Certains gouvernements étrangers agissent clandestinement et avec malveillance pour affaiblir les institutions démocratiques du Canada et influencer les résultats de nos élections. Tous les Canadiens sont en droit de s’inquiéter de cette menace qui prend de I’ampleur.

Au cours des deux derniers mois, en ma qualité de rapporteur spécial indépendant sur l’ingérence étrangère, j’ai étudié en profondeur des documents ultrasecrets et interrogé des dirigeants politiques et des fonctionnaires afin de faire toute la lumière sur les récentes allégations d’ingérence étrangère de la République populaire de Chine (RPC) dans notre processus démocratique.

Nous en sommes arrivés à la conclusion que les mesures adoptées par les gouvernements successifs ont jusqu’à présent permis de contrer ces menaces et d’en minimiser les effets sur notre démocratie. Cependant, nous avons également constaté de graves lacunes dans la manière dont les renseignements sont relayés au sein du gouvernement fédéral. De nombreux manquements aux principes de communication, de responsabilité et de diligence ont abouti à des résultats inacceptables, comme le fait de ne pas avoir informé un député fédéral que la Chine cherchait à obtenir des informations sur sa famille à Hong Kong.

Depuis que j’ai présenté mon rapport mardi dernier, mes conclusions ont fait l’objet de nombreux débats, en partie parce que les preuves que j’ai examinées sont absolument confidentielles et ne peuvent être rendues publiques.

C’est la raison pour laquelle j’ai invité deux organismes de surveillance constitués en vertu d’une loi et disposant d’une attestation de sécurité – l’un composé de parlementaires et l’autre d’experts en sécurité nationale – ainsi que les dirigeants des principaux partis fédéraux à revoir mes travaux et à présenter publiquement leurs observations à la population canadienne.

Mieux protéger la démocratie canadienne de l’ingérence étrangère

Alors que mon premier rapport portait sur des évènements récents, la deuxième partie de mon travail porte sur l’avenir. Que faire pour mieux protéger la démocratie canadienne de toute ingérence étrangère ? Le gouvernement du Canada se doit d’agir rapidement pour corriger les insuffisances et les lacunes relevées, cela afin de renforcer nos compétences en matière de détection, de dissuasion et de lutte contre l’ingérence étrangère, dont la menace pèse de plus en plus lourdement sur le pays.

Avant la fin de mon mandat en octobre, je conduirai des audiences publiques avec le public, des représentants du gouvernement et des spécialistes. Je m’intéresserai tout particulièrement aux membres des diasporas qui sont fréquemment la cible d’ingérences étrangères.

Ces derniers mois, de nombreuses questions légitimes ont été soulevées et les Canadiens attendent à juste titre que leur gouvernement leur rende des comptes.

Au cours de ces audiences, les Canadiens pourront entendre les représentants du gouvernement et des services de renseignement exposer leurs méthodes de travail pour lutter contre l’ingérence étrangère.

Dans le cadre de ce processus public, je tâcherai de déterminer les mesures à prendre pour combler les lacunes dans le dispositif de sécurité nationale du Canada en matière de gouvernance et d’organisation, et je ne me censurerai pas. J’ai l’intention de proposer des recommandations au gouvernement afin de m’assurer que des gouvernements mal intentionnés, comme la RPC, ne puissent mettre en péril l’intégrité de notre démocratie.

Comme le mentionne mon rapport, plusieurs questions doivent être étudiées. Quelles sont les incidences particulières de l’ingérence étrangère sur les communautés de la diaspora ? Devons-nous mettre en place un processus plus transparent et quel rôle joue la déclassification ? Quelle relation convient-il d’établir entre les services de renseignement et les forces de l’ordre ? Comment les agences de sécurité peuvent-elles mieux coopérer entre elles et avec le gouvernement pour éviter d’avoir à rattraper les retards ? Comment améliorer les protocoles de suivi des renseignements pour identifier précisément qui a vu quoi et à quel moment ? Que faire pour protéger adéquatement les Canadiens contre les tentatives d’ingérence malveillantes ? Comment traiter les menaces qui pèsent sur les élus ?

À l’issue de ce processus, je formulerai des recommandations. Il appartiendra alors aux Canadiens de les juger et de demander aux élus de rendre compte des mesures qu’ils mettront en place.

Le service public au Canada est devenu l’œuvre de ma vie, et jamais je n’ai accepté un mandat aussi ambitieux que celui qui m’est confié. Bien qu’ayant constaté de graves lacunes dans notre réponse à l’ingérence étrangère, je n’ai pas terminé mon travail. Et personne ne pourra me dissuader de l’achever. Telle est la tâche que j’ai entreprise et je me sens dans l’obligation de la mener à bien dans le respect des normes les plus rigoureuses. Je laisserai ensuite aux Canadiens le soin de juger de cette contribution pour la sauvegarde de notre démocratie.

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