Pas de doute, il y a un engouement pour la friteuse à air chaud dans les cuisines du Québec. Mais s’agit-il d’une simple mode ? Discussion entre Alexandra Diaz, pasionaria de ce nouvel outil de cuisson expresse, et Chantal Guy, chroniqueuse gentiment de mauvaise foi qui ne jure que par son bon vieux four.

Chantal Guy : Nous avons eu le Crock-Pot, le Thermomix, et maintenant la friteuse à air chaud. Est-ce une autre bébelle qui va venir encombrer notre cuisine ou un outil vraiment efficace ? Est-ce juste une mode ?

Alexandra Diaz : Impossible que ce soit une mode, à partir du moment où ça facilite le quotidien. Ça n’aide pas seulement une journée de cuisine ou une recette, comme l’autocuiseur ou le Thermomix, ça facilite tous les jours, trois fois par jour !

CG : Qu’est-ce que la friteuse à air chaud m’apporterait de plus que mon four ?

AD : Plusieurs choses. La première, c’est la cuisson, qui est impeccable. Le crousti-fondant, Chantal ! C’est ce que la révolution du micro-ondes n’a pas pu apporter. Dans la friteuse à air chaud, tu ne peux à peu près rien rater. Après une petite période d’adaptation, c’est tellement user friendly que, quoi que tu cuisines, ça va être croustillant et demeurer fondant et tendre à l’intérieur, autant les protéines que les légumes. Si ce n’était pas aussi bon, s’il n’y avait pas le goût, je n’en parlerais pas.

CG : J’ai déjà acheté une petite friteuse à air chaud que j’ai finalement donné à mon frère, qui ne s’en sert pas plus. Je l’ai récupéré pour faire deux de tes recettes (très bonnes), en suivant les étapes, mais il me semble que j’aurais pu mettre tout ça au four avec le même résultat.

AD : C’est que je fais standardiser mes recettes par un chef, car je respecte l’expertise de quelqu’un formé à la grande école. Et un chef, ça a toujours des étapes. Mais tu peux tout faire en une étape, à mon avis ! L’autre argument pour la friteuse à air chaud, c’est la rapidité.

CG : Il n’y a pas une si grande différence de temps de cuisson, non ?

AD : Oui, quand même. C’est surtout que tu n’as pas à surveiller. Faire bouillir un œuf ou le cuire à la poêle, c’est rapide, mais tu dois être là, tandis que la friteuse à air chaud, c’est rapide et solo. Le matin, je casse mes œufs là-dedans, j’ajoute une petite salsa, du fromage grillé, je mets mes toasts sur le top, je pars ça cinq minutes, je vais m’habiller, et quand je reviens, mon déjeuner est prêt. Je n’ai même plus de grille-pain ! C’est rapide et sécuritaire.

CG : Justement, on a vu aux nouvelles dernièrement une famille qui a tout perdu dans un incendie causé par une friteuse à air chaud

AD : Mais à ce compte-là, je peux te donner des personnes qui ont passé au feu à cause de bas chauffants !

CG : OK, je comprends, la cuisson parfaite, le goût, tout ça. Mais il me semble que j’ai passé ma vie à développer mes connaissances en cuisine et là, j’abandonnerais mes compétences à une machine qui fait tout à ma place ? Est-ce qu’on ne va pas désapprendre à cuisiner, avec ça ?

AD : Tu peux continuer à cuisiner. Mais on a un outil et on ne peut pas être contre la modernité. C’est comme un assistant. J’étais réfractaire au début, je pensais que ça allait enlever la sensualité de la cuisine, mais il faut quand même que tu coupes tes aliments, que tu fasses une recette. C’est juste que c’est tellement simplifié et ça sublime le goût ! Il y a un aspect ludique et divertissant à cuisiner avec la friteuse à air chaud, qui donne du plaisir à bien s’alimenter.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Notre chroniqueuse Chantal Guy en compagnie d’Alexandra Diaz

CG : J’ai envie de faire tes recettes… mais pas dans une friteuse à air chaud !

AD : Je comprends que les romantiques comme toi soient réfractaires à la nouvelle technologie.

CG : Ce n’est pas du romantisme, j’ai plus l’impression que c’est quatre trente sous pour une piasse !

AD : Mais la rapidité, l’efficacité, le résultat de cuisson meilleur, ça ne te convainc pas ?

CG : C’est meilleur, vraiment ?

AD : Vraiment. Je suis la championne du saumon et je ne vais plus jamais cuire mon saumon ailleurs que dans ma friteuse à air chaud. Les arguments, c’est ça : qualité de cuisson irréprochable, saveur, rapidité, sécurité. Et il faut encourager les gens à faire le geste de cuisiner, c’est ce qui te rapproche le plus de la santé, avec l’activité physique. C’est moins énergivore qu’un four et ça encourage le non-gaspillage parce que n’importe quoi qui est flagada dans ton frigo se « recrispe » là-dedans. Après l’avènement du botox, c’est l’avènement de la friteuse à air chaud !

CG : J’ai mes habitudes de cuisine, je ne suis pas très excitée par une machine qui fait bip bip sans qu’on puisse voir comment ça cuit à l’intérieur.

AD : Tu es encore dans tes pantoufles, mais je te garantis que la friteuse à air chaud, c’est pour le mieux, qu’il y a plus de fun, pour une cuisson assurément réussie. Jamais je n’aurais mangé mes pâtes autrement qu’al dente, mais réchauffées dans ma friteuse à air chaud, elles sont d’égal bon goût. Et si, un mercredi soir, tu as oublié de faire décongeler ton filet mignon, tu n’as qu’à le mettre à la friteuse à air chaud et…

CG : Mais tout le plaisir du filet mignon, c’est de le faire sauter dans la poêle, avec du beurre, sentir l’odeur…

AD : Sauf qu’on n’a pas toujours le temps de faire ça.

CG : Un filet mignon, c’est juste deux minutes de cuisson chaque bord !

AD : Es-tu certaine que sans mettre ton thermomètre dedans, tu auras la bonne cuisson ?

CG : Oui. Depuis le temps !

AD : Écoute, avec cet outil-là, je suis arrivée au carrefour entre le plaisir de bien manger et la simplicité. C’est paresseux, sécuritaire pour les enfants, et le goût est parfait. Vendredi, je recevais 12 personnes à souper pour mon anniversaire, j’ai fait des calmars et des aubergines frites, ça ne sentait pas la friture de cafétéria…

CG : J’ai de la difficulté à croire qu’on peut recevoir 12 personnes avec seulement une friteuse à air chaud.

AD : Si on cuisine par batch, oui. Quand tu cuisines pour 12 personnes, à moins d’être un chef, tu manges un peu tiède. Les calmars pour 12, ça roulait, et j’avais des salades à côté de ça. Toutes les pièces de saumon, je les avais cuites en après-midi et je n’avais qu’à les réchauffer à la friteuse à air chaud juste avant de se mettre à table.

CG : On ne peut quand même pas faire une dinde, à Noël, là-dedans !

AD : Non, mais tu peux mettre un poulet. Et il est juteux, je l’ai fait 1000 fois. Il y a quelque chose dans cette ventilation à air chaud propulsé qui fait que ça n’assèche pas. À part faire bouillir quelque chose, ça fait presque tout.

CG : Je vois deux clans se former : ceux qui tripent sur la friteuse à air chaud et les autres qui n’en voient pas l’intérêt. Je l’avais d’abord acheté pour faire des fritures plus santé.

AD : Je pense que la friteuse à air chaud a été très associée aux ailes de poulet et aux frites, qui sont extraordinairement bonnes là-dedans, mais c’est beaucoup un menu de type La Cage. J’ai acheté à peu près tout ce qui se faisait comme livre sur la friteuse à air chaud et je n’y ai pas retrouvé ce que je mange. Moi, ce sont des trucs issus de la terre, je ne mange pas de produits transformés. Je voulais cuisiner de bons plats santé, pas trop de viande, des légumes et des protéines végétales. Je n’ai pas changé mes habitudes.

CG : D’où, sûrement, le succès de ton livre. Parce que c’est vrai qu’on est loin de la friture de brasserie. Crois-tu que la friteuse à air chaud va remplacer le four, un jour ?

AD : Je pense que si je partais en appartement aujourd’hui, j’aurais une plaque à convection et une friteuse à air chaud, c’est tout. Les deux seules choses dont tu as besoin dans ta cuisine, c’est un couteau de chef et ta friteuse à air chaud. C’est ta trousse de mariage !

CG : (Rires) Mais moi, j’adore mon vieux Creuset pas tuable !

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Alexandra Diaz

AD : L’un n’empêche pas l’autre, mais je pense que dans une vie moderne active, on serait fou de se priver de quelque chose qui révolutionne la cuisine sans enlever le plaisir de cuisiner, de manger santé, de gagner du temps, de réduire la vaisselle. Je pense que je gagne ce match-là !

CG : Bon, je me demande si je ne dois pas introduire la friteuse à air chaud dans ma vie…

AD : C’est sûr. Personne ne peut être déçu. Un gars m’a dit hier à l’épicerie : « À cause de toi, je me suis acheté une friteuse à air chaud ! » Ça résume le type de cuisine que je défends.

L’amour est dans l’air fryer – 75 recettes crousti-fondantes à la Diaz

L’amour est dans l’air fryer – 75 recettes crousti-fondantes à la Diaz

Les Éditions de l’Homme

240 pages