Le MiniFest s’est longtemps enorgueilli d’être un des plus petits festivals d’humour à Montréal. Avec l’annulation de Zoofest, et la mise sur pause du DMobilo Aquafest, l’évènement devient par défaut une des rares tribunes estivales pour le rire en marge. Coup d’œil à sa programmation.

« Quand on a lancé le projet, la phrase qu’on se répétait entre nous, c’est que ce n’était même pas obligé de marcher, le MiniFest », se souvient en riant François Tousignant, président fondateur du festival d’humour alternatif, qui doit lancer officilement sa programmation jeudi soir et dont Catherine Ethier et Alexandre Champagne comptent parmi les têtes d’affiche.

Là, cette année, il faut que ça marche, parce que si on se plante, il n’y a rien d’autre.

François Tousignant, président fondateur du MiniFest

Du 13 au 23 juin se déroulera donc « le seul festival d’humour à Montréal », un slogan efficace, presque véridique, le seul autre happening comique à l’agenda de la belle saison étant EXCLAM, où l’humour se conjugue aux nouvelles technologies. Sa deuxième édition, qui devait se tenir en mai, migrera peut-être en juillet, a suggéré son cofondateur Grégoire Furrer, à la suite de l’annonce de l’annulation de Juste pour rire et de Zoofest, son incubateur dont auront émergé plusieurs nouvelles figures majeures de la chose drôle.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Philippe Cigna et Mathieu Séguin

Chose certaine : alors que Montréal comptait l’été dernier cinq festivals d’humour, le buffet se fera cette année beaucoup moins abondant. En entrevue avec La Presse, Philippe Cigna, qui a mis sur pied en 2016 le DMobilo Aquafest avec son camarade de Sèxe Ilégal Mathieu Séguin, ainsi qu’avec Adib Alkhalidey, Virginie Fortin et Guillaume Wagner, confirme que l’évènement prend une pause d’une durée indéterminée.

L’humoriste, qui a porté à bout de bras la dernière édition avec Mathieu Séguin, plaide une fatigue compréhensible, indissociable d’un accaparant travail bénévole. « J’étais en train de devenir plus un producteur qu’un artiste », résume-t-il. Le festival, auquel ont participé les Arnaud Soly, Katherine Levac et Mona de Grenoble, survivait sans subvention ni commanditaire majeur.

« On a fondé le Mobilo parce qu’on voulait un espace à nous et que Juste pour rire opérait un monopole, rappelle-t-il. Et la bonne nouvelle, c’est que depuis, il y a eu plein d’initiatives dans le genre du Mobilo, plein de projets, de soirées créées par les artistes eux-mêmes. Et je pense que c’est vraiment meilleur pour une culture d’avoir plein de plus petits choix qu’une seule grosse affaire. »

MiniFest à la rescousse

En 2016, l’humoriste François Tousignant et ses collaborateurs créaient le MiniFest afin de juguler certaines frustrations engendrées chez eux par le Zoofest, notamment quant aux cachets – ce qui explique qu’encore à ce jour, 65 % du prix d’un billet au MiniFest soit remis directement aux artistes. Mais de la mort de Zoofest, cet important tremplin pour la relève humoristique, lui aussi emporté par les déboires financiers de Juste pour rire, personne au MiniFest ne se réjouit.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

François Tousignant, fondateur du MiniFest

Il y a plein de gens qui nous ont dit avec un petit sourire malin : “la fin de Zoofest, ça va être bon pour vous autres”, et pour moi, la règle, ç’a toujours été qu’en humour, le succès des uns rejaillit sur les autres.

François Tousignant

« Une grosse machine comme Juste pour rire et Zoofest avait la capacité d’attirer l’attention sur l’humour, de faire découvrir des visages », souligne-t-il.

L’édition 2024 du MiniFest aura pu attraper au vol une dizaine de spectacles inscrits au tableau de Zoofest, ce qui demeure bien peu, mais comme le précise le fondateur, « on ne peut pas amortir l’ensemble d’une programmation aussi pesante ».

Diversité plurielle

Composé de 78 spectacles présentés à 9 adresses de l’arrondissement de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve, le MiniFest accueillera certes quelques figures établies, mais demeurera ce lieu de découvertes et d’expérimentation, fier de donner voix au chapitre à ceux et celles que l’on oublie trop souvent. Le 20 juin, la soirée « L’âge de dérision » réunira par exemple des humoristes d’un certain âge.

PHOTO PHILIPPE BOIVIN, ARCHIVES LA PRESSE

Catherine Ethier participera au MiniFest

« Depuis trois, quatre ans, il y a de plus en plus de femmes retraitées qui s’inscrivent au cours du soir de l’École nationale de l’humour », observe François Tousignant, qui y enseigne.

Quand on parle d’inclusion, il ne faut pas juste penser aux personnes racisées ou aux personnes de la diversité sexuelle, mais essayer d’aller chercher des humoristes qui ont un chemin de vie différent.

François Tousignant

Le président du MiniFest adhère à ce que plusieurs observateurs du milieu ont souligné à la suite de l’annonce de l’annulation du festival Juste pour rire : le monde de l’humour n’a, paradoxalement, jamais été aussi bouillonnant et hétérogène.

« On sent de façon générale qu’il n’y a jamais eu autant de gens qui s’intéressent au stand-up, que l’offre n’a jamais été aussi variée, dit-il. Dans le nombre d’humoristes, dans l’originalité, dans la qualité, il y a indéniablement une effervescence. C’est pour ça que ça ne nous dérangerait vraiment pas de redevenir le troisième ou quatrième festival d’humour à Montréal. »

MiniFest, du 13 au 23 juin

Consultez le site du festival

Trois spectacles à voir au MiniFest

Défricher Deschamps

Ce spectacle imaginé par Christian Vanasse, avec la bénédiction du père de l’humour québécois, donnera à lire à ceux et celles dont monsieur Yvon s’est payé la tête – les femmes, les jeunes, les pauvres et les minorités sexuelles – certains de ses textes les plus marquants.

Le 13 juin à la maison de la culture Maisonneuve

60 filles sur le pacing

Emna Achour et Coralie LaPerrière ont créé la page Instagram Pas de filles sur le pacing afin de cataloguer tous les évènements sur l’alignement duquel ne figurent que des gars. Quoi de mieux pour prouver que d’engager des femmes ne demande pas d’efforts surhumains que d’en réunir 60 pendant autant de minutes ?

Le 16 juin au Studio PJE

Les vrais vétérans de l’humour

Vous entendez vétérans de l’humour et pensez tout de suite à Daniel Lemire ou à Lise Dion, mais cette soirée tendra plutôt son micro à des vétérans des Forces armées canadiennes, qui ont tous suivi une formation en écriture comique, et pour qui le rire a été un salutaire outil de guérison.

Le 21 juin au Bistro Le Ste-Cath