En réponse au texte de Vanessa Destiné « Intégration et langue française : pour Miguel, Yesenia, Minh et les autres », publié le 12 avril

Peut-on débattre sereinement d’immigration au Québec ? Poser la question, c’est y répondre.

Trop souvent, on a l’impression que le thème de l’immigration est réservé à la seule famille idéologique progressiste, laquelle garde bien jalousement son monopole, et veille à ne jamais reconnaître de légitimité à quiconque s’écarterait des dogmes communs du « tout va bien » et du « toujours plus ».

En effet, quiconque ose remettre en question la quantité d’immigrants que reçoit le Québec annuellement ou la qualité de l’intégration qui a réellement lieu risque d’être accusé des pires fautes morales.

Le texte publié par la chroniqueuse Vanessa Destiné1 dans La Presse n’est qu’un exemple parmi tant d’autres qui illustrent à quel point une certaine gauche est sourde au discours qui s’oppose au sien. Ainsi, les critiques de l’immigration proviendraient automatiquement de « personnes blanches qui ont grandi dans un milieu homogène », de gens qui n’auraient jamais vu de personnes « racisées » sauf en taxi ou en voyage, une assertion gratuite qui suffirait apparemment à les discréditer. Pire encore, on suspecte aussitôt ceux qui s’écartent des positions permises de toucher la part la plus sombre de l’âme humaine, en faisant appel à « la peur et la rancœur ».

Autrement dit, la critique de l’immigration serait le seul fait des ignorants et des intolérants. Avec un manichéisme pareil, allez savoir pourquoi le Québec est plus polarisé que jamais autour des enjeux identitaires.

Pourtant, avec un peu de bonne foi, il est assez facile de comprendre cette angoisse existentielle, parce que c’est bien de cela qu’il est question pour une petite nation dont la persistance fut toujours incertaine. Voilà des décennies qu’on répète que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais le réel a rattrapé le discours et ne peut plus être ignoré. Qu’il y ait de belles histoires d’intégration, personne ne le conteste et tous s’en réjouissent, mais cela ne change rien au fait que Montréal s’anglicise, et qu’il est de plus en plus difficile de s’y faire servir en français. Néanmoins, lorsque l’on dénonce cette tendance préoccupante, on en trouve toujours pour dire non seulement qu’il est inadmissible d’en parler, mais aussi – et de surcroît – que le Québec serait trop blanc, trop francophone et trop fermé à la « diversité ». Voilà qui est fort de café.

Il ne s’agit pas de dénoncer l’immigration dans l’absolu, mais de réaliser que notre capacité d’intégration n’est pas infinie. Dans le cas du Québec, il est tout à fait approprié de parler d’immigration massive : proportionnellement parlant, nous sommes parmi les États qui accueillent le plus d’immigrants au monde, soit 2,4 fois plus que les États-Unis et 2 fois plus que la France2. Qui croit sincèrement que la nation québécoise a une capacité d’intégration deux fois supérieure à celle de ces grandes nations ?

1. Lisez le texte « Pour Miguel, Yesenia, Minh et les autres »

2. Houle, Jacques. (2018). Disparaître ? – Afflux migratoires et avenir du Québec, Montréal, Liber.

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