À Port-Cartier, les résidus forestiers sont au service de l’industrie minière. Et le circuit court d’approvisionnement mis en place par Bioénergie AE Côte-Nord semble vouloir livrer ses promesses. Le cap des 25 millions de litres d’huile pyrolytique produite à partir de la biomasse forestière a récemment été atteint.

Cette huile permet à la minière canadienne ArcelorMittal, principal client de Bioénergie AE Côte-Nord, de remplacer le mazout lourd, utilisé pour les opérations de son usine de bouletage.

« Notre client, qui est situé à deux ou trois kilomètres de notre usine de biocarburant, peut de cette façon réduire ses gaz à effet de serre (GES), si on parle litre pour litre, d’environ 95 % », souligne le président de la PME, Serge Mercier.

Cet effort d’ArcelorMittal pour décarboner ses opérations lui a d’ailleurs valu quelques prix au cours de la dernière année.

Bioénergie AE Côte-Nord est le fruit d’un partenariat entre Produits forestiers Arbec et Groupe Rémabec. L’entreprise est née d’une volonté de « renouveler le plan d’affaires » de l’industrie forestière, explique M. Mercier, qui agit également à titre de vice-président, finances et développement des affaires, chez Produits forestiers Arbec.

PHOTO FOURNIE PAR BIOÉNERGIE AE CÔTE-NORD

L’huile pyrolytique produite à partir de la biomasse forestière permet à la minière ArcelorMittal de remplacer le mazout lourd, utilisé pour ses opérations à son usine de bouletage de Port-Cartier.

« Historiquement, les sous-produits [copeaux, sciures et autres] étaient consommés par les usines de papier journal. Et cette industrie est en déclin depuis la fin des années 1990 », dit Serge Mercier.

« Le statu quo n’était pas possible, ajoute-t-il. On a imaginé un autre avenir pour l’industrie forestière, c’est-à-dire un produit vert qui peut aider nos clients dans leurs efforts de décarbonation. »

Sur une lancée

Mais l’aventure n’a pas été de tout repos. En activité depuis 2018, Bioénergie AE Côte-Nord a connu des problèmes financiers et techniques qui ont forcé la mise en arrêt des activités. Avec la pandémie, la pause s’est étirée sur plus de deux ans et demi. Les problèmes ont été corrigés et l’usine a redémarré en juillet 2022.

Et depuis ce temps, la production n’a cessé d’augmenter, souligne le vice-président aux opérations, Tony Chabot.

Si 25 millions de litres d’huile pyrolytique ont été produits depuis 2018, une quantité équivalente est prévue pour la seule année 2024. L’usine devrait atteindre sa pleine capacité l’an prochain, avec 40 millions de litres annuels.

À plein rendement, on va éliminer 65 000 tonnes d’équivalent CO2. C’est significatif. Il n’y a pas beaucoup de projets au Québec et au Canada qui ont un tel impact sur la réduction des GES.

Serge Mercier, président de Bioénergie
AE Côte-Nord 

« On a le vent dans les voiles, confirme Tony Chabot. Le produit a une bonne stabilité. La démonstration industrielle est faite. »

Bioénergie AE Côte-Nord, qui emploie 35 personnes, propose un modèle unique, qui pourrait être répliqué ailleurs au Canada.

« Notre objectif, c’est de démontrer que l’industrie forestière canadienne et québécoise doit changer son modèle d’affaires quant à l’utilisation de ses sous-produits, affirme le dirigeant de l’entreprise. Elle doit s’associer avec des industries en croissance pour éliminer les énergies fossiles. »

Selon M. Mercier, il reste d’ailleurs encore du travail à faire pour découvrir tout le potentiel qu’offre le biocarburant produit.

Groupe Rémabec est impliqué dans un autre projet similaire. Une usine de biocharbon, qui fonctionnera sous le nom de Carbonity, est en construction à Port-Cartier. Également élaboré à partir de sous-produits forestiers, le biocharbon est reconnu pour sa capacité à séquestrer le carbone.