Ce sera qui, vous pensez? Le kayakiste qui collectionne les podiums? Le gymnaste de retour après avoir passé la dernière année à guérir d'horribles blessures? Ou peut-être le vétéran cavalier qui a participé à ses premiers Jeux olympiques il y a... 34 ans?

Les Jeux olympiques de 2008 s'ouvriront dans un peu moins de trois semaines. Mais déjà, les spéculations vont bon train au sujet de l'identité de l'olympien qui portera le drapeau canadien lorsque les athlètes feront leur entrée dans le Stade national de Pékin.

Le nom de l'athlète sélectionné est un secret jalousement gardé. Choisi par un comité formé de la chef de mission Sylvie Bernier, de son adjoint Peter Giles, de deux représentants des athlètes et d'un représentant des entraîneurs, le porte-drapeau sera présenté au public mercredi, à Montréal et à Toronto.

La sélection est un processus délicat qui n'est pas exempt de controverse. En 2006, une polémique avait vu le jour peu avant les Jeux de Turin, quand il avait été révélé que les patineuses de vitesse Clara Hughes et Cindy Klassen, le bobeur Pierre Lueders et la fondeuse Beckie Scott avaient demandé à leur fédération nationale respective de ne pas présenter leur candidature. Ils jugeaient que le fait de passer de longues heures debout dans le stade à la veille de leur compétition aurait risqué de nuire à leur préparation.

Cette année, toutefois, aucun athlète n'a fait savoir publiquement qu'il n'était pas intéressé à marcher en tête de la délégation canadienne, une situation qui fait sans doute l'affaire du Comité olympique canadien.

Le COC a appris des erreurs passées. Ainsi, le porte-drapeau est maintenant nommé quelques semaines, et non quelques jours, avant les Jeux.

Cela permet d'éviter la répétition du fiasco de 1998, à Nagano. Le skieur acrobatique Jean-Luc Brassard y avait attribué sa contre-performance à son rôle de porte-drapeau et en particulier aux innombrables entrevues qu'il avait dû donner en pleine nuit pour répondre aux impératifs du décalage horaire entre le Japon et le Canada.

«J'ai été très aigri par la suite, mais le bon côté, c'est que les choses ont changé depuis», dit Brassard, qui avait terminé quatrième à Nagano alors qu'il était l'un des favoris, quatre ans après avoir remporté l'or à Lillehammer.

Selon Brassard, le porte-drapeau idéal doit réunir trois qualités. «Il faut quelqu'un qui combine un bel esprit sportif, de l'entregent et surtout de bons résultats sportifs, car la personne choisie doit être connue de la population.»

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Alors, qui le COC choisira-t-il ? Trois candidatures me semblent s'imposer.

D'abord, Adam van Koeverden. Il y a quatre ans, pour son baptême olympique, le kayakiste aujourd'hui âgé de 26 ans avait remporté l'or en K-1 500 et le bronze dans le 1000. Il avait été le seul double médaillé canadien des Jeux d'Athènes et un choix évident pour porter le drapeau lors de la cérémonie de clôture.

Très populaire auprès des athlètes, universellement admiré pour son ardeur à l'entraînement, l'Ontarien ne s'est pas assis sur ses lauriers depuis 2004. Il a gagné deux médailles aux Championnats du monde de 2005, deux autres, dont une d'or, lors des Mondiaux 2007 et il a remporté cinq des six épreuves de Coupe du monde auxquelles il a participé cette année.

Ce printemps, toutefois, van Koeverden a lui-même donné son vote symbolique à Kyle Shewfelt, autre vedette athénienne : l'Albertain avait remporté l'or dans l'épreuve au sol, donnant au Canada la première médaille de son histoire en gymnastique artistique.

Shewfelt, 26 ans, se distingue par son courage : il mène depuis 12 mois une lutte acharnée pour se remettre de graves fractures aux deux tibias et de dommage ligamentaire subis à l'entraînement avant les Championnats du monde de 2007.

Le troisième athlète dont la candidature mérite d'être sérieusement considérée sera le doyen de la délégation olympique canadienne : Ian Millar. À 61 ans, le cavalier ontarien participera à ses neuvièmes Jeux, ce qui lui permettra d'égaler le record de l'Autrichien Hubert Raudaschl (voile). Porter le drapeau permettrait à l'ancien partenaire du légendaire Big Ben d'aller faire un tour à Pékin : en raison du risque de maladie pour les chevaux, les épreuves de sports équestres ont lieu à Hong Kong, à 2000 kilomètres de la ville hôte.

D'autres athlètes ont sûrement mérité la considération du comité : Alexandre Despatie (quoique l'élu sera presque assurément issu du Canada anglais, un Québécois ayant été porte-drapeau lors de quatre des cinq derniers Jeux), Susan Nattrass, une tireuse de 57 ans qui en sera à ses sixièmes Jeux, et Luan Jujie, une escrimeuse née en Chine qui, en 1984, a remporté l'une des toutes premières médailles d'or olympiques de son pays d'origine (ce serait certes une belle manière pour le Canada de mettre le public chinois de son côté).

Plusieurs très bons candidats, donc. Mais si vous ne pouvez miser que sur un seul cheval, on vous suggère d'y aller pour van Koeverden.