C’est reconnu depuis maintenant longtemps. Chaque année, le cinéphile trouvera au Festival de Toronto une programmation comme il n’en existe nulle part ailleurs au monde. Aux grandes primeurs de l’automne s’ajoutent en effet les morceaux de choix déjà sélectionnés par les autres grands festivals compétitifs de la planète.

Les 268 longs métrages retenus sont pratiquement tous dignes d’intérêt. À telle enseigne qu’on peut quasiment y construire son programme à l’aveugle tellement la matière est riche. De surcroît, les projections destinées au public – qui font à peu près toutes salle comble – se déroulent dans un climat de réelle effervescence. La présence des créateurs dans les salles et les échanges directs avec le public à la faveur de séances de « questions-réponses » suscitent l’enthousiasme.

Tout cela est bien. Même admirable. Et témoigne d’une attention de tous les instants de la part des organisateurs. Mais…

Plus que jamais cette année, les professionnels et journalistes, qui doivent se rendre à des projections spécifiquement organisées pour eux, ont eu l’impression d’assister à une immense foire. Le TIFF est un événement incontournable, c’est entendu, mais force est de constater que plusieurs ne le fréquentent plus que par intérêt, sans plaisir.

D’un côté, vous avez des professionnels frustrés de voir les œuvres dont ils s’occupent être diluées dans une énorme masse de films. De l’autre, des journalistes tout aussi frustrés de ne pouvoir être à quatre endroits différents en même temps. On pourra même se sentir un peu cheap d’abandonner Francis Coppola à son sort parce que sa conférence de presse a lieu à l’heure où, dans les salles dévolues aux « gens de l’industrie », on présente les nouveaux films, de Luc Besson, Kim Ki-Duk, Lasse Hallström, Madonna ou Steve McQueen.

Des quatre festivals du carré d’as international (Cannes, Venise, Berlin et Toronto), le TIFF est le seul à ne pas proposer de volet compétitif. C’est à la fois son avantage et sa limite. À vrai dire, cette manifestation relève aujourd’hui davantage d’un marché du film que d’un véritable festival. Cette valeur marchande, ironiquement, assure pourtant la richesse de la programmation. On se présente ici dans l’intention bien affirmée de brasser des affaires et de séduire des acheteurs potentiels. Les cinéastes sont aussi entraînés – parfois malgré eux – dans cette dynamique.

Du coup, l’aspect plus ludique de ce grand rendez-vous cinématographique est évacué. Comme d’habitude, le TIFF finira ce week-end en queue de poisson. Les prix du public et ceux dévolus aux films canadiens mis à part, aucun palmarès officiel ne sera annoncé. La plupart des vedettes ayant déjà quitté la Ville reine depuis longtemps (professionnels et journalistes ont fait de même), le party de clôture n’aura rien de mémorable. Dans ces conditions, le géant pourra-t-il se maintenir au sommet encore très longtemps ? On commence à se poser la question.

Un succès inattendu

Goon est un film de hockey violent, vulgaire, drôle et irrésistible. Et pourrait bien constituer enfin le grand succès public que le Canada anglais attend désespérément depuis si longtemps.

Scénarisé par Jay Baruchel et Evan Goldberg, interprété par Seann William Scott, Liev Schreiber et Marc-André Grondin (dans son premier rôle de « douchebag »), Goon assume parfaitement son statut de comédie primaire à gros bras, tout en distillant néanmoins une sensibilité étonnante. Mais attention, pas question ici d’un sentimentalisme hollywoodien ni d’une rectitude politique greffée artificiellement au récit. Les artisans ont eu l’intelligence de faire honneur à « l’épaisseur » de leurs personnages, tout en détournant pourtant les blagues sexistes et homophobes attendues.

Réalisé par Michael Dowse, le film a été lancé au TIFF. La rumeur favorable s’est répandue rapidement. « Ce film-là a été conçu par de vrais fans de hockey et ça paraît ! », observe Marc-André Grondin, lui-même grand amateur.

Patrick Huard # 1

Aux abords du tapis rouge du chic Roy Thomson Hall, où ont lieu les présentations des films sélectionnés dans la prestigieuse section « Galas », les badauds sont nombreux. Ils étaient là, bien sûr, à l’arrivée de l’équipe de Starbuck, seul film québécois ayant eu l’honneur d’une projection de gala cette année.

À l’arrivée de Patrick Huard, on a pu entendre la foule scander le prénom de la superstar. Les commentateurs officiels n’ont pas hésité à présenter Huard comme « le George Clooney du Québec » et ont visiblement été impressionnés par l’accueil de rock star qu’on lui a réservé.

Ils ont aussi interviewé une femme qui arborait une pancarte sur laquelle on pouvait lire « Patrick Huard # 1 ». « Il a un beau prénom , a-t-elle dit en guise d’explication. Il doit certainement être de descendance irlandaise ! »

Bien sûr, madame.