(Québec) Denis Coderre « aime mieux prévenir que guérir » et lance – même s’il n’est pas encore candidat officiel à la chefferie libérale – un mouvement contre la menace référendaire. À Québec mercredi, l’ex-maire de Montréal s’est présenté en gardien de la fédération.

« Ça vous tente-tu de parler des vraies affaires ? Si vous ne voulez pas que je sois candidat, lâchez le référendum », a lancé Denis Coderre aux journalistes qui l’attendaient dans les corridors du parlement. L’ancien maire était mercredi à l’Assemblée nationale pour assister à la période des questions depuis les tribunes du Salon bleu.

M. Coderre s’est déplacé de son propre chef et n’a pas été invité par le caucus libéral. L’aile parlementaire de la formation a confirmé qu’aucune rencontre n’était d’ailleurs au programme. « Je veux être respectueux envers eux, je n’ai demandé d’appui à personne. D’ailleurs, je suis toujours en réflexion », a-t-il dit. Des rencontres sont prévues avec « des organisateurs, des militants », a-t-il précisé.

S’il songe aujourd’hui à briguer la direction du Parti libéral du Québec (PLQ), c’est en raison de la montée du Parti québécois (PQ), qui est premier dans les intentions de vote. « La raison pourquoi je réfléchis à revenir, c’est à cause de ça », a affirmé le principal intéressé.

Ce n’est pas moi qui dis qu’on va faire un troisième référendum. Je sais que le PQ dit que je fais peur ce matin. [Mais] ce n’est pas moi qui parle d’un troisième référendum, ce n’est pas moi qui compare le Québec à la Slovaquie. C’est M. Plamondon.

Denis Coderre

Le chef péquiste s’est d’ailleurs approché de la mêlée de presse pour écouter l’ancien maire. Lorsqu’on lui a signifié sa présence, M. Coderre a rapidement invité Paul St-Pierre Plamondon devant les caméras. « Viens-t’en, tu vas faire les nouvelles », a-t-il lancé. « Monsieur Plamondon, on n’est pas d’accord, mais je vous trouve très digne et très respectueux », a ajouté M. Coderre. Le leader du PQ l’a brièvement remercié avant de lui souhaiter la bienvenue à Québec.

Un peu plus tôt, Paul St-Pierre Plamondon avait cependant un message pour lui : « J’ai toujours dit qu’il ne fallait pas sous-estimer Denis Coderre, vous voyez sa capacité à attirer l’attention médiatique, mais je lui dirais aussi de ne pas nous sous-estimer », a-t-il affirmé mercredi, déplorant que M. Coderre utilise un « argumentaire de peur » contre l’indépendance.

Denis Coderre affirme par ailleurs que les élections de 2026 seront « une campagne référendaire ».

« Je n’ai pas à douter de M. Plamondon, il dit que s’il a le pouvoir, [il va faire un référendum], alors ça veut dire que pour la prochaine élection, ça va être l’axe fédéralisme-séparatisme, c’est clair. Les libéraux, c’est le seul parti fédéraliste au Québec », a-t-il plaidé, décochant une pique à la CAQ de François Legault.

J’ai hâte d’entendre Bernard Drainville dire qu’il va protéger le Québec dans le Canada.

Denis Coderre

Il lance dès maintenant le mouvement « Non, merci » (slogan du camp du non en 1980) sur les réseaux sociaux. « Je ne veux pas qu’on prenne les Québécois pour acquis et moi, j’aime mieux prévenir que guérir, on va être prêts », a-t-il expliqué.

Sa visite a d’ailleurs brouillé le message du gouvernement, mercredi.

« M. Coderre qui veut nous ramener à la vieille époque du Oui et du Non. Écoute… Moi, je suis venu à la CAQ parce que je pense qu’on en a eu assez, de cette époque. Alors on regarde en avant. Je suis ministre de l’Éducation et, comme société, on a des enjeux pas mal plus importants et prioritaires qu’un autre référendum sur la souveraineté », a réagi le ministre Bernard Drainville.

« Il n’y en aura pas, de référendum, peu importe que Denis Coderre et Paul St-Pierre Plamondon soient devenus maintenant les deux meilleurs amis, l’un ayant besoin de l’autre. Les vieux partis ramènent la même vieille question. […] Ce que je vois, c’est que Paul St-Pierre Plamondon est très, très, très content que Denis Coderre s’impose en ce moment dans l’espace public parce que les deux essaient de promouvoir un référendum encore. Ce n’est pas ce que les Québécois veulent », a affirmé le ministre Jean-François Roberge.

Rive-Sud dans la région de Québec

M. Coderre doit décider s’il saute dans l’arène politique québécoise après son pèlerinage à Compostelle, au printemps. Ensuite, « gagne ou perd » la course, il sera candidat du PLQ en 2026. L’ex-maire de la métropole a fait savoir mercredi qu’il choisirait une circonscription de la Rive-Sud dans la région de Québec, ce qui n’inclut pas la Beauce, a-t-il dit.

La Capitale-Nationale a besoin d’un « projet structurant » de transport collectif, comme le tramway à Québec. Il ne faut pas non plus « laisser tomber » l’idée d’un troisième lien autoroutier entre Québec et Lévis. « Ce n’est pas normal qu’une capitale de 500 000 habitants n’ait pas de projet structurant. Maintenant, on n’est pas obligés de mettre des bicycles partout. Je pense qu’on a besoin d’un troisième lien », a-t-il dit.

M. Coderre n’a pas voulu préciser la forme. « Un, qui coûte le moins cher possible. Deux, qui assure la fluidité. On n’a pas besoin de creuser un tunnel pour ça », a-t-il indiqué.

Les libéraux ont été peu bavards avant la visite de M. Coderre à l’Assemblée nationale. « M. Coderre, comme n’importe quel citoyen, a le droit de venir à l’Assemblée nationale, il va assister à la période de questions. Le caucus, c’est une chose, le parti, c’est autre chose », a fait valoir le député libéral Monsef Derraji.

M. Derraji a refusé de commenter les positions de l’ancien maire. « On va continuer notre travail, il y a une course au leadership, […] est-ce que les militants libéraux vont choisir un chef qui va stopper le mouvement indépendantiste ? On n’est pas là. La course sera lancée », a-t-il dit.

Avec la collaboration de Tommy Chouinard, La Presse