Un moment «historique» que cette victoire à l'arraché de l'administration Obama sur la santé. L'euphorie passée, le géant américain devra maintenant se pencher sur sa compétitivité, surtout dans un fragile contexte de sortie de crise. Cette question se pose actuellement de manière aiguë, au moment où la Maison-Blanche, la Réserve fédérale et le Trésor mettent en oeuvre des mesures sans précédent pour relancer l'économie. Elle intéresse aussi le Québec et le Canada en raison de la forte interdépendance économique entretenue avec le voisin américain.

Un moment «historique» que cette victoire à l'arraché de l'administration Obama sur la santé. L'euphorie passée, le géant américain devra maintenant se pencher sur sa compétitivité, surtout dans un fragile contexte de sortie de crise. Cette question se pose actuellement de manière aiguë, au moment où la Maison-Blanche, la Réserve fédérale et le Trésor mettent en oeuvre des mesures sans précédent pour relancer l'économie. Elle intéresse aussi le Québec et le Canada en raison de la forte interdépendance économique entretenue avec le voisin américain.

En effet, malgré des mesures concrètes - comme le TARP (Troubled Asset Relief Program) de 700 milliards de dollars, le plan de stimulation (American Recovery and Reinvestment Act) de 787 milliards de dollars, une politique monétaire expansionniste et une proposition budgétaire du président pour 2011 qui se veut elle aussi à saveur de relance, même si elle voit la dette américaine augmenter d'environ 900 milliards de dollars - l'économie américaine croîtra moins rapidement que l'économie mondiale dans un futur prochain.

Des signes encourageants semblent toutefois poindre à l'horizon. D'abord, un consensus de plus en plus large de spécialistes estime qu'il est de moins en moins probable que cette dernière récession ait la forme d'un W. Ensuite, les États-Unis sont encore l'économie la plus compétitive du monde. En dépit de soubresauts protectionnistes, l'économie américaine demeure relativement ouverte sur le monde avec un ratio du commerce extérieur par rapport au produit intérieur brut de 28% selon l'Organisation mondiale du commerce.

Dans son édition 2009, le World Competitiveness Yearbook de l'IMD de Lausanne place les États-Unis au sommet du palmarès de la compétitivité mondiale, et ce, à partir de facteurs économiques, institutionnels et sociopolitiques dont des données sources datent principalement de 2008, un moment fort de la crise. Les Américains brillent notamment par leur productivité ainsi que par la qualité de leur infrastructure scientifique et technologique. Ceci, malgré de piètres résultats en matière de politiques fiscales et de pratiques managériales pour ne nommer que ces facteurs.

Ces faiblesses ne sont probablement que le reflet conjoncturel d'un déclin longtemps annoncé de l'Empire américain. Car les événements des derniers temps ne trompent pas. Ainsi, le premier pays à fouler le sol lunaire dépendra bientôt de son grand rival russe pour aller dans l'espace, faute de solution de rechange à court terme au programme des navettes qui prendra fin incessamment.Dans la même veine, la relation symbiotique Chine-États-Unis est en grave difficulté. La Chine critique ouvertement et avec une intensité croissante le rôle prépondérant des Américains dans l'économie mondiale. La déliquescence perçue de ces derniers et les ambitions chinoises sur la scène internationale sont maintenant aux antipodes. Malgré les récentes ventes d'armes à Taiwan et la rencontre entre le président et le dalaï-lama, l'indépendance que les États-Unis entretiennent face à la Chine est symbolique. Cette dernière produit une part importante des biens de consommation américains en plus de posséder le quart des bons du Trésor à l'étranger. Un levier de négociation non négligeable que les Chinois tentent d'utiliser dans le débat sur la sous-évaluation de leur devise.

D'autres symboles de la puissance américaine, les firmes multinationales, voient leur étoile pâlir. Non seulement sont-elles de plus en plus contestées, mais les multinationales américaines perdent du terrain sur leurs rivales des pays émergents. Bien que les États-Unis possèdent encore la plus grande part des 500 plus grandes multinationales répertoriées dans le palmarès Fortune Global 500, leur nombre est passé de 176 à 140 entre 2005 et 2009, une chute sans doute annonciatrice d'une tendance lourde en ce sens. Ceci sans compter la quasi nationalisation d'importants joueurs de la haute finance ou de l'industrie automobile, deux secteurs critiques qui voient leur avantage concurrentiel s'éroder toujours plus, et ce, malgré leur gloire passée.

Tout espoir n'est cependant pas perdu. L'économie américaine peut demeurer compétitive si l'administration agit avec célérité et détermination. En premier lieu, le dossier de la santé désormais «réglé», il importe de recentrer les énergies de la Maison-Blanche et du Congrès sur les grands dossiers économiques et sur le redressement des finances publiques.

En second lieu, l'économie américaine doit continuer de s'ouvrir sur le monde. L'administration ne doit pas perdre de vue que plusieurs de ses grandes entreprises ont désormais des chaines de valeur intégrées mondialement (par exemple Caterpillar, General Electric, etc.).

Enfin, les États-Unis devront faire une transition plus marquée vers des secteurs innovants, intensifs en connaissance et générateur de fortes marges bénéficiaires, tout en continuant de faire la promotion de saines pratiques de gouvernance.

Bref, un optimisme prudent est de rigueur, car comme le disait Yogi Berra: «It ain't over till it's over.»

*L'auteur est professeur adjoint de stratégie à la faculté des sciences de l'administration de l'Université Laval, membre associé de l'Institut québécois des hautes études internationales et du Groupe de recherche en affaires internationales de HEC Montréal.