Jointe par La Presse mardi après-midi, Luce Rozon, la sœur du fondateur de Juste pour rire, Gilbert Rozon, se désole de l’annonce de la mise sous protection des créanciers par le Groupe Juste pour rire et de l’annulation de la prochaine édition du Festival.

« C’est une grande perte pour le Québec. En apprenant la nouvelle mardi matin dans La Presse, j’ai eu un choc énorme, dit-elle. Pas seulement à titre personnel, comme Québécoise aussi. Après la vente du Cirque du Soleil, c’est un autre fleuron québécois qu’on laisse aller », dit celle qui a travaillé 30 ans pour le festival et les productions en salle de JPR.

Mme Rozon se rappelle que le Festival et son volet anglophone ont attiré des milliers d’artistes et d’humoristes du monde entier en 40 ans. Et de grosses pointures, comme Jim Carrey et Jerry Seinfeld, qui ont été en vedette dans les premiers galas de Just for Laughs à Montréal.

Je ne suis pas cynique. Je suis triste, car je ne m’explique pas ce qui s’est passé pour en arriver à la décision de cesser toutes les activités.

Luce Rozon

Luce Rozon ne croit pas aux raisons évoquées pour expliquer les difficultés de Juste pour rire. Le communiqué de la haute direction cite, entre autres, la pandémie et la forte poussée inflationniste qui a suivi : « J’ai une compagnie de production et j’ai traversé la crise sans aucune subvention », dit celle qui a lancé en 2018, avec sa sœur Lucie Rozon, Les Agents Doubles (Slava Snowshow, La nuit de la Déprime, Aux grands maux, les grands discours…).

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Les sœurs jumelles Lucie et Luce Rozon (à droite), à l’époque où elles travaillaient au festival et aux spectacles du Groupe Juste pour rire.

Plus de pilote à bord

Luce Rozon ne veut pas blâmer les partenaires actuels à la tête de l’entreprise depuis 2018 (le promoteur evenko, Bell Media et Creative Artists Agency). Toutefois, elle estime qu’on a tué l’âme de Juste pour rire. « Tous les organes de l’entreprise fonctionnaient, mais il n’y avait plus de cœur », illustre-t-elle, en évoquant son frère et ex-patron de JPR, qui fait toujours l’objet de poursuites au civil.

« À l’époque, il y avait un pilote, un maître à bord. Gilbert inspirait toute une équipe aguerrie et insufflait une audace et une créativité au Groupe Juste pour rire. Il a imaginé un festival familial et fédérateur. On était une centaine et on travaillait tous ensemble dans la même direction. »

À savoir si les allégations et les témoignages de victimes contre son frère ont entaché la marque à jamais, Mme Rozon se fait plus avare de commentaires : « Gilbert a été disculpé de toutes les accusations [au criminel]. Je le soutiens et je le soutiendrais toujours à 100 % ».

Luce Rozon n’a pas appelé son frère aujourd’hui. Elle précise que bien que sa famille soit abattue, elle est surtout peinée pour tous les gens qui perdent leur emploi. « C’est sûr que c’est difficile de voir ça mourir. Mais la famille vit son deuil depuis des années déjà. »