Le débat désordonné sur le glyphosate ne rend pas service aux consommateurs. Pour les universitaires et les groupes d’intérêt qui veulent nous faire croire que l’utilisation de produits chimiques dans l’agriculture constitue une menace pour les humains, la vérité qui dérange est la suivante : ces produits ne représentent tout simplement pas une telle menace.

Les Canadiens avaient jusqu’au 20 juillet pour commenter la proposition du gouvernement fédéral d’augmenter la quantité autorisée de résidus d’herbicides à base de glyphosate sur les légumineuses. Maintenant, en raison d’une pression publique bien méritée, Santé Canada a décidé de suspendre toute décision jusqu’en 2022.

Le débat sur le glyphosate au Canada et dans le monde est à la fois populiste, chaotique, politique et franchement troublant. De nombreux groupes instrumentalisent la recherche scientifique avec l’un ou l’autre des objectifs suivants, soit soutenir l’utilisation du produit chimique bien connu, popularisé sous le nom de Roundup, ou le déclarer cancérigène et toxique. Certains médias et chercheurs traitent malheureusement la science comme un buffet à volonté, sélectionnant soigneusement la recherche pour s’adapter à un certain récit. Cette situation désolante perdure depuis des années.

Dans les faits, on assiste à une bataille idéologique entre l’agriculture biologique et l’agriculture industrielle, ou même entre les perceptions rurales et celles des citadins qui en général connaissent très mal l’agriculture. Bien sûr, les consommateurs ont parfaitement le droit de s’inquiéter de la salubrité des aliments qu’ils achètent, mais la plupart des informations auxquelles ils sont exposés sont incroyablement faussées par la politique de tous les côtés.

La vérité qui dérange à propos du glyphosate est qu’il ne s’agit pas nécessairement d’un poison, à moins qu’il ne soit utilisé de manière irresponsable.

La plupart des agriculteurs adhèrent à des pratiques responsables et durables basées sur une agriculture de précision, où la surexploitation devient à la fois coûteuse et inutile.

Santé Canada n’a pas aidé avec une stratégie de communication atroce des risques, tout en sachant qu’il traitait l’une des questions les plus controversées en agriculture. Santé Canada a démontré une certaine hésitation à divulguer toute l’information dont il disposait, forçant les médias à creuser plus profondément dans la « boîte noire » du ministère fédéral. Or, il devrait démontrer autant de transparence que possible, surtout en ce qui concerne des dossiers liés au génie génétique et à la phytotechnie. Santé Canada a tout simplement aggravé les choses.

En effet, la représentation fausse de la toxicité du glyphosate induit en erreur le public, la communauté scientifique et les régulateurs. Il faut souligner que la présence du glyphosate n’est pas nécessairement synonyme de toxicité.

L’intention de Santé Canada est d’harmoniser les normes à l’échelle de l’Amérique du Nord. Dans un souci de transparence, Santé Canada devrait clarifier la raison pour laquelle l’évaluation est effectuée en premier lieu et faire la lumière sur celles qui demandent une telle évaluation. Il doit également expliquer les risques liés à l’utilisation de la substance. Selon les normes connues, une personne devrait manger au moins 32 bols de Cheerios par jour pendant plus d’un an pour approcher la limite suggérée par Santé Canada. De plus, ce seuil est au moins 100 fois inférieur aux niveaux pouvant avoir une incidence nocive sur la santé d’une personne.

De nombreuses études suggérant la nocivité du glyphosate établissent souvent des normes qui sortent de nulle part.

Sans surprise, on retrouve de nombreux écologistes et groupes d’agriculture biologique à l’origine de nombreux rapports condamnant l’utilisation du glyphosate. Pendant des années, ces mêmes groupes ont fait la guerre aux organismes génétiquement modifiés, les OGM, pour se rendre compte que les campagnes de peur des « frankenfoods » ne fonctionnaient pas.

Maintenant, ils visent les produits chimiques liés au génie génétique utilisés dans l’agriculture, mais espérer une agriculture moderne exempte de produits chimiques relève tout simplement de l’irréalisme, surtout en raison des changements climatiques. Nous avons parcouru un long chemin depuis l’ère des bols à poussière dans les Prairies et avons collectivement appris comment la science des sols peut servir l’agriculture de manière plus efficace avec le soutien de biotechnologies ingénieuses.

Il y a un certain consensus qui se construit autour du glyphosate, mais cela se dit rarement publiquement. Au total, 17 agences de réglementation et des milliers d’études ont évalué les répercussions du glyphosate sur la santé humaine et sur l’environnement.

Un rapport important de l’Union européenne, publié en juin, mais boudé par la plupart des grands médias au Canada, jugeait que le glyphosate n’était pas cancérigène.

Les méthodologies des études antérieures suggérant que le glyphosate pouvait causer le cancer ont souvent fait l’objet de fortes critiques après leur publication.

Nous devrions certainement tenir un débat continu sur l’utilisation de produits chimiques dans l’agriculture pour notre quête visant à comprendre pleinement les risques inhérents à la fois pour notre santé et pour l’environnement. Mais le fait que certaines organisations et divers universitaires ayant des conflits d’intérêts évidents continuent de ne pas tenir compte de la prévalence des preuves à l’appui des pratiques agricoles actuelles rend un très mauvais service à nos communautés. Cessons de nous servir de la science comme si elle était un buffet à volonté pour choisir les rapports qui raffermissent certaines de nos idées préconçues.

PRÉCISION
Une version de ce texte a été publiée le 5 août dans le Regina Leader-Post et était co-signée par le professeur Stuart Smyth, de l’Université de la Saskatchewan, dont la chaire de recherche est financée en partie par Bayer Crop Science, un fabricant d’herbicides à base de glyphosates.

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