Les mines du Québec consomment un milliard de litres de diesel par année, selon Daniel Rousse, professeur en génie mécanique à l’École de technologie supérieure (ETS). Avec son plus récent projet de recherche, qui vise la décarbonation de leurs équipements, il espère réduire ce chiffre et faire sa part d’efforts pour les générations futures.

Au début du mois de mars, Québec a annoncé fournir 6 millions de dollars pour des initiatives dans le domaine minier. Dans ce contexte, Daniel Rousse a décroché une aide de 381 000 $ pour son projet Décarbonation des équipements des entreprises minières du Québec.

Si on atteint notre objectif d’une décarbonation totale des équipements de la mine Raglan, par exemple, la réduction des émissions de CO2 sera équivalente au fait de retirer 35 000 autos de la route. C’est significatif.

Daniel Rousse, professeur titulaire au département de génie mécanique de l’ETS

L’exploitation d’une mine requiert l’utilisation d’un ensemble d’équipements allant des tracteurs aux foreuses. Ceux-ci consomment cependant une quantité « phénoménale » de carburant, note celui qui est également directeur du Groupe de recherche en technologies de l’énergie et en efficacité énergétique (t3e).

« Raglan à elle seule en brûle 60 millions de litres par année », illustre-t-il. Cela dit, les grandes minières consomment tellement de carburant qu’elles ont un levier important pour négocier directement leur approvisionnement auprès des pétrolières. Elles obtiennent donc un excellent prix. Mais avec le pétrole qui a augmenté rapidement depuis la pandémie, les coûts en carburant ont eux aussi explosé, représentant une facture en hausse de dizaines de millions de dollars dans certains cas.

« Et ces frais-là, ça vient gruger directement dans la marge de bénéfice », dit Daniel Rousse. Il y a donc un intérêt pour des solutions de rechange.

« Sans compter que les minières sont dépendantes du pétrole, et savent certainement qu’on a passé le pic pétrolier en 2018, dit-il. Et chaque année, on consomme plus de pétrole que l’on en découvre. Alors les réserves baissent. C’est d’ailleurs pourquoi BP a arrêté de publier les statistiques sur ses réserves. »

Chez les sociétés minières, l’heure est donc aux solutions.

Le défi de l’électrification

Dans le cadre de son projet, Daniel Rousse devra déterminer comment les minières pourront se décarboner. Faudra-t-il tout électrifier ? Ou est-ce que l’hydrogène serait une autre solution pour certains équipements ? Quelles machines pourront être converties, et lesquelles sont peut-être trop spécialisées pour que cela soit réaliste pour l’instant ? Ce sont autant de questions auxquelles tenteront de répondre le chercheur et son équipe.

Idéalement, on vise une électrification à 100 %. Mais cela soulève une question importante, à savoir, comment gérer les recharges ? Car si tous les équipements sont branchés en même temps à la fin de la journée de travail, le réseau sera surchargé.

Daniel Rousse, professeur titulaire au département de génie mécanique de l’ETS

Vu l’ampleur de la tâche, ce projet de recherche tout juste lancé se poursuivra jusqu’en mars 2028.

« On vise 100 % de pénétration électrique pour véritablement assainir le fond de la mine et réduire notre dépendance aux combustibles fossiles », dit celui qui, à 60 ans, approche de sa fin de carrière. Un brin philosophique, confiant craindre que sa profession puisse avoir parfois contribué à accentuer les défis environnementaux actuels, il espère que son projet aura un effet positif sur l’avenir.

« C’est un grand défi, ça va être compliqué, avoue-t-il. Mais Rome ne s’est pas construite en un jour. »