La restauration de sites miniers est longue et coûteuse. Si les terrains affectés ne retrouvent jamais leur état initial, certains succès méritent d’être soulignés. C’est le cas de l’ancienne mine Solbec, à Stratford, en Estrie, où s’élève aujourd’hui une centaine de chalets.

En regardant les photos du lac de la Héronnière et de ses alentours, il est difficile de croire que s’y trouvaient, il y a une soixantaine d’années, les aménagements du groupe minier Sullivan. En activité de 1962 à 1970, cette société minière faisait l’extraction de zinc, de cuivre et de fer. Bien que l’exploitation cesse en 1970, le concentrateur continue de recevoir du minerai des mines voisines jusqu’en 1977. On estime alors que le parc de 66 hectares contient 4,2 millions de tonnes de résidus générateurs d’acide.

En 1986, une étude de caractérisation de l’ancien site minier démontre que le site est une source de contamination pour l’environnement et présente un risque pour la santé humaine en raison des écoulements acides qui s’en dégagent. Parmi les différents scénarios de restauration possibles, l’inondation se présente comme la meilleure solution pour l’environnement.

Différents essais se déroulent entre 1989 et 1993, après l’acquisition du groupe Sullivan par la société minière Cambior, qui est ensuite acquise en 2006 par IAMGOLD. Les travaux de restauration commencent officiellement en août 1994. Vingt-sept hectares de terrain sont déboisés et deux digues sont construites afin de pouvoir inonder le parc d’un minimum d’un mètre d’eau. Un déversoir en béton est construit afin de faciliter l’évacuation des crues. Un agent neutralisant est utilisé pour corriger les problèmes d’acidité de l’eau. Des travaux d’environ 5 millions de dollars.

La restauration du site est achevée en 1995. Deux ans plus tard, des terrains autour de ce nouveau lac de deux kilomètres de long sur un kilomètre de large sont mis en vente par des promoteurs immobiliers, dont Bruno Couture, du Domaine des Hauts-Cantons. « Avant même de me porter acquéreur des terrains, j’avais constaté que la vie aquatique – ménés, grenouilles, canards, rats musqués, etc. – y avait élu domicile. Aujourd’hui, plusieurs espèces de poissons s’y retrouvent, telles que le doré, la perchaude et la barbotte », affirme ce dernier.

Je pense qu’on a gagné de la nature, mais aussi l’utilisation du site par la communauté.

Lincar Pedroni, directeur principal eaux, résidus et sécurité des barrages pour IAMGOLD Corporation

PHOTO BRUNO COUTURE, FOURNIE PAR LE DOMAINE DES HAUTS-CANTONS

Le site de l’ancienne mine Solbec à Stratford, en Estrie.

Un succès… unique ?

Le site Solbec est une réussite, mais M. Pedroni affirme qu’il y a peu de chance qu’une restauration par inondation se reproduise en raison du risque de rupture de digue, mais aussi, et surtout, pour des raisons de coûts et d’engagement de la part des sociétés minières, qui demeurent éternellement responsables de la surveillance et de l’entretien de la digue. « Pour la compagnie, c’est une dépense. Pour combien de temps ? Pour toujours. Et qui veut s’engager dans une dépense pour toujours ? Les compagnies veulent ce qu’on appelle en anglais une walk away solution. Donc une solution qu’on applique et après un suivi pendant un certain nombre d’années, mais qui est raisonnable – sur 10 ans, 15 ans –, c’est fini, on peut s’en aller. Et les barrages, ça n’offre pas ça. »

Selon le recensement de mars 2022, le Québec compte 400 sites miniers abandonnés. Lincar Petroni, qui est aussi membre du conseil de direction de l’Institut de recherche en mines et environnement (IRME), indique qu’il reste encore beaucoup de travail à faire en ce qui concerne l’amélioration des techniques pour la restauration de sites miniers.