Hydro-Québec, qui aura bientôt 80 ans, a accumulé durant cette période 193 clients industriels de grande puissance.

Au cours des derniers mois, la société d’État a reçu une demande de nouveaux raccordements de grande puissance de la part de 230 entreprises, une situation sans précédent. Cette forte accélération de la demande n’est pas unique au Québec, car les investissements liés à la transition énergétique ont dépassé le billion de dollars américains à l’échelle de la planète pour la première fois en 2022, une augmentation de plus de 30 % par rapport à 2021. Le rythme des investissements augmentera encore pendant plusieurs années puisqu’il faudra, selon McKenzie & Co, investir 275 billions US dans la transition énergétique d’ici 2050 pour vaincre le plus grand péril de tous les temps. Nous proposons un réexamen de nos façons de faire à la lumière de ce nouveau paradigme pour maximiser les avantages qu’on peut en retirer.

Nos centrales hydroélectriques et leurs réservoirs constituent notre atout le plus précieux si on souhaite tirer profit de la transition énergétique puisqu’ils nous permettront d’augmenter considérablement la production d’énergie renouvelable intermittente sans mettre en danger la continuité de l’approvisionnement électrique. On pourrait vraisemblablement augmenter de 200 à 400 ou à 500 TWh la production annuelle d’électricité en ayant recours à l’énergie solaire ou éolienne, sur mer ou sur terre, car ce sont maintenant les technologies les moins coûteuses. Hydro-Québec utiliserait l’énergie intermittente quand elle est disponible quitte à se rabattre sur ses centrales lorsque cette forme d’énergie sera insuffisante.

Il est légitime de se demander pourquoi, dans ces circonstances, le gouvernement se prépare à accepter seulement une faible proportion des 230 projets soumis. Bien sûr, l’acceptation de tous ces projets aurait un effet important sur les tarifs d’électricité de la population. Ces nouveaux approvisionnements, au prix d’au moins 9,69 ¢ le kWh (le prix exclut le coût du transport), se répercuteraient rapidement sur l’ensemble de la clientèle en haussant le prix de revient de l’électricité qui était de 3,33 ¢ le kWh en 2021. Cela serait inévitable en vertu de l’algorithme qu’utilise la Régie de l’énergie pour fixer les tarifs.

Comment contourner ce problème si on souhaite accueillir les entreprises qui demandent 5 MW ou plus de puissance ?

Pourquoi ne pas permettre à des producteurs d’énergie renouvelable de satisfaire directement la demande de ces grands clients industriels, comme on le fait déjà dans l’Union européenne, aux États-Unis et en Alberta ?

Le producteur facturerait ses coûts de production, de raccordement et d’utilisation des réseaux de transport et de distribution d’Hydro-Québec ainsi qu’une redevance couvrant la garantie d’un approvisionnement constant par notre société d’État. Puisqu’Hydro-Québec ne sera jamais propriétaire de cette électricité, son coût de production sera exclu de l’algorithme de la Régie de l’énergie.

Il en résultera certes un tarif plus élevé que celui en vigueur à l’heure actuelle pour les 139 grands clients industriels d’Hydro-Québec. Cela n’entamera pas toutefois la capacité du Québec d’attirer des investissements importants puisque la transition énergétique nécessite une très forte augmentation de la demande d’énergie verte partout sur la planète, besoin qui sera satisfait essentiellement par de nouvelles centrales solaires ou éoliennes. Peu d’États toutefois peuvent compter sur un patrimoine hydroélectrique comme celui du Québec pour assurer la continuité de l’approvisionnement électrique. Les autres technologies disponibles capables d’assurer cette continuité, que ce soient les centrales nucléaires, les centrales au gaz augmentées d’un dispositif de captage du carbone, l’hydrogène vert ou les batteries, sont toutes plus coûteuses que l’hydroélectricité québécoise à laquelle on jouxte l’éolien ou le solaire.

La transition énergétique augmente considérablement la valeur de notre patrimoine hydroélectrique. Le Québec dispose de la meilleure offre disponible sur la planète pour satisfaire les exigences de la transition énergétique, et ce au coût le plus bas. Nous pourrions en tirer profit au maximum si nous adoptions la suggestion faite plus haut sans faire porter aux ménages québécois et aux petites entreprises le coût de cette transition. Notre contribution à la transition énergétique mondiale sera alors à la hauteur de la valeur du patrimoine hydroélectrique dont nous bénéficions.

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