En arrivant à son caucus, la semaine dernière, le premier ministre François Legault a demandé à ses députés de se « recentrer » sur les cinq priorités de son parti depuis sa fondation : éducation, économie, santé, environnement et protection de notre identité.

Question : y a-t-il quelque chose que fait le gouvernement du Québec qui n’entre pas directement ou indirectement sous l’une ou l’autre de ces têtes de chapitre ? Or, en politique, quand tout est une priorité, rien n’est une priorité.

M. Legault avait quitté l’Assemblée nationale en décembre en demandant au père Noël de lui donner une boussole. De toute évidence, il ne l’a pas encore trouvée.

En tout cas, pas ce type de boussole qui permet de donner des priorités précises à un gouvernement. Celui-ci n’est que dans la deuxième année de son mandat, mais il donne bien davantage l’impression de chercher son souffle que d’avoir une feuille de route précise.

D’autant que les finances publiques ne vont pas bien. Les négociations du secteur public ont coûté plus cher que prévu et il faudra donc emprunter davantage, a déjà expliqué le ministre des Finances, Eric Girard.

Le premier ministre a promis à Sherbrooke qu’il y aurait de la rigueur budgétaire, mais pas d’austérité. Il devrait parler à son prédécesseur. Philippe Couillard parlait toujours de rigueur, mais c’est le mot « austérité » qui s’est tout de même imposé. Il ne faudra pas beaucoup de compressions dans les services à la population pour que la chose se reproduise.

Cela dit, certaines priorités s’imposent d’elles-mêmes, et si le gouvernement Legault veut se donner un nouveau départ, il devrait déjà savoir qu’il y a des dossiers majeurs qui sont loin d’être réglés.

D’abord, quoi qu’on puisse en penser, les négociations du secteur public ne sont pas terminées. Il n’y a pas d’entente avec les infirmières et, en éducation, il n’est pas du tout certain que l’entente conclue à la table sera ratifiée quand tout le monde se sera prononcé.

Le gouvernement a cru qu’il pourrait pas mal tout régler en mettant un peu plus d’argent sur la table, mais plusieurs syndicats ont rejeté cette approche.

L’enjeu majeur demeure les conditions de travail, et l’insatisfaction des syndiqués est manifeste, ce qui explique la difficulté de faire ratifier les nouvelles conventions collectives.

« Ce n’est pas vrai que l’ensemble des problèmes se monnaient. Au contraire. Il faut que ce soit des conditions de travail qui, à moyen et long terme, viennent faire toute la différence dans le réseau public de la santé », rappelait récemment Julie Bouchard, la présidente de la FIQ. De toute évidence, le gouvernement n’a pas la même vision des choses.

La crise du logement devrait aussi être une priorité du gouvernement. Mais la faiblesse de la ministre responsable n’inspire pas la plus grande confiance. C’est une crise qui, pourtant, touche l’ensemble du Québec, de la métropole aux plus petites villes en région.

Le gouvernement Legault a créé le Programme d’habitation abordable Québec (PHAQ) il y a deux ans.

Mais selon la Société d’habitation du Québec, seulement 46 logements financés par le PHAQ sont actuellement « en réalisation » et aucun n’est en exploitation.

Pour donner une idée de l’ordre de grandeur du problème, prenons l’exemple de la ville de Québec. L’administration du maire Bruno Marchand voudrait doubler les mises en chantier pour répondre à la demande, à raison de 5000 nouvelles unités par année pour les trois prochaines années.

On ne s’étonnera pas que, le mois dernier, quand la ministre France-Élaine Duranceau a annoncé la construction de 1000 nouveaux logements sociaux subventionnés, la réaction des groupes intéressés par les questions du logement ait été loin d’être joyeuse.

Mais en plus de ces deux urgences à régler, il faudra surveiller les effets à long terme des changements de structure qui ont été adoptés à la fin de la dernière session en éducation et en santé.

Dans les deux cas, il s’agissait essentiellement d’un exercice de concentration des pouvoirs entre les mains du ministre, dans le cas de l’éducation, et du nouveau « top gun » dans celui de l’agence Santé Québec.

Sauf que la centralisation des pouvoirs n’est pas nécessairement un gage d’efficacité et de meilleure gestion. Même que l’histoire tendrait plutôt à nous démontrer le contraire.

Mais, il faut donner la chance au coureur et se dire que, tout de même, voici un effort pour trouver des solutions à long terme à des problèmes récurrents.

Parce que si le premier ministre Legault finit par trouver sa boussole, elle devrait lui indiquer qu’il lui faut travailler sur le long terme et éviter les solutions cosmétiques, et les exercices de relations publiques, comme il l’a fait trop souvent, en particulier dans le dossier linguistique.

M. Legault a encore près de trois ans avant les prochaines élections et une super-majorité à l’Assemblée nationale. Ce serait dommage de continuer de gaspiller un tel mandat.

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