenter dans la région de Québec, sur la Rive-Sud, là où ledit troisième lien est le plus populaire.

Pour un homme qui déclarait que le PLQ était est trop à gauche et qui se décrit comme ayant « le portefeuille à droite », il semble que les milliards destinés au troisième lien et qui auront fait reculer le gouvernement caquiste ne pèsent pas très lourd.

Mais ce qui est le plus remarquable est sa volte-face sur la loi 21 sur le port des signes religieux qu’il avait combattue alors qu’il était maire de Montréal.

Dans le temps, il n’excluait pas de contester la loi devant les tribunaux et songeait à utiliser le statut de métropole pour se soustraire à cette loi. De toute façon, disait-il, « ce n’est pas au gouvernement du Québec à choisir mes employés », avait-il dit en commission parlementaire.

La loi 21, disait-il à l’époque, aurait pour effet « d’institutionnaliser la discrimination à l’emploi ». Aujourd’hui, M. Coderre croit le contraire et que ce serait une bonne chose que de recourir à la clause dérogatoire pour cinq ans de plus afin de soustraire la loi 21 à l’examen des tribunaux.

« Moi, je suis catholique pratiquant, mais je crois à l’État laïc. Ce n’est pas à moi à dicter. On a, comme société, choisi d’avoir un État laïc », a-t-il déclaré pour justifier sa volte-face.

Sauf que, pas plus tard qu’en août dernier, M. Coderre estimait dans un tweet que la pénurie d’enseignants était attribuable à la loi 21. A-t-on vérifié auprès de « ceux qui portaient un signe religieux (comme un turban par exemple) […] s’ils ont été calculés dans le lot de ceux qui manquent ??? », demandait-il.

C’était à la fin août. Aujourd’hui, il prétend le contraire. M. Coderre dit avoir été la malheureuse victime non pas d’un, mais de deux piratages de ses interventions passées sur Twitter et Facebook.

Dommage, parce qu’en cherchant, on aurait trouvé d’autres perles populistes.

1. Consultez le sondage mené par Léger