Plus de 35,5 millions de tonnes de nourriture parfaitement saine sont jetées chaque année au Canada

Plusieurs affirment que le terme « gaspillage alimentaire » ne devrait pas exister, et il y a une pointe de vérité là-dedans. La nourriture est une chose précieuse qui a toujours de la valeur pour quelqu’un, quelque part.

Associer la nourriture à « déchet » ou « gaspillage » ne fait que supposer qu’elle peut devenir sans valeur. Nous pouvons la composter, l’utiliser pour produire des biocarburants, et bien sûr, nous pouvons la réutiliser et même la récupérer. La nourriture n’a pas vraiment de finalité en soi. Mais étant donné que le prix des denrées alimentaires augmente sans cesse ces jours-ci, l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement alimentaire offre plus que jamais la chance aux consommateurs de « sauver » la nourriture.

Lorsque les épiciers veulent écouler des produits alimentaires dont la date de péremption approche, ils ne cherchent plus un endroit reculé et mal éclairé du magasin pour les vendre. En fait, en entrant dans bon nombre d’épiceries, on voit désormais couramment des produits alimentaires à prix réduit affichés bien en vue dans une section achalandée de l’établissement. Ces rabais peuvent atteindre 25 % et même 50 % dans certains cas. Plusieurs ont remarqué que les offres « pour déguster ce soir » deviennent plus fréquentes, en particulier au comptoir des viandes. Selon un récent sondage réalisé par l’Université Dalhousie, en partenariat avec Caddle, 39,6 % des Canadiens achètent des produits à prix réduit – dont la date de péremption arrive à échéance dans quelques jours –, et ce, plus souvent qu’en 2020.

PHOTO LA PRESSE CANADIENNE

Le Rescued Food Market de la Food Stash Foundation, à Vancouver

Payez ce que vous voulez

Le mouvement « payez ce que vous voulez » prend également son envol. La Food Stash Foundation, une organisation caritative établie à Vancouver, a lancé le 1er octobre le Rescued Food Market au village olympique de la ville. Le groupe « sauve » plus de 70 000 lb de nourriture par mois, qui autrement se dirigeaient à la poubelle. Le marché alimentaire stockera des aliments périssables, notamment de la viande, du fromage, du lait et des œufs. Les aliments offerts dans le magasin proviennent des épiceries, des grossistes et des fermes. Le magasin encourage le client à faire un don ou à payer une somme qui lui semble juste pour la nourriture qu’il choisit. Un autre emplacement à Toronto, appelé Pay What You Can Grocery Store, Cafe, and Bakery, dans la rue Dundas, vient aussi d’ouvrir il y a quelques jours, avec le même modèle d’exploitation.

Il s’agit de vendre des aliments au détail, de les réutiliser et de réduire le gaspillage. Nous nous attendons à ce que davantage de magasins du même genre ouvrent dans les mois à venir, à Montréal et ailleurs.

Vous ne pouvez pas vous rendre à ces endroits ? Aucun problème. Votre téléphone cellulaire vous offre une chance de « sauver » des aliments. Des applications comme Flashfood et FoodHero vous informent des offres quotidiennes dans votre quartier, où que vous soyez au pays. Certaines remises peuvent aller jusqu’à 50 %. Ces applications sont des portails utiles, permettant aux consommateurs de faire des économies substantielles, tout en aidant l’environnement, si vous consentez à faire des compromis sur la fraîcheur, bien sûr. Mais chez certains consommateurs, le stigmate des aliments de moindre qualité résonne encore assez fortement et faire des compromis sur la qualité et la fraîcheur ne constitue pas toujours une option.

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

L’application Flashfood

Le « sauvetage alimentaire » n’est pas nouveau. Second Harvest, le plus grand programme de sauvetage alimentaire du pays, existe depuis 36 ans déjà. Il redistribue suffisamment de nourriture pour préparer plus de 60 000 repas par an. Les problèmes de gaspillage alimentaire et de récupération des aliments ont depuis longtemps attiré l’attention à la fois pour des raisons environnementales et de sécurité alimentaire. En effet, la plus grande réussite de Second Harvest réside dans la création d’une concurrence pour elle-même, en mobilisant davantage de personnes dans la valorisation de toute la nourriture que nous avons, tout en éliminant la stigmatisation du gaspillage alimentaire. Sauver de la nourriture devient maintenant un geste intéressant à faire, ce qui n’était pas le cas en 1985 lorsque Second Harvest a commencé.

Plus de 35,5 millions de tonnes de nourriture parfaitement saine sont jetées chaque année au Canada, assez pour remplir 319 000 appareils Boeing 787 Dreamliner.

Tout le travail effectué et toutes les ressources investies dans la production d’aliments qui se retrouvent ensuite à la poubelle incitent la population à modifier ses choix alimentaires. Les consommateurs sont responsables de 48 % de tous les aliments gaspillés, ce qui représente plus de nourriture que les agriculteurs, transformateurs et épiciers tous réunis peuvent gaspiller. Il devient tout à fait naturel de considérer les consommateurs comme les meilleurs « sauveteurs » potentiels d’aliments.

Pour épargner à l’épicerie, il faut éviter d’acheter à l’avance en grosse quantité et plutôt faire le contraire. La patience et les achats de dernière minute vous aideront sûrement à économiser, et surtout, à « sauver » de la nourriture.

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