Alors que les entreprises cherchent toutes sortes de façons de combler leurs différents besoins de professionnels qualifiés, certaines se tournent vers les universités. Elles travaillent d’ailleurs sur plusieurs fronts pour tenter de répondre aux besoins, que ce soit en supervisant des stages ou en adaptant le contenu des cours.

La gravité de la pénurie d’enseignants a éclaté au visage du Québec l’été dernier. Le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, a même lancé l’idée que le baccalauréat de quatre ans soit réduit à trois et que la dernière année en soit une de stage rémunéré en classe pour fournir de la main-d’œuvre. Or, à l’Université Laval, depuis 2014, des étudiants à la dernière session du baccalauréat en enseignement réalisent un stage en emploi, donc ils sont embauchés par un centre de services scolaire et se voient attribuer une classe.

« Ça a commencé dans les régions où la pénurie était plus grande, par exemple à la Baie-James, en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine : on nous appelait souvent parce qu’un de nos étudiants était du milieu et on lui offrait pour sa dernière année un stage en emploi à temps plein rémunéré afin de venir combler un besoin, et nous, on regardait si la personne avait tout ce qu’il fallait pour réussir et si oui, on donnait notre autorisation et on supervisait le stage », explique Christine Hamel, vice-doyenne aux études à la faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval.

Depuis, des centres de services scolaires de plus en plus de régions ont commencé à faire des demandes à l’Université Laval, y compris ceux de Montréal. Pour l’année 2023-2024, 70 étudiants en voie de qualification à l’Université Laval ont déjà accepté un stage en emploi au Québec, ce qui représente 22 % des personnes en stage final.

Souvent, l’école veut garder l’étudiant stagiaire en emploi toute l’année scolaire, donc nous avons commencé à offrir les cours de la dernière session du baccalauréat en enseignement de soir et en ligne pour qu’il puisse faire les deux.

Christine Hamel, vice-doyenne aux études à la faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval

De plus en plus de stages offerts par les entreprises

L’Université de Sherbrooke mise pour sa part énormément sur les programmes coopératifs, donc d’alternance études et stages en milieu de travail. Elle en offre en fait 48 dans plusieurs domaines, le petit dernier étant le baccalauréat en sciences quantiques, lancé l’an dernier.

« Les étudiants mettent en application dans leur stage ce qu’ils ont appris sur les bancs d’école, puis ils doivent réfléchir dans leur rapport de stage aux compétences qu’ils ont développées en milieu de travail et ensuite, ils mettent en application ces compétences, notamment de savoir-être, dans leurs études », explique Christine Hudon, vice-rectrice aux études à l’Université de Sherbrooke.

D’autres programmes, sans être coopératifs, offrent des stages rémunérés en milieu de travail. Elle remarque que depuis quelques années, les employeurs offrent énormément de stages aux étudiants.

Les entreprises ont besoin de main-d’œuvre et les stages sont un moyen de répondre à leurs besoins à court terme, mais aussi à long terme parce qu’après leurs études, plusieurs étudiants vont travailler dans l’une des entreprises où ils ont fait un stage.

Christine Hudon, vice-rectrice aux études à l’Université de Sherbrooke

L’établissement universitaire utilise aussi les commentaires des étudiants et ceux des milieux de travail pour revoir ses programmes. « Nous améliorons les contenus afin qu’ils répondent mieux aux réalités du marché du travail », ajoute-t-elle.

Accélérer l’accès à la profession

À l’Université de Montréal, beaucoup d’efforts sont aussi faits pour mieux répondre aux besoins des milieux. Par exemple, alors que la pénurie d’infirmières frappe toujours, on vient de mettre en place un microprogramme en ligne qui permet à des personnes qui ont déjà réalisé des études universitaires de faire reconnaître 30 crédits.

« Elles pourront ensuite intégrer le baccalauréat en sciences infirmières et le terminer en deux ans au lieu de trois », explique Pascale Lefrançois, vice-rectrice aux affaires étudiantes et aux études à l’Université de Montréal.

De plus, face à la pénurie de vétérinaires, particulièrement forte en région, l’Université de Montréal offrira dès l’an prochain son doctorat de premier cycle en médecine vétérinaire à l’Université du Québec à Rimouski. Elle formera ainsi 25 vétérinaires de plus par année.

L’Université de Montréal vient aussi de lancer un programme pour les vétérinaires formés à l’étranger afin d’éviter qu’ils doivent refaire toute leur formation.

« Nous évaluons leur niveau de compétences et s’ils ont le niveau requis, ils feront seulement une année et demie de formation pour devenir vétérinaires au Québec, indique Pascale Lefrançois. Nous avons de plus en plus de programmes du genre, et c’est important pour accélérer l’intégration des professionnels formés à l’étranger. »