Ma mère est morte l’an dernier d’un cancer fulgurant à l’âge de 80 ans. Ma grand-mère, ma tante et mon oncle n’ont jamais atteint ce cap, le cancer les a fauchés avant. Ma cousine, elle, n’avait pas 50 ans… Le cancer fait malheureusement partie de mon histoire familiale. Je me suis demandé ce que je pouvais faire pour améliorer mes chances de vieillir en bonne santé.

J’ai découvert que les avancées dans le domaine de la longévité sont hallucinantes. Je ne parle pas de la chirurgie esthétique qui donne l’illusion d’une jeunesse éternelle. Non, je parle d’ajouter plusieurs « vraies » années à sa vie.

Un peu partout dans le monde, surtout aux États-Unis, on investit des milliards de dollars dans la recherche sur la longévité et l’antivieillissement : reprogrammation cellulaire, modifications génétiques, développement de molécules qui réparent les cellules et renversent le vieillissement. Parmi les avancées les plus récentes : une pilule qui simule l’entraînement physique chez les souris, développée par un chercheur de l’Université de la Floride. Perdre du poids et se faire des muscles sans effort, c’est peut-être pour bientôt !

Financée par de généreux fonds d’investissement, la science s’attaque à la vieillesse sur tous les fronts. À elle seule, l’Arabie saoudite investit jusqu’à 1 milliard de dollars américains par année par l’entremise du fonds Hevolution. En mars, des experts dans le domaine de la longévité participeront à un sommet en Floride. Au programme, des conférences aux titres évocateurs : « Peut-on ralentir et inverser le vieillissement ? », « Jeune pour toujours », « Ralentir au maximum la vitesse du vieillissement biologique ». La vieillesse, pour plusieurs, est devenue une « maladie » qu’il faut éradiquer. À tout prix.

On est encore loin du jour où on pourra rencontrer les arrière-petits-enfants de nos arrière-petits-enfants, mais il y a des informations précieuses à tirer de cette quête d’éternité. Des principes que le commun des mortels peut appliquer dans son quotidien et qui feront une réelle différence dans 10, 20 ou 30 ans.

Comme le dit le DLouis Bherer, directeur du centre EPIC de l’Institut de cardiologie de Montréal, rencontré pour ce dossier : « On nous apprend à prévoir notre vieillesse en investissant dès un très jeune âge dans notre REER, pourquoi n’applique-t-on pas le même principe pour notre santé ? »

Courir à 100 ans

« Je pense que mon fils de 6 ans fait partie de la première génération d’immortels », me lance Mario Tremblay. Le fondateur de l’entreprise RobotShop est conscient que ses propos en feront sourciller plusieurs. Il a quand même accepté de me parler parce que la longévité est un sujet qui le passionne. Son objectif ? Vivre jusqu’à 120, voire 150 ans. En santé.

Il y a quelques années, l’entrepreneur a lancé MedFuture, avec pour but d’offrir des services médicaux pour aider les gens à vivre en santé plus longtemps. Au départ, l’idée était d’ouvrir une clinique ayant pignon sur rue. « Je n’avais pas les services que je voulais dans le privé », m’explique cet ingénieur de formation qui a consacré plusieurs années à s’informer sur le sujet. Mais l’homme d’affaires s’est heurté aux règles strictes qui encadrent la pratique de la médecine au Québec, fort différentes de celles des États-Unis où on trouve beaucoup de ces cliniques de « longévité ». Une des plus connues, Fountain Life, s’apprête d’ailleurs à ouvrir une succursale à Toronto. Son slogan : « 100 ans est le nouveau 60… »

Les cliniques de longévité proposent sensiblement les mêmes services, à prix fort : un bilan complet de votre santé (prises de sang, scan, ostéodensitométrie, analyse du microbiote, etc.) accompagné d’un programme taillé sur mesure pour vos besoins. « Les Québécois qui souhaitent avoir accès à ce genre de médecine doivent faire du tourisme médical », se désole Mario Tremblay.

À l’heure actuelle, MedFuture est une plateforme numérique qui propose à ses clients un programme personnalisé basé sur leur bilan sanguin. « D’ici quelques semaines, précise Mario Tremblay, on sera en mesure d’offrir des suppléments alimentaires personnalisés selon l’analyse de vos biomarqueurs. Et si tout se passe bien, d’autres services s’ajouteront au fil du temps. »

Mario Tremblay applique ce qu’il prône. « Je mets les chances de mon côté », dit-il. Sa priorité : le sommeil. « Je vais au lit vers 20 h 30 et je me protège de la lumière bleue en soirée. » Il mange tôt – vers 17 h – pour laisser le temps à son métabolisme de digérer avant de se coucher. Il se permet un verre de vin à l’occasion. « L’idée n’est pas d’éliminer les plaisirs, mais les comportements destructeurs », précise-t-il.

Levé à 5 h, Mario Tremblay commence doucement la journée par un peu de luminothérapie, de méditation et d’écriture dans son journal. « Il faut se prioriser avant de répondre aux demandes des autres », affirme-t-il. Adepte du régime méditerranéen, il pratique le jeûne intermittent et s’entraîne (un mélange de cardio, de musculation et d’exercice d’équilibre), mais il a abandonné tous les sports extrêmes comme le parachutisme qu’il pratiquait plus jeune, question de réduire les risques d’accident.

En plus de suivre ce régime de vie assez exigeant, il ingère entre 30 et 40 suppléments quotidiennement, qu’il fait fabriquer selon ses propres paramètres, établis d’après la mesure de ses biomarqueurs.

Il faut le dire, la question des suppléments est controversée. Les champions de la longévité en font la promotion, mais les effets peuvent varier selon les individus.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Le DLouis Bherer, directeur du centre EPIC de l’Institut de cardiologie de Montréal

Une personne qui a des carences peut bénéficier d’un supplément de vitamine ou de minéraux, mais il est difficile de prédire l’effet chez une personne sans carence.

Le DLouis Bherer, directeur du centre EPIC de l’Institut de cardiologie de Montréal

Le DBherer reconnaît toutefois que les découvertes dans le domaine se bousculent. L’étude COSMOS, publiée en décembre dernier, révèle par exemple que la prise quotidienne de multivitamines peut avoir un impact positif sur la mémoire des 60 ans et plus. La metformine, un médicament prescrit pour le diabète de type 2, aurait des propriétés protectrices antivieillissement. La rapamycine, le resvératrol et le NAD, ou nicotinamide adénine dinucléotide, pour ne nommer que ceux-là, font également partie de la pharmacopée des champions de la longévité pour leurs supposés impacts positifs sur l’énergie et contre le vieillissement. « La recherche avance, observe le DBherer. J’aurais envie de vous dire “stay tuned”… »

Mario Tremblay, lui, fait une distinction entre son âge chronologique et son âge métabolique, qu’il attribue à son mode de vie strict et à la prise de suppléments. « J’ai 52 ans, mais j’ai le métabolisme d’un homme de 41 ans, lance-t-il. À 50 ans, j’ai reçu un diagnostic d’arthrose cervicale et mon médecin m’a conseillé d’arrêter de courir. J’ai plutôt cessé le médicament contre l’arthrose qu’il m’avait prescrit et couru 50 km, me raconte-t-il. Mon objectif, c’est d’ajouter un kilomètre par année jusqu’à 100 ans… pour pouvoir courir avec mon fils. »