Moins de 24 heures après la nomination de son directeur artistique Geoffrey Gaquère à la tête du Conservatoire d’art dramatique de Montréal, le théâtre Espace libre annonce l’embauche du jeune acteur et metteur en scène Félix-Antoine Boutin pour lui succéder.

Les têtes bougent dans les théâtres montréalais ces jours-ci ! Après l’annonce des départs d’Olivier Kemeid du Quat’Sous, de Ginette Noiseux d’Espace GO et de Danièle de Fontenay de l’Usine C (remplacée par Angela Konrad), au tour de Geoffrey Gaquère de quitter Espace libre, qu’il dirigeait depuis 2014.

L’acteur et metteur en scène d’origine belge – formé en jeu au Conservatoire de Bruxelles et ici, à l’École nationale de théâtre – dirigera le Conservatoire d’art dramatique de Montréal dès le 9 janvier, en remplacement de Benoît Dagenais, qui dirigeait l’école de théâtre depuis 2012, et qui a annoncé sa retraite.

Geoffrey Gaquère nous avoue que sa décision de quitter Espace libre était prise depuis le printemps dernier. « J’étais arrivé au bout du projet que j’avais déposé, dit-il. Et puis après deux ans et demi de pandémie et de travaux de maintien des actifs, j’avoue qu’il y avait un petit essoufflement de ma part. Je n’avais rien prévu encore. »

Dans les faits, le poste du Conservatoire a été affiché il y a à peine un mois, tout s’est donc passé très vite. Mais Geoffrey Gaquère a eu envie de mettre le pied à l’étrier.

« C’est l’idée de la transmission qui me plaisait, dit l’acteur et metteur en scène de 47 ans. Après avoir été en contact avec la relève, je me suis senti outillé pour préserver, animer, allumer la flamme de la passion des jeunes. J’avais aussi envie de travailler avec eux dans un contexte post-pandémique, qui est difficile. Pour nourrir l’espoir. »

Sous sa direction, le financement d’Espace libre a doublé, tandis que son auditoire a augmenté de 25 %.

Je suis fier d’avoir préservé l’âme de ce théâtre. Cet espace de totale liberté pour les artistes. Cet espace que je considère plus comme une maison de théâtre. Les artistes habitent cette maison. On a préservé cette authenticité, cet ADN, qui nous vient des fondateurs [Jean-Pierre Ronfard et Robert Gravel], un humanisme, un rapport à l’autre dans le respect de l’artiste, de l’œuvre, tout ça dans un esprit festif.

Geoffrey Gaquère, directeur artistique d’Espace libre

Félix-Antoine Boutin porte le flambeau

Cet accueil et cet humanisme dont parle Geoffrey Gaquère, Félix-Antoine Boutin les ont expérimentés lorsqu’il a présenté son Histoire populaire et sensationnelle à Espace libre. « On s’est vraiment sentis à la maison », raconte l’acteur, metteur en scène et directeur artistique de 33 ans, qui entrera en fonction le 1er février prochain.

C’est pour cette raison qu’en voyant l’annonce du poste de directeur artistique, Félix-Antoine Boutin, qui a fondé sa compagnie Création dans ta chambre à sa sortie de l’École nationale de théâtre en 2012, s’est senti interpellé.

« J’étais dans le métro et j’ai eu chaud, raconte-t-il. Parce que ça m’habitait. Je me voyais dans ce rôle-là, dans ce théâtre-là. Donc, je me suis prêté à l’exercice. Je vais travailler dans la continuité de ce que Geoffrey a fait. » D’ailleurs la saison 2023-2024 a déjà été planifiée.

Félix-Antoine Boutin, qui a signé des créations assez originales – Koalas, Message personnel – mais aussi des installations et des évènements – Orphée Karaoké, Pyjama Party –, a-t-il un plan en tête ? À quoi peut-on s’attendre de sa part ?

« J’aime les chocs esthétiques, la prise de risques, les expériences uniques et les formats inhabituels, répond le futur directeur artistique d’Espace libre, donc je vais aller dans ces directions-là, mais je vais continuer de travailler en équipe, d’être à l’écoute des artistes et de tendre la main aux gens du quartier, comme Geoffrey l’a fait. »

Comme Geoffrey Gaquère au Conservatoire, Félix-Antoine Boutin va continuer à travailler sur les projets de sa compagnie (avec Julie Basse, Odile Gamache, Gabriel Plante), qu’il pourrait présenter à Espace libre. « Mais je veux vraiment mettre de l’avant le travail des autres artistes, dit-il. Mon but n’est pas de m’autoprésenter chaque saison. Si j’ai à le faire, ce sera pour des projets plus ambitieux, porteurs pour Espace libre. »

Pareil pour Geoffrey Gaquère qui, comme Benoît Dagenais, pourrait bien jouer dans des productions ou faire des mises en scène – même si son temps sera compté. « Ça me forcera à faire des choix », évalue-t-il.