Pour saisir toute la portée du 32e roman publié par la vedette belge des lettres, des éléments de contexte seront peut-être nécessaires au lecteur n’étant pas au parfum du drame vécu par l’écrivaine, alors qu’elle avait 12 ans.

Elle l’avait esquissé dans un précédent récit. Lapidairement explicité en entrevue, des années plus tard. Dans Psychopompe, c’est de façon plus frontale, mais encore avec une retenue mi-métaphorique, qu’elle dépeint ce viol collectif subi alors qu’elle nageait dans l’océan Indien. « Ce fut alors que les mains de la mer s’emparèrent de moi. Des mains innombrables qui n’appartenaient à aucun corps visible m’attrapèrent, me dévêtirent et me possédèrent. »

Le fil rouge du roman, cousu à partir de la fascination de l’auteure pour les oiseaux, prend alors une autre dimension. Battant de l’aile pour surpasser l’évènement, à une époque où le tabou règne en maître, elle s’accrochera à cette bouée de secours aviaire et jamais ne lâchera son aspiration à prendre son envol. Car Psychopompe (terme désignant l’entité escortant les défunts d’un monde à l’autre, s’incarnant dans certaines mythologies sous la forme d’une colombe, d’un moineau ou d’un corbeau) décortique avant tout le rapport de Nothomb à l’écriture, outil idéal pour prendre de la hauteur (« Écrire, c’est voler », souligne-t-elle), se plaçant dans la parfaite lignée de ses récits autobiographiques antérieurs. Pour quiconque souhaite mieux comprendre l’éclosion personnelle et artistique de cette écrivaine tourmentée.

Psychopompe

Psychopompe

Albin Michel

162 pages

8/10