Cette journée marque le début de la semaine de sensibilisation aux troubles alimentaires. Il y a six ans, je ne me rendais pas compte que je sombrais dans l’anorexie. Moi qui pensais entamer un rééquilibrage alimentaire, j’ai été emportée dans la spirale infernale de l’anorexie, une maladie encore incomprise.

Au printemps 2016, j’ai sombré dans cette maladie qui m’a meurtrie et mutilée jusqu’à ce que mon corps soit dans un état si critique que la seule solution pour que je continue à vivre a été de me transporter dans un service d’urgence spécialisée.

Une personne souffrant d’anorexie sait et comprend ce qui lui arrive. Si l’image de son corps est brouillée, elle sait à quel point sa vie est en danger. C’est probablement la raison pour laquelle l’anorexie correspond, selon moi, à une forme de mutilation. Pour celles et ceux qui s’en sortent, la pathologie lègue d’ailleurs de profondes cicatrices, autant physiques que psychologiques, qui ne cautérisent jamais.

Une souffrance qui a failli m’enlever la vie

Pour moi, tout a commencé par un désir de perdre du poids et d’arrêter de subir le harcèlement scolaire dont j’ai été la cible pendant près de 10 ans. En me répétant constamment que j’étais grosse et mal formée, j’avais fini par y croire.

Progressivement, j’ai commencé à manger moins, à cumuler 12 heures de sport par semaine et à afficher des rappels pour restreindre mon alimentation : un cocktail toxique qui m’a fait passer de 121 à 83 livres en quelques mois.

De nombreuses péripéties dans les hôpitaux m’ont finalement amenée à rencontrer le médecin qu’un temps j’ai détesté, mais qu’aujourd’hui, je reconnais comme celui qui m’a sauvé la vie. Je n’ai pas toujours apprécié ni accepté les traitements intenses et fatigants. Cependant, s’il n’avait pas été présent à ce moment charnière, je ne serais peut-être pas en train d’écrire ces lignes.

Madame, Monsieur, j’aimerais vous dire que le cadre hospitalier est bénéfique pour positionner les personnes souffrant d’anorexie sur le chemin de la guérison, même si un long réapprentissage de soi-même est nécessaire.

Agir avant qu’il ne soit trop tard

Nonobstant cela, le Québec se doit de disposer de ressources crédibles pour venir en aide aux personnes vivant avec des troubles alimentaires. Le manque visible de moyens en la matière témoigne d’un désintéressement des pouvoirs publics qui ne peut pas perdurer. Il faut agir vite – c’est-à-dire maintenant.

Deux volets doivent être considérés : le volet préventif et le volet curatif. Le premier viendra prévenir la maladie en sensibilisant davantage les enfants comme les adultes aux dangers des troubles alimentaires.

Il permettra d’anticiper les risques en considérant davantage les violences à l’école ou encore les violences familiales, peu importe leur nature, mais également de sensibiliser les jeunes aux stéréotypes du corps parfait, particulièrement véhiculés sur les réseaux sociaux, dont l’utilisation est en croissance.

Le volet curatif visera, quant à lui, à offrir davantage de ressources aux personnes qui en ont besoin (groupes de parole, professionnels, soutien de diverses natures). Pour ce volet, Anorexie et boulimie Québec (ANEB) offre déjà plusieurs ressources considérables afin d’aider les personnes atteintes de troubles du comportement alimentaire, mais sa mission est limitée par le manque d’intérêt des pouvoirs publics et le besoin criant de financement pour pouvoir, in fine, créer une maison qui offrira sous un même toit toutes les ressources disponibles. Elle leur permettra ainsi de se remettre en forme, à leur rythme, et avec des professionnels à leur écoute. Chers acteurs politiques, vous l’aurez compris, il est désormais temps de prendre des mesures concrètes.

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