Le Dow Jones pourrait chuter de 90% et se ramasser à seulement 1000 points. Quand? D'ici 2012.

Qui est l'auteur de cette prédiction apocalyptique? L'économiste et stratège Ian Gordon, de la firme canadienne Longwave Group. Il base sa prédiction déprimante sur la théorie des longs cycles économiques élaborée, à l'époque de Staline, par l'économiste russe de renom Nikolaï Kondratiev. Cette théorie du long cycle divise en quatre «saisons» une période économique de quelque 60 années.

Selon Gordon, on se dirigerait vers la fin de la dernière phase du long cycle, laquelle phase aurait démarré en 2000. Conséquemment, sa boule de cristal lui indique qu'on va vivre une période de grande déconfiture boursière au fil des trois prochaines années. À cause de quoi? À cause notamment de l'impact négatif du surendettement des pays sur l'économie mondiale et de la déflation qui s'ensuivrait. Le tout couronné par une hausse du taux de chômage, une déprime des consommateurs, un resserrement majeur du crédit. Il est particulièrement préoccupé par l'endettement sans précédent du gouvernement américain, ce qui menacerait d'effondrement le système monétaire basé sur le dollar américain.

Vous le trouvez farfelu, ce Ian Gordon? Sachez qu'en 2003, il avait prédit que le prix de l'or allait littéralement exploser au cours des prochaines années. L'or se négocie aujourd'hui au-dessus des 1100$US l'once, trois fois le prix moyen de 2003.

Sachez également que Walter Zimmermann, autre analyste et grand amateur de la théorie des longs cycles de Kondratiev, avait prédit avec aplomb, en 2007, la chute du baril de pétrole à 35$US, laquelle est survenue au début de 2009. En juillet 2008, il avait atteint les 147$US le baril.

Dans son livre publié en 2004 sous le titre The Next Great Bubble Boom, le gourou américain Harry S. Dent a prédit qu'à partir de 2011, la Bourse allait connaître une méchante déconfiture. Et celle-ci se poursuivrait jusqu'en 2022!

Ce qui me rassure dans cette autre prédiction apocalyptique, c'est le fait que M. Dent se soit royalement trompé dans ses prévisions de la phase haussière qui devait précéder l'éventuelle débandade de 2011.

Selon Harry Dent, le Dow Jones devait franchir entre 2005 et la fin de cette année la barre des 40 000 points et le NASDAQ, la barre des 20 000 points. Le Dow Jones a touché son sommet historique (14 165 points) en octobre 2007, alors que le NASDAQ atteignait le sien en mars 2000 (5048 points).

Et à vrai dire, on est mal partis pour atteindre les sommets anticipés par le gourou Dent: le Dow Jones se négocie de ce temps-ci autour de la barre des 10 400 points et le NASDAQ, à 2250 points.

La réalité

Passons maintenant à la réalité boursière. Après la magistrale déconfiture de 2008, nous avons eu droit en 2009 à une enrichissante embellie boursière. Et, si l'on se fie à la majorité des stratèges des maisons de courtage, la hausse de 2009 devrait se poursuivre de plus belle en cette année 2010.

Le stratège Vincent Delisle et son collègue Hugo Sainte-Marie, du service de recherche de Scotia Capital, viennent de disséquer en deux phases la fabuleuse hausse boursière survenue depuis le creux de mars 2009, soit la phase allant de mars à septembre et celle d'octobre à aujourd'hui.

Entre le creux boursier du début de mars 2009 et aujourd'hui, le principal indice de la Bourse de Toronto, le S&P/TSX, a grimpé de quelque 54%. La Bourse américaine a mieux: le S&P 500 de la Bourse de New York a monté de 60% et le Russell 2000, de quelque 79%. L'indice international des marchés émergents (MSCI EM) a explosé durant cette même période de 91%.

Qu'ont constaté les analystes de Scotia Capital? Le gros de cette fameuse hausse des 11 derniers mois est survenu au cours de la phase de six mois échelonnée de mars à septembre. Depuis octobre, la Bourse végète carrément.

À preuves, le TSX a gagné 51% de mars à septembre 2009 et seulement 3% depuis octobre dernier. Pour sa part, le gain de 60% du S&P 500 se divise comme suit: 56% de mars à septembre, et à peine 4% depuis octobre. Après avoir grimpé de 76% jusqu'en septembre, l'indice Russell 2000 des PME américaines affichait un modeste gain de 3% par la suite.

La magistrale hausse de 91% du MSCI EM des marchés émergents se partage à hauteur de 88% pour la période de mars à septembre, laissant un maigre 3% pour la seconde phase.

En dépit de l'état végétatif de la Bourse depuis octobre dernier, les analystes de Scotia Capital restent optimistes pour l'année en cours et s'attendent à une belle performance, notamment de la part de la Bourse américaine.

Ouf! Que les Gordon et Dent de ce monde se le tiennent pour dit.