Pas toujours facile, mais comment les petites entreprises peuvent-elles se conformer le plus possible aux normes et bonnes pratiques environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) ? Isabelle Martin, professeure à l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal, donne quatre conseils.

Normes d’ici et d’ailleurs

Il faut d’abord bien connaître les normes qui s’appliquent (ou s’appliqueront) à la PME, mais également à ses fournisseurs et donneurs d’ouvrage. Au Canada, la Loi sur la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaînes d’approvisionnement entrera en vigueur le 1er janvier. « On va en parler beaucoup, alors ça ne peut pas passer sous le radar. » Par exemple, le tissu de Chine vient-il d’une région où des Ouïghours sont soumis à du travail forcé ? Les entreprises doivent aussi connaître les normes à l’étranger auxquelles sont assujettis leurs clients. En Europe, la Corporate Sustainability Reporting Directive, qui entrera en vigueur en 2024, obligera des dizaines de milliers d’entreprises à faire des divulgations extra-financières sur leurs implications environnementales et sociétales, indique la professeure.

Changements climatiques

Une entreprise doit connaître, d’une part, les risques qu’elle court relativement aux changements climatiques et, de l’autre, les occasions qui en découlent. Autrement dit, elle doit savoir comment elle subit les changements climatiques ou en profite. Intensification des intempéries, inondations, incendies de forêt, chaleur intense, énumère Isabelle Martin. « Des risques, on en a vu plusieurs cet été. Quelles en sont les conséquences sur vos travailleurs et installations ? » Le bouleversement des saisons nuit par exemple aux agriculteurs ; les restaurateurs, en revanche, peuvent garder leur terrasse ouverte jusqu’en octobre. Comme les risques augmentent, il ne faut pas négliger de penser aux assurances. Êtes-vous situé en zone inondable ? En forêt ? « Ce n’est pas simple à quantifier, mais il faut avoir un œil là-dessus. »

Émissions directes et indirectes

Les entreprises doivent comprendre comment leurs activités contribuent à la pollution et, inversement, comment ces dernières participent à diminuer leur empreinte carbone. Les PME doivent tenir compte des émissions directes liées à la fabrication de leur produit, mais également aux émissions indirectes que génère leur production. « D’où vient l’électricité que requiert notre production ? Avec l’hydroélectricité au Québec, vous comprenez pourquoi nombre d’entreprises y ont leur production. » L’approvisionnement, y compris le transport, fait partie de ces émissions, tout comme le cycle de vie des produits – les entreprises doivent se demander quelles utilisations en feront les gens. Un exemple caricatural serait la voiture, illustre la professeure : au-delà de la quantité de pétrole requise pour la construire, il faut considérer combien elle en utilisera ultérieurement.

Pas de panique

« Mon dernier conseil, c’est de ne pas paniquer », dit Isabelle Martin en riant. « Et d’aller chercher des partenaires qui peuvent vous aider à voir où vous en êtes », comme des organismes communautaires ou des programmes gouvernementaux destinés aux PME. Ces dernières peuvent certainement y trouver conseil. La professeure invite les entreprises à réaliser des projets en partenariat avec des organismes. À l’aune de ses recherches sur les innovations en entreprise, elle a constaté que les innovations les plus pérennes sont celles réalisées conjointement avec le milieu. Et nul besoin d’être une grande entreprise pour trouver des partenaires dotés de l’expertise dont on a besoin. « Des spécialistes peuvent même se montrer très motivés à vous aider », conclut Isabelle Martin.