Le système de santé décide de ce qui doit être fait pour les soins de la population. Qui soigne, quand et où, ce qui est prioritaire, quels délais sont tolérables, et quel degré de saturation est acceptable dans les urgences du Québec. Cette approche parentale est pourtant obsolète. Une entreprise de service moderne doit s’intéresser aux besoins et désirs de sa clientèle.

Ailleurs que dans la santé, aucune entreprise n’ose prétendre savoir mieux que ses clients ce qui est bon pour eux. Pourquoi en plus de 20 ans de pratique médicale, n’ai-je jamais vu un sondage remis à des patients sur l’expérience ou la qualité des soins reçus dans un établissement ? Pourquoi ne pas demander aux infirmières, aux préposés et aux médecins ce qu’ils observent sur le terrain et s’ils ont ce dont ils ont besoin pour soigner leurs patients adéquatement ?

Il m’est aujourd’hui impossible d’aller au restaurant, à l’hôtel, au spa ou chez le vétérinaire sans qu’on me demande si je suis satisfait de mon expérience et qu’on m’invite à faire part de mes suggestions et à recommander l’endroit à mes amis.

L’industrie médicale privée fleurit au Québec parce que le système public défaille, mais aussi en raison de son approche autoritaire, autocratique et obsolète.

L’entreprise privée s’intéresse aux besoins et aux désirs de ses clients, et de ses employés, sans lesquels elle ne peut mener sa mission et cherche à les satisfaire. Pourquoi ? Parce que sa survie en dépend.

Les patients sont pourtant des clients peu exigeants et si notre système de santé public prenait la peine de les interroger, voici ce qu’ils apprendraient :

– l’expérience patient dépasse le fait de recevoir les soins médicaux nécessaires. La chaleur humaine, l’empathie et la compassion avec lesquelles ils sont délivrés comptent aussi ;

– la facilité pour la prise de rendez-vous (virtuel ou en personne), la communication, le renouvellement d’une prescription, ou pour se faire soigner comptent plus que jamais ;

– les patients veulent des professionnels et du personnel de soutien qui ont le temps de les écouter, et de faire preuve de compassion. Avec une consultation de sept minutes, c’est mission peu probable ;

– les générations se succèdent mais ne se ressemblent pas. Les boomers ont des besoins croissants parce qu’ils vieillissent et veulent rester actifs. Les membres de la génération X consomment des services de santé pour eux-mêmes, leurs enfants et leurs parents vieillissants. Les milléniaux (Y) s’intéressent à optimiser eux-mêmes leur santé et à prévenir la maladie. Les post-milléniaux (Z) ont peu de besoins, mais exigent de la facilité d’accès en ligne ;

– les patients veulent un système qui s’adapte à eux plutôt que l’inverse et ont soif de flexibilité et de commodité. Les consultations virtuelles, répandues depuis la pandémie, sont appréciées. Les horaires flexibles, pour les soins non urgents, sont également très appréciés, parce qu’après tout, ils doivent bien travailler, ces patients, non ?

– les patients veulent pouvoir choisir leurs soignants en fonction de leur réputation virtuelle et des expériences d’autres patients, disponibles en ligne ; des services qui ont été rendus disponibles par des entreprises comme ratemds, Google ou Facebook, plutôt que par les institutions publiques ou les hôpitaux. La crédibilité d’aujourd’hui passe par le virtuel ;

– les patients d’aujourd’hui veulent être considérés comme des partenaires dans la gestion de leur santé. L’approche traditionnelle du docteur qui sait « mieux », n’écoute pas ou même, se moque de l’opinion du patient (merci, DGoogle) est révolue. Ils veulent être soignés de manière holistique (personne entière) et non comme une « condition médicale » à traiter. Cette approche fragmentée est chose du passé ;

– les patients veulent avoir accès à leur dossier, comme ils accèdent à leur compte bancaire en ligne et veulent que leurs informations puissent être partagées de manière confidentielle et sécuritaire avec leurs autres soignants ;

– les patients veulent de la transparence et des professionnels qui communiquent de manière compréhensible, avant, pendant et après leur consultation ou leur traitement ;

– les patients veulent passer le temps dont ils ont besoin avec leur médecin et sentir que durant la durée de l’interaction, ils sont importants.

Si le système de santé public se montre incapable ou trop rigide pour s’adapter aux besoins et désirs des patients d’aujourd’hui, qui sont des consommateurs plus avisés que jamais, le privé continuera de le faire et à prendre de l’expansion, au Québec. Pourquoi ? Simplement parce qu’il pose les questions : comment pouvons-nous vous aider ? Comment a été votre expérience chez nous ?

N’est-il pas temps pour le système de santé de faire de même ?

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