Le Québec a un imposant réseau de barrages hydroélectriques et avec son bassin hydrographique, il semble le territoire idéal pour devenir l’eldorado mondial de l’énergie hydrolienne. Mais y a-t-il un potentiel réel pour ce type d’énergie au Québec ? Entretien avec Francis Labbé, porte-parole dossiers production et innovation à Hydro-Québec.

L’hydrolienne a-t-elle un potentiel réel au Québec ?

L’énergie hydrolienne peut être subdivisée en deux catégories : l’énergie marémotrice (marées) et l’énergie du courant des rivières. En rivière, il est plus difficile de réunir les bonnes conditions de faisabilité technique. La majorité des efforts de recherche et développement dans le monde sont donc actuellement dirigés vers l’énergie marémotrice, qui comporte des turbines généralement plus grosses qui peuvent produire des puissances électriques de plus de 1 mégawatt (MW). Le potentiel hydrolien québécois provenant de l’énergie marémotrice est principalement situé dans la baie d’Ungava et offre un potentiel théorique estimé à 4288 MW.

Pourquoi parle-t-on peu d’hydroliennes au Québec alors que nous avons un réseau hydrographique très développé ?

Contrairement aux centrales hydroélectriques, qui utilisent l’énergie potentielle de l’eau afin de générer de l’électricité, la technologie de l’énergie hydrolienne est plus récente et consiste à transformer l’énergie cinétique de l’eau en électricité à partir d’une turbine située sous l’eau. Plusieurs prototypes de cette technologie ont vu le jour au Canada et en Europe au cours des 10 dernières années. Les résultats étaient mitigés à cause de difficultés techniques (corrosion, ensablement) ou économiques (faillite des entreprises), malgré le soutien financier des gouvernements dans plusieurs cas. Aujourd’hui, la technologie hydrolienne est encore considérée comme étant au stade de la recherche et développement.

Quels sont les avantages de l’hydrolienne ?

Les hydroliennes ont un impact visuel limité et ne produisent pas de bruit audible à la surface, ce qui pourrait faciliter l’acceptabilité sociale des projets. Ensuite, les courants des marées sont grandement prévisibles. Il serait donc possible d’établir avec exactitude la production d’électricité que ces turbines pourraient générer. Finalement, la variabilité des courants des rivières et des marées est plus graduelle que celle de l’énergie éolienne et de l’énergie solaire, qui peuvent subir des changements rapides de production à cause de rafales ou du passage de nuages.

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L’accessibilité des hydroliennes pour les opérations de maintenance est un enjeu important.

Y a-t-il des inconvénients majeurs à l’exploitation de l’énergie hydrolienne ?

L’accessibilité des hydroliennes pour les opérations de maintenance est un enjeu important à cause de la complexité et des dangers de travailler dans un environnement de courants sous-marins. De plus, il existe actuellement peu d’information sur l’impact environnemental des hydroliennes. Par ailleurs, le coût de l’énergie hydrolienne est plus élevé que celui d’autres sources d’énergie renouvelable.

Le Québec établit 16 sites potentiels pour le développement de l’énergie l’hydrolienne. Est-ce que ces projets verront le jour éventuellement ?

Hydro-Québec réalise en continu une vigie des technologies de production d’énergie, dont les hydroliennes. Les projets pourraient éventuellement voir le jour s’ils satisfont aux critères de développement durable : acceptabilité environnementale, acceptabilité sociale et rentabilité économique.

Serait-il envisageable d’implanter des turbines près des centres urbains comme Montréal ou Québec ?

Une hydrolienne de RER Hydro a déjà été installée dans le fleuve Saint-Laurent à la hauteur du Vieux-Port de Montréal. Selon les informations dont nous disposons, les essais n’auraient pas été concluants.