Qu'est-ce qui est encore plus imprévisible que le résultat de l'élection américaine ? La réaction de marchés financiers à la victoire surprise de Donald Trump !

Loin de sombrer dans le chaos, comme on aurait pu le croire, la Bourse américaine a accueilli le bouillant 45e président - désigné - des États-Unis avec un gain appréciable de 1 % au lendemain du scrutin. Plus zen que ça, tu meurs.

En fait, le cauchemar boursier n'a même pas duré une nuit. Quand Trump a remporté la Floride mardi soir, quand ses probabilités d'accéder à la Maison-Blanche ont grimpé dans le tapis, une onde de choc s'est emparée des marchés des capitaux.

Vers 23 h, les contrats à terme reflétaient une baisse spectaculaire de 5 % de la Bourse américaine. En forte hausse, l'or et le franc suisse jouaient leur rôle de valeurs refuges. Le peso s'écroulait de 13 %, voyant déjà l'ombre du mur s'élever le long de la frontière du Mexique. Au Japon, l'indice Nikkei s'écrasait de plus de 5 % dès l'ouverture.

Bref, tout se passait comme on l'aurait imaginé. Puis, contre toute attente, les peurs des investisseurs se sont évanouies comme un mauvais rêve.

En quelques heures, les contrats à terme ont entièrement effacé leurs pertes de la nuit. Selon l'agence Bloomberg, un rebond d'une telle puissance ne s'est pas vu depuis les jours sombres de la crise du crédit en 2008, alors qu'on réécrivait le livre des records de la Bourse.

Il semble que les investisseurs ont retenu la leçon du Brexit. L'été dernier, quand les sujets de Sa Majesté ont voté en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, la Bourse de Londres a flanché... avant de récupérer toutes ses plumes en moins d'une semaine. Une occasion très payante pour les investisseurs qui ont eu le cran d'acheter dans le creux.

Cette fois, les chasseurs d'aubaines n'ont même pas eu une journée pour profiter du vent de panique. Désolée pour les petits investisseurs, il fallait passer votre ordre d'achat entre 23 h et minuit ! C'est exactement ce qu'a fait le milliardaire Carl Icahn. Ce partisan de Donald Trump a quitté la fête au milieu de la nuit et il est rentré chez lui pour investir environ 1 milliard de dollars dans les actions américaines. Quand on dit que la nuit porte conseil ! Et maintenant, à quoi s'attendre pour la suite des choses ? Quel sera l'impact de cette élection sur votre portefeuille ?

Des taux d'intérêt encore plus faibles

Les taux d'intérêt au Canada pourraient baisser encore plus, estime Kevin LeBlanc, analyste des marchés nord-américains pour la firme de gestion montréalaise Hexavest.

La Banque du Canada a déjà un ton très sombre depuis le début de l'automne. Son patron Stephen Poloz réalise que les exportations, auxquelles il accorde beaucoup d'attention, ne rebondissent pas comme prévu grâce à la baisse du dollar canadien.

Or, l'élection de Donald Trump, qui veut tailler en pièces les accords de libre-échange, ne peut pas être interprétée comme un facteur positif pour les exportateurs canadiens.

Mais avant d'agir, la Banque du Canada attendra peut-être au printemps prochain. Elle verra alors jusqu'à quel point le resserrement des règles hypothécaires du mois dernier est parvenu à calmer le marché immobilier. Si c'est le cas, M. Poloz aura la marge de manoeuvre pour baisser les taux, sans jeter encore plus d'huile sur le feu.

Vent de front pour le huard

Mauvaise nouvelle pour les snowbirds qui prennent le volant ces jours-ci en direction de la Floride : le huard qui a perdu 0,8 % hier aura le vent dans le front avec l'arrivée d'un président protectionniste à la Maison-Blanche.

Présentement, les touristes canadiens doivent verser 134 $ canadiens pour mettre la main sur 100 $US. Le coût d'un dollar US pourrait grimper jusqu'à 1,40 $, avance M. LeBlanc. Même si les taxes à la consommation sont inférieures aux États-Unis, une prime de 40 % sur tous vos achats, ça commence à faire cher pour aller au soleil. À moins que vous mettiez plutôt le cap sur le Mexique puisque le peso a clôturé en baisse de 8 %.

La bourse avec une police d'assurance

Avis aux investisseurs : Plusieurs secteurs seront favorisés par l'élection de Trump.

Entre autres, les sociétés pharmaceutiques profiteront du retrait de l'État du domaine de la santé.

Le secteur de la défense pourrait bénéficier de l'augmentation des dépenses des alliés des États-Unis, sous la pression de Trump qui n'a pas envie de payer pour la sécurité de ses amis.

Et les entreprises du secteur des matières premières, de la machinerie et des transports pourraient bénéficier du plan de Trump d'investir 500 milliards dans les infrastructures, indique aussi Luc Vallée, stratège en chef Valeurs mobilières Banque Laurentienne.

Ceci dit, les investisseurs doivent s'attendre à davantage de turbulences avec l'élection de Trump, surtout que la Bourse américaine navigue près d'un sommet historique. L'incertitude pourrait aussi gagner l'Europe où d'autres élections pourraient donner la frousse aux investisseurs.

Dans ce contexte, l'or qui agit toujours comme une police d'assurance devrait bien se porter, estime M. LeBlanc.

Photo Chris Ratcliffe, Bloomberg

Après une chute spectaculaire mardi soir lors de l'élection présidentielle, la Bourse américaine a terminé la journée d'hier en hausse.

Infographie La Presse