Voici une rétrospective de 2009 tirée de mes 112 chroniques de l'année...

«DU DOMAINE PRIVÉ»

C'est ma déclaration de politicien préférée de 2009, lancée en avril par Claude Dauphin, membre de l'équipe politique de Gérald Tremblay. La déclaration: «On ne peut pas vous garantir ce soir qu'il y est allé ou qu'il n'y est pas allé ou jamais allé ou qu'il n'ira jamais: c'est du domaine privé.» M. Dauphin parlait de la présence de Frank Zampino sur le yacht de l'entrepreneur Tony Accurso.

Sachant tout ce qu'on a su depuis sur le triumvirat fric-responsables municipaux-constructeur, c'est une déclaration lumineuse de stupidité.

 

Idée de carrière post-politique pour M. Dauphin: humoriste.

TOUT VA BIEN À LA FTQ

«Y aura pas un câlisse de mafioso pis de Hells qui va atteindre le Fonds de solidarité. Le passé, tu peux pas le défaire, le passé. (...) Michel a appris qu'y fallait, comment y ont dit ça, les tabarnaks? J'te dirai pas qui... du côté des Italiens... Il faut que Michel Arsenault débarque de là. Y débarquera pas, Michel Arsenault, câlisse.» Citation de Gilles Audette, bras droit du président de la FTQ, Michel Arsenault, enregistré à son insu.

La FTQ, on le sait, ne veut pas d'enquête publique sur les liens entre la politique, le crime organisé et la construction. Je la comprends.

LA SPIRALE

Janvier: Gaza est attaquée par Israël, qui réplique aveuglément aux tirs de missiles du Hamas. On ne peut entrer à Gaza. Je suis donc à Rentis, village poussiéreux de Cisjordanie, dans le salon de la famille d'un type qui, en 2007, s'est fait sauter dans un café de Jérusalem-Est, tuant sept civils. Le frère du kamikaze, Saeb, m'explique, le plus simplement du monde, pour justifier un attentat visant des civils: «Tous les Israéliens servent dans l'armée. Ce n'est pas une société civile, c'est une société militaire. Ce sont tous des occupants. Ils occupent nos terres.»

Un an plus tard, pour Gaza, les hostilités ont cessé mais rien n'est réglé.

Rien ne le sera, hélas, dans 20 ans non plus.

FESTIGATE

Rappelez-vous le maire Labeaume, très fâché par le changement des dates des FrancoFolies de Montréal. Très mauvais pour le Festival d'été de Québec, pestait-il. Chicane publique, flèches à Gérald Tremblay. Puis, ça s'est réglé de façon très différente du déclenchement des hostilités: en silence, loin des caméras de RDI et de LCN. La paix, c'est pas payant...

LES AVOCATS

Rita Mestokosho, poétesse innue, «révélée» par une lettre envoyée au quotidien Le Monde par le Prix Nobel de littérature J.M.G. Le Clézio, mange une salade César dans un petit resto de la Côte-Nord, près de son village d'Ekuanitshit. Elle se bat contre le projet de barrage sur la rivière Romaine. Citation: «Hydro-Québec nous l'a dit et répété: ça va se faire avec ou sans votre accord. Nos propres avocats nous l'ont dit. Les avocats! Un avocat, c'est un avocat. Il pense à lui-même. Ton avocat n'est pas ton ami. Ton avocat veut un règlement.»

Dans les propos de la poétesse, on retrouve tout le paradoxe de l'«appui» des Innus au barrage de La Romaine.

L'OPTIMISTE DE L'ANNÉE

Ah, là, c'est assez clair: Gérard Deltell, qui a hérité de l'ADQ. J'ai dit de Gérard qu'il faisait, ainsi, le bouche-à-bouche à un cadavre. Il ne m'en a même pas voulu. C'est vous dire à quel point ce gaillard est admirable. De toute façon, Gérard, si l'ADQ meurt, tu reviendras commenter la politique dans un «club des ex» quelconque.

L'ÉGOÏSTE DE L'ANNÉE

Je relis ma chronique du 10 novembre et je me demande si, après tout, Claude Dubois a attrapé la grippe. J'espère bien que non. Ce serait ironique que le Québécois qui voulait le plus obtenir son vaccin ait été, malgré tout, contaminé. Ça va, Claude, sinon?

CARTE POSTALE

J'ai visité le Québec du bout du monde, l'été dernier. Enfin, mon bout du monde. Jamésie et Côte-Nord. À Radisson, au pied des barrages, Patrice Maltais m'a raconté la vie dans ce village, le village blanc le plus au nord. Sans fard, sans retenue; le bon et le mauvais. Il n'aurait pas dû. Enfin, il aurait dû savoir que, quand on parle aux étranges, il faut leur donner la version carte postale de notre village. Sinon, c'est l'anathème et la mise au ban. C'est ce qui est arrivé à Patrice après la publication de «Radisson, si sinistre». Ils l'ont suffisamment écoeuré pour qu'il s'en aille. Je le soupçonne d'en être heureux, finalement.

CHIBOU

Plus grand moment de québécitude de l'année: au bord du lac Mistassini, près de Chibougamau, dans le camp d'un Indien absent, à manger du doré fraîchement pêché avec trois gars de la place qui m'ont initié au grand air du Nord. Salut, Fred, Fred et Pascal.

MARIONNETTE

Fin octobre, révélation consternante de l'émission Enquête: Lino Zambito, grand constructeur, a tenté de convaincre des candidats de l'opposition à Boisbriand de ne pas se présenter aux élections. Enregistré à son insu, il a eu ces franches paroles: «Pourquoi on regarde pas en avant pis voir ce qu'on peut bâtir ensemble, hostie?» Stupéfiant: la mairesse, Sylvie Saint-Jean, participait à la rencontre. Elle a perdu, le 1er novembre. Chic, je n'aurai pas besoin de changer Newfie par Boisbriannais dans mes blagues de fin de soirée. Ça se dit mal, Boisbriannais.

LE TUEUR

En avril, je suis allé faire un tour à Québec, au procès de Francis Proulx, accusé du meurtre de Nancy Michaud à Rivière-Ouelle en 2008. J'en retiens une image, émouvante: la famille de la défunte, dans la salle, unie dans une dignité absolue. Quand on regarde le mal dans les yeux, comme les proches de Mme Michaud l'ont fait pendant tout le procès, c'est peut-être le seul recours: le silence et la dignité.

Proulx, lui, va sécher en prison. Longtemps. Un salopard, bien sûr. Mais j'ai une pensée particulière pour le voisin qui, en 2008, a vendu une arme de poing à Proulx, même en le sachant légèrement timbré. Joyeuses Fêtes à ce Prix Nobel.

LE DRAME DE L'ANNÉE

Je relis cette chronique de mars, «Trou noir à Piedmont», qui traite du cardiologue accusé d'avoir tué ses deux enfants dans la foulée d'une séparation difficile. Difficile? Ne le sont-elles pas toutes? Enfin, je m'égare. Un meurtre d'enfant est toujours inacceptable et barbare. Pourquoi ai-je été hanté si longtemps, si profondément, comme tant d'autres, par ce drame? À cause des mains. De ses mains. Selon ce qu'on sait, le médecin a tué ses enfants de ses mains, à l'arme blanche. D'habitude, les infanticides, ça se fait aux médicaments, au fusil, au monoxyde de carbone. On évite, au sens propre, de se salir les mains...

Pas lui, apparemment. L'accusé a tenté de se suicider, en prison, cet automne. Heureusement, il a échoué. Je dis heureusement: le procès est notre seule chance de voir un jour sortir de ce trou noir un petit halo de lumière.

Les mots de l'année

Allez voir sur mon blogue pour connaître LE mot de l'année.