En réponse à la chronique de Chantal Guy, « J. K. Rowling vue par quatre (ex)-fans transgenres », publiée le 18 juin.

Chère Madame Guy,

Nous avons lu votre article « J. K. Rowling vue par quatre (ex)-fans Transgenres ». Vous y expliquez que les propos de madame Rowling soulignant que « les personnes qui ont des menstruations » sont des femmes, ont fait mal aux personnes transgenres que vous interviewez pour votre article, et qu’elles se sont senties rejetées par cette affirmation. Il est tout à fait légitime de s’enquérir de ce que nos propos provoquent comme émotion, et de l’effet que peut avoir une telle affirmation, pourtant tout à fait exacte, sur les personnes qui ressentent une inadéquation avec leur sexe. Pourtant, on ne peut évoquer la peur d’offenser comme raison pour nier la réalité biologique, de la même façon qu’on ne peut faire semblant de croire que la Terre est plate pour ne pas offenser les platistes.

Par ailleurs, n’y aurait-il pas lieu de se questionner sur l’offense que peuvent ressentir les femmes désignées par l’expression people who menstruate ? Est-ce une conception défendable de la dignité humaine que de désigner des êtres humains par leur fluide corporel ? Est-ce qu’on désigne les hommes par le terme people who ejaculate ? N’est-il pas normal que les femmes se sentent humiliées quand on les désigne par leur fluide corporel ?

Comprenez-nous bien : nous ne mettons aucunement en cause la sincérité des personnes qui ressentent une inadéquation avec leur sexe. Ces personnes doivent être soutenues, et leurs droits doivent être respectés.

De plus, vouloir lutter contre les discriminations est un objectif non seulement noble, mais absolument essentiel. Mais engager toute la société à occulter la réalité des sexes ne peut pas constituer une solution contre la discrimination.

Être une femme serait, selon les théories des identités de genre, une question de ressenti subjectif n’ayant rien à voir avec le sexe biologique. Les personnes que vous interrogez semblent dire qu’il n’y aurait aucune conséquence à cette modification du sens du mot femme sur les femmes. Votre article parle également des « féministes radicales » qui auraient « peur des hommes ». En tant que membres du conseil exécutif de Pour les droits des femmes du Québec (PDF Québec), nous sommes choquées par cette affirmation, et étonnées que les droits des femmes, qui sont des droits octroyés sur la base du sexe biologique, soient si mal compris. Nous voudrions tout d’abord vous informer que PDF Québec est un organisme mixte où les hommes ont droit de parole et de participation à nos activités. Par ailleurs, il est dommage que vous n’ayez pas cru bon d’équilibrer l’article en nous interrogeant. Nous aurions pu vous en dire long sur les conséquences, concrètes, de l’effacement de la notion de sexe sur les politiques d’accès à l’égalité pour les femmes, notamment le droit à des sports féminins, à des lieux protégés pour les femmes comme les maisons d’hébergement ou les prisons pour femmes, ou aux mesures d’accès à des professions traditionnellement masculines.

Au-delà des préjudices sur les femmes, ce vocabulaire a également de lourdes conséquences sur les enfants, qui sont orientés vers une ribambelle de bloqueurs de croissance, d’hormonothérapies et, plus tard, de chirurgies d’affirmation du genre pour correspondre à leur « véritable genre ».

Madame Rowling a fait les frais d’une campagne de diabolisation et d’intimidation, qui reflète bien ce que subissent les femmes qui contestent cette redéfinition du mot « femme ».

Les accusations de « TERF » (trans-exclusionary radical feminist) auxquelles vous faites écho dans votre article, ne sont pas anodines. Elles valent aux femmes qui sont visées par cet anathème des menaces de mort, des congédiements, des mises au ban de la société. Ce climat de censure sans précédent est extrêmement malsain et ne profite à personne.

Prendre en considération le ressenti des personnes transgenres est tout à fait louable. Mais cela ne peut pas se faire en niant la notion de sexe biologique, et en piétinant le ressenti et les droits des femmes.

Réponse de Chantal Guy

Chères membres de PDF-Québec, je n’ai pas cru bon de vous questionner, car le sujet de ma chronique n’était pas d’opposer deux visions sur le sujet – nous savons que là-dessus, il y a des positions irréconciliables –, mais bien d’interroger des personnes transgenres, et très spécifiquement des personnes transgenres fans de la série Harry Potter, afin de comprendre pourquoi les propos de J. K. Rowling pouvaient les heurter. Cela dit, vous êtes tout à fait libres de répliquer à cette chronique et d’être en désaccord avec les affirmations des personnes interrogées, c’est à cela que sert notre section.
— Chantal Guy

> Lisez « J. K. Rowling vue par quatre (ex) -fans transgenres »