Deux ans et demi après avoir été la cible d’allégations d’inconduites sexuelles, Julien Lacroix s’est confié à l’animateur Stéphan Bureau à l’émission Le monde à l’envers, à TVA.

Il s’agissait pour l’humoriste de son premier passage à la télé depuis qu’il a été dénoncé par neuf femmes en juillet 2020 dans le cadre d’une enquête du Devoir. Visiblement mal à l’aise devant l’animateur, l’humoriste de 30 ans a admis avoir peur, mais a précisé qu’il s’agissait de la raison pour laquelle il avait accepté l’invitation. « Je suis tanné d’avoir peur de parler, d’avoir peur de remonter sur scène, d’avoir peur de me promener dans la rue, c’est pourquoi je suis assis ici », a-t-il dit.

Il a aussi reconnu qu’il était impossible pour lui de retourner à sa vie d’avant, s’empressant aussitôt d’ajouter que c’était tant mieux, pour certaines raisons bien évidentes. « Mais je veux essayer de passer à une prochaine étape au niveau personnel et professionnel, pour moi, mes proches, mais aussi pour ces personnes éclaboussées chaque fois qu’on parle de ça », a-t-il dit en faisant référence à celles qui l’ont dénoncé – certaines ont depuis nuancé leurs propos, notamment dans un reportage de La Presse et du 98,5 FM paru en novembre dernier.

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C’est quand Stéphan Bureau a demandé à Julien Lacroix s’il en voulait au Devoir que l’humoriste s’est montré le plus combatif, soutenant qu’il avait sans doute été emporté par le ressac de la vague #metoo. « Je dénonce la mauvaise foi du Devoir, car je crois qu’ils ont fait un travail pour recueillir des clics, a-t-il dit. Après les accusations d’agresseurs comme Harvey Weinstein, c’est devenu comme une mode de faire des enquêtes dans le même genre… Et il n’y a pas de mode d’emploi qui dit comment réagir : si tu nies, tu n’as pas l’air de prendre ça au sérieux, et si tu prends la responsabilité, ce que j’ai fait, tu deviens un pédophile ou un violeur en série. Et il y a malgré tout une branche de gens qui n’accepteront jamais mes excuses… »

Émotif

Le ton de l’entrevue est toutefois resté généralement posé, le malaise de l’humoriste, vêtu d’un simple t-shirt blanc, faisant parfois place à une émotion plus sentie, notamment quand on lui a demandé s’il avait raconté son histoire à ses trois jeunes frères : « C’est aussi difficile de leur en parler que d’en parler à mon garçon quand il va comprendre », a-t-il dit en retenant ses sanglots.

On l’a aussi senti émotif quand il a fait référence aux jeunes garçons qui ont pu se retrouver dans une situation semblable à la sienne.

C’est dangereux, ce qui se passe. Je comprends tout à fait le fond de la chose, mais je pense qu’on a eu soif de sang, de noms, on voulait un spectacle. Et j’y participe parce que je suis ici ce soir, mais il faut se pencher sur ce qu’on veut léguer aux jeunes garçons qui ont peur en ce moment.

Julien Lacroix

Quant à la suite de sa carrière, Julien Lacroix entend poursuivre ses démarches pour retourner sur scène, lui qui a indiqué avoir perdu un emploi dans l’entreprise familiale parce que des gens n’étaient pas à l’aise avec sa présence. « Je n’ai pas le choix, pour moi, mon garçon, car ce travail, c’est moi qui vais me battre pour le retrouver », a-t-il dit avant d’ajouter plus tard dans l’entrevue qu’il n’avait aucunement envie de jouer les victimes. « Je veux être honnête ici comme je le suis sur scène et avec mes proches, a-t-il soutenu. Mais je suis content que la colère s’atténue, et j’ai envie d’avancer dans la vie. »

Après avoir tenté un premier retour en juillet – annulé après qu’il a été la cible de menaces –, Julien Lacroix a finalement retrouvé la scène à Montréal les 21 et 22 décembre, dans un bar d’Hochelaga-Maisonneuve dont l’emplacement avait été dévoilé aux détenteurs de billets 24 heures à l’avance. D’autres spectacles, dont certains affichent déjà complet, sont prévus à Montréal, Saint-Lazare et Saint-Eustache au cours des prochains mois.