Combien de testicules les personnes possèdent-elles en moyenne ?

Un.

Cette bonne vieille blague de mathématicien nous rappelle l’impertinence de certaines statistiques. C’est particulièrement le cas dans le sport, où nous sommes inondés de chiffres, de formules et de pourcentages tout aussi subjectifs qu’imprécis. Voici quelques statistiques qui ne méritent pas autant d’attention qu’on leur en accorde.

Les victoires

Lanceur A : 181 manches / moyenne de 2,93 / 184 retraits sur des prises / 1,08 coureur par manche*

Lanceur B : 180 manches / moyenne de 3,19 / 174 retraits sur des prises / 1,16 coureur par manche

Lequel a connu la meilleure saison 2022 ? Le lanceur A, bien sûr. Il s’agit de Joe Musgrove, des Padres de San Diego. Il a terminé l’année avec 10 victoires. Qui est l’autre lanceur ? Kyle Wright, des Braves d’Atlanta, le meneur des ligues majeures avec… 21 victoires.

PHOTO JOHN BAZEMORE, ASSOCIATED PRESS

Kyle Wright, des Braves d’Atlanta

La victoire n’est pas représentative de l’efficacité d’un lanceur. Elle est plutôt révélatrice de la qualité de son équipe lorsqu’il est au monticule. C’est aussi une donnée qui, avec le temps, est de plus en plus subjective.

Pensez au légendaire Cy Young. En 1902, il a amorcé 43 parties. Il en a achevé 41. Lorsque son club gagnait, il n’y avait aucune ambiguïté. Le lanceur gagnant, c’était lui. Aujourd’hui ? Les partants lancent en moyenne 4 2/3 manches par match. C’est peu. Insuffisant, même, pour obtenir une victoire – le seuil minimal est fixé à 5 manches. Si un club garde son avance toute la partie et que son partant s’en va avant la cinquième manche, c’est le releveur jugé « le plus efficace » qui hérite de la victoire. C’est arbitraire et, franchement, un peu n’importe quoi.

Les sauvetages

Mon idole de jeunesse était l’as releveur des Yankees de New York, Dave Righetti. Pourquoi ? Parce qu’en 1987, il s’est retrouvé sur les boîtes de cartes O-Pee-Chee, après avoir battu le record de tous les temps pour les sauvetages.

PHOTO TIRÉE DU SITE COLLECTOR ARCHIVE

Dave Righetti, sur une boîte de cartes O-Pee-Chee, en 1987

Dans mes yeux d’enfant, c’était un exploit immense. Dans les faits, oui, Righetti a connu une bonne saison. Sauf que son record de 46 sauvetages, lui, n’était pas si exceptionnel. Une trentaine de lanceurs ont d’ailleurs surpassé cette marque par la suite.

Le sauvetage est une étrange bibitte. Tellement difficile à définir qu’entre 1969 et 1975, il y a eu trois formules différentes. Aujourd’hui, il revient au dernier lanceur du club victorieux, sous certaines conditions, comme entrer en jeu avec le point égalisateur sur les buts, au bâton ou parmi les deux prochains frappeurs. Ou lancer « avec efficacité » pendant trois manches. C’est un critère très subjectif. Wes Littleton, des Rangers du Texas, a ainsi hérité d’un sauvetage pour avoir lancé trois manches, dans une victoire de 30-3…

Et comme pour la victoire, le sauvetage n’est pas le meilleur indice de l’efficacité d’un lanceur. Un exemple, tiré de la saison dernière :

Lanceur A : 48 manches / moyenne de 2,98 / 0,89 coureur par manche

Lanceur B : 50 manches / moyenne de 5,22 / 1,28 coureur par manche

Le lanceur A, Ryan Pressly, a réussi 33 sauvetages. Le lanceur B, Josh Hader, en a inscrit 36.

Le pourcentage de réussite en supériorité numérique

Au hockey, ça fait un siècle qu’on évalue l’efficacité en supériorité numérique de la même façon. On écrit : ce soir, le Canadien est 0 en 4. Ou 1 en 5, pour 20 % de réussite. C’est factuellement vrai. Mais est-ce la mesure la plus précise ? Non.

C’est que les surnombres n’ont pas tous la même durée. Certains durent deux minutes. D’autres, cinq minutes. Et il y en a qui prennent fin après seulement 10 secondes. Pour connaître la véritable efficacité des unités spéciales, il faut tenir compte du différentiel de buts en supériorité numérique (les buts pour moins les buts contre), ainsi que du temps total passé en surnombre. On mâchouille toutes ces données et on les rend digestibles pour le partisan lambda. Voici le classement, selon les deux méthodes. Oui, on retrouve les mêmes meneurs. Mais pas dans le même ordre. Et le Canadien paraît (un peu) mieux.

Pourcentage de réussite

1- Oilers d’Edmonton : 32,4 %

2- Maple Leafs de Toronto : 26,0 %

3- Lightning de Tampa Bay : 25,4 %

4- Kings de Los Angeles : 25,3 %

5- Stars de Dallas : 25,0 %

29- Canadien de Montréal : 16,1 %

Méthode : buts/surnombres

Différentiel par tranches de 60 minutes

1- Oilers d’Edmonton : 12,19

2- Stars de Dallas : 8,55

3- Kings de Los Angeles : 8,29

3- Maple Leafs de Toronto : 8,29

5- Lightning de Tampa Bay : 8,13

25- Canadien de Montréal : 5,15

Méthode : buts comptés par 60 minutes en surnombre – buts alloués par 60 minutes en surnombre

La deuxième mention d’aide

Au soccer, au volleyball, au basketball, au water-polo et au handball, il y a un maximum d’une seule mention d’aide par but/point. Or, au hockey, il peut y avoir jusqu’à deux mentions d’aide sur un même but.

La deuxième aide est-elle vraiment révélatrice des qualités offensives d’un joueur ? On pourrait en débattre jusqu’à demain – et rester en désaccord. Par contre, tout le monde conviendra que la dernière passe, celle qui mène directement au but, est plus décisive. Si le hockey adoptait la règle en vigueur dans les autres sports, quels joueurs de la Ligue nationale perdraient proportionnellement le plus de points ?

Production attribuable aux deuxièmes mentions d’aide

1- Drew Doughty, Kings de Los Angeles : 55,7 %

2- Devon Toews, Avalanche du Colorado : 54,0 %

3- Evan Bouchard, Oilers d’Edmonton : 52,5 %

4- Charlie McAvoy, Bruins de Boston : 48,0 %

5- Moritz Seider, Red Wings de Detroit : 47,6 %

Note : 40 points minimum

Le temps de possession

C’est une statistique que les télédiffuseurs américains relaient souvent pendant une partie de la NFL. Mais à quoi rime-t-elle, au juste ? L’équipe qui conserve le ballon le plus longtemps est-elle vraiment meilleure que son adversaire ?

Pas nécessairement. Elle peut dépendre davantage de son attaque au sol, ou prendre plus de temps pour atteindre la zone des buts. La saison dernière, l’équipe ayant passé le plus de temps avec le ballon – les Commanders de Washington – a raté les séries.

Oubliez le temps de possession. Préférez plutôt le nombre de points inscrits par possession. C’est beaucoup plus significatif. Les meneurs la saison dernière ? Les Chiefs de Kansas City, champions du Super Bowl.

* Coureur par manche : il s’agit d’une traduction de l’indice WHIP (walks + hits per inning). Concrètement, c’est le nombre de buts sur balles et de coups sûrs alloués par un lanceur par manche lancée.

Appel à tous

Quelles statistiques vous font friser les oreilles ?

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