Tout ça a commencé bien avant les réseaux sociaux, lors de ces longs dimanches ennuyeux chez ma grand-mère quand j’étais enfant, à lire ses piles de magazines à potins pendant que les adultes papotaient. Échos Vedettes, Le Lundi et Paris Match ont fait mon éducation sur la famille royale britannique ou celle de Monaco (ainsi que sur la vie de Michèle Richard) et cela a des conséquences dans mes lubies.

Quand les rumeurs prennent de l’ampleur autour des stars de ce monde, je n’arrive pas à les ignorer, parce que ce sont des trous noirs qui aspirent tout le reste. Avec la « disparition » de Kate Middleton, épouse du prince William et belle-fille du roi Charles III, destinée à devenir reine un jour, on a atteint de nouveaux sommets – que j’ai grimpés malgré moi, en ayant surtout l’impression de grimper dans les rideaux pour rien.

PHOTO TIRÉE DU SITE TMZ

L’image de Kate Middleton qui a fait taire les rumeurs.

Après des semaines de folles spéculations, on a enfin eu lundi les premières images de Son Altesse Royale depuis son opération à l’abdomen en janvier. Il était plus que temps, car les internautes intéressés par cette histoire commençaient à sombrer dans le délire. Mais est-ce bien Kate ? se demandent ceux qui ne veulent pas décrocher. Pour moi, c’est correct, on va s’arrêter là, la princesse de Galles a l’air en pleine forme.

Dimanche dernier, notre collaboratrice Daphné B. se penchait sur le phénomène du « mystère Middleton » en posant la question : « Avons-nous perdu contact avec la réalité ? »

Lisez l’article de Daphné B.

Pas encore, mais j’ai commencé à en douter quand j’ai actualisé les nouvelles de la famille royale à 6 h un matin. Peut-être parce que cette histoire était beaucoup plus imprévisible que les élections en Russie ? Parce que je n’ai pas envie de lire ceux-là qui défendent Guillaume Lemay-Thivierge, seul artisan de son malheur ?

PHOTO HOLLIE ADAMS, ARCHIVES REUTERS

Depuis la publication, la semaine dernière, d’une photo retouchée d’elle et de ses enfants, la princesse Kate Middleton alimente les manchettes et les rumeurs quant à son état de santé.

On n’avait pas vu Kate Middleton en public depuis Noël et l’annonce d’une opération qui demandait une convalescence jusqu’à Pâques. Les rumeurs ont commencé tôt, parce que dès le départ, on n’a jamais su la nature du problème de santé de la princesse. Premier flou, première brèche, et tout s’emballe. Je me disais que le monde capotait, comme d’habitude, chaque fois qu’il est question de la famille royale. Mais plus le temps passait, moins on avait d’informations sur Kate, et la diffusion d’une photo manifestement retouchée, assez pour que les médias soient obligés de la retirer de leurs publications, a mis le feu aux poudres. Ce ne sont certainement pas les laconiques excuses supposément écrites par Kate Middleton, où elle disait s’amuser parfois à retoucher ses photos, qui ont calmé les ardeurs.

Dans cette dernière phrase, l’utilisation du mot « supposément » confirme que j’ai basculé dans quelque chose. Est-ce elle qui a envoyé la photo ? Est-ce elle qui a rédigé ces excuses concernant les manipulations d’une image ? Mais est-ce vraiment important de le savoir ?

C’est comme ça que je suis tombée dans le trou de lapin, comme on dit. Parce que toute cette frénésie pouvait facilement être stoppée net en montrant seulement Kate faire coucou une fois. C’est bien parce qu’il était si facile de mettre fin aux rumeurs, alors qu’on a multiplié les erreurs de communication, qu’on a fini par penser qu’il y avait forcément anguille sous roche. Sans oublier qu’on regarde ça en ayant plusieurs saisons de The Crown dans le corps.

Je n’aurais pas dû mettre l’orteil dans la multitude de théories qui circulaient. Intervention de chirurgie esthétique ratée, resucée du feuilleton conjugal de Lady Di et du prince Charles, tentative de suicide, maladie mentale, hystérectomie, diversion parce que le cancer du roi Charles serait plus grave qu’on ne le dit, et même assassinat. Les spécialistes cités dans l’article de Daphné B. confirment que la mésinformation est devenue une sorte de divertissement sans frontières idéologiques, on parle de la suspension provisoire de l’incrédulité, comme ce serait le cas au théâtre. Ce sera justement le sujet de la pièce d’Émilie Perreault chez Duceppe en avril, La suspension consentie de l’incrédulité. Précisons que dans ce projet, il sera plutôt question de notre rapport à l’art, et non à ce qu’on croit ou pas sur les réseaux sociaux.

Je suis quelqu’un d’extrêmement terre à terre dans la vie, limite plate et casseuse de party dès qu’il est question de magie ou d’ésotérisme. Les scandales entourant la famille royale sont peut-être ce qui me rapproche le plus de l’esprit complotiste, et je dois avouer que c’est une forme intéressante d’ivresse, sauf que j’approchais dangereusement de la gueule de bois. Une seule image m’a guérie, mais je soupçonne que les véritables accros, eux, vont continuer à alimenter le cirque jusqu’à ce que Kate Middleton reprenne ses fonctions officielles d’Altesse Royale. Rendez-vous au prochain scandale.