La vie est bien faite. Une semaine après le Super Bowl, l'amoureux peut se faire pardonner ses excès de testostérone et d'ailes de poulet avec la Saint-Valentin. Pas de football, ce week-end. Même pas un match du Canadien. La table est mise pour des activités romantiques.

Souper aux chandelles, chansons de Francis Cabrel, films avec Hugh Grant, marches dans la neige, bouquets de fleurs, massages aux huiles essentielles, bref l'horaire normal d'un couple durant son premier mois de fréquentation. C'est ça, au fond, la Saint-Valentin. Revivre, une journée par année, la passion des débuts.

Il y en a qui sont férocement contre la fête de l'amour. On ne nous dictera pas quand être amoureux ! Une attention forcée ne vaut pas une attention spontanée. Vrai. On peut aussi bien envoyer des fleurs à sa moitié le 23 novembre ou le 6 avril que le 14 février. On peut lui envoyer des courriels doux à tout moment, un lundi matin comme un vendredi gris. C'est toujours le bon jour pour vivre son amour.

Mais si tous les jours sont bons, justement, le 14 février l'est aussi. Faut pas laisser son esprit de contradiction avoir raison de son esprit sentimental.

Bien sûr, les marchands de fleurs et de chocolats font des affaires d'or. Et puis après ? Vaut mieux encourager ces marchands-là que les marchands d'armes. Tant mieux si les fleuristes font leur année durant cette fin de semaine. Il n'y a pas de métier plus poétique. Pensez-y, vendre des fleurs. Ça ne se mange pas. Ça ne prend pas de valeur. Ça ne dure que quelques heures. Ça ne sert à rien. Ça ne sert qu'à faire du bien. Et ça en fait. Plus que bien des biens que l'on croit servir à quelque chose. Si vous vous privez d'envoyer des fleurs, demain, pour ne pas participer à la grande conspiration capitaliste de la Saint-Valentin, rangez vos pancartes d'activiste. C'est juste des fleurs. Des brins d'herbe en beauté. Ce n'est pas l'empire du mal. C'est l'empire des fleurs du mal. Que la rose soit avec toi.

Il y en a qui ne célèbrent pas la Saint-Valentin parce que tout le monde le fait. Tout le monde le fait, fais-le donc pas. L'important, c'est d'être original. Tout le monde se dit je t'aime, je ne le dirai pas. Gnagnagna... Ben voyons ! Être différent, c'est bien quand tout le monde est con. Mais quand tout le monde est bon, c'est con. Pas besoin de remplir la maison de chandelles, mais une petite lumière dans les yeux, un matin de Saint-Valentin, ça ne peut que vous rendre heureux.

Il y en a qui boudent la Saint-Valentin parce qu'ils trouvent que ça n'a pas rapport. Pourquoi la Saint-Valentin ? Pourquoi le 14 février ? Saint Valentin fut le premier évêque de la ville de Terni en 197 après Jésus-Christ. Le préfet Placido Furi l'a condamné à mort parce qu'il a célébré un mariage entre un légionnaire romain et une chrétienne. Un mariage d'amour. Saint Valentin fut décapité. L'amour lui fit perdre la tête.

Si on célèbre la fête de l'amour le 14 février, c'est parce qu'au XIVe siècle, on croyait que c'était le jour où les oiseaux s'appairaient, comme on le disait à l'époque, en vieux français. On pensait que tous les oiseaux se mettaient en couple le même jour. Le 14 février, c'était comme la grande finale de l'Occupation double de la perruche. Ça se roucoulait dans le cou !

Donc si demain vous allez fêter la Saint-Valentin avec votre partenaire, c'est à cause d'un prêtre et des oiseaux. Bien sûr, ce ne sont pas les symboles les plus forts de la séduction. Surtout qu'un prêtre est censé être aux oiseaux. Mais avouons que le terme en lui-même sonne bien ; Saint-Valentin. C'est quand même plus mignon que la Saint-Guy ou la Saint-Scholastique. Et juste le mot saint est tellement évocateur.

Puis le 14 février, c'est une date tout indiquée pour se coller. Le 14 août, en pleine canicule, le chocolat se digèrerait mal et la sueur de l'autre pourrait nous noyer. À la mi-février, un peu de rouge dans la grisaille, ça donne des belles chaleurs. C'est une joyeuse façon de faire passer l'hiver.

Ne gâchez pas votre plaisir demain. Il y a des entreprises plus importantes à dénoncer que celle de la Saint-Valentin. Pas besoin de rien acheter. Faites des fleurs en papier avec La Presse du samedi, un statut Facebook avec des coeurs, un secret sur l'oreiller, et le tour est joué. Pensez-y, une journée dans l'année où le mot amour est plus populaire dans les médias que le mot guerre, ça ne peut pas mal faire.

Joyeuse Saint-Valentin tout le monde ! Seuls ou en couple, on est tous des amoureux. En bateau ou sur le quai, on est tous en train de voyager.