Deux colocs, une idée... et Potloc était née.

C'était en 2013. Rodolphe Barrère et Louis Delaoustre étudient alors à HEC Montréal et partagent, comme nombre d'étudiants français, un appartement dans le Plateau Mont-Royal.

Dans le quartier, des commerces naissent, puis meurent, faute d'avoir trouvé leur clientèle. C'est à partir de ce constat que le duo a décidé de se lancer en affaires.

« On voyait des trucs ouvrir et on se disait que ça allait fermer rapidement », se souvient Rodolphe Barrère, cofondateur de Potloc, en parlant de prédictions qui se sont avérées.

Selon lui, les gens du coin savaient pourtant comme eux ce dont avait besoin le quartier. Il fallait simplement trouver une façon d'aller chercher cette information pour que le bon commerce s'implante au bon endroit.

« Ces prédictions, on les avait réalisées juste avec nos deux petites têtes, explique le jeune entrepreneur. Imaginez la puissance de ces prédictions si elles avaient été basées sur l'opinion de 100 ou de 1000 personnes. »

C'est cette idée qui a conduit à la création de Potloc.

Le concept

Au départ, le duo s'installe devant des locaux vacants et interroge les passants pour leur demander quel type de commerce ils verraient bien à cet endroit.

« Ça nous a permis d'obtenir une mine d'or de données qualitatives, explique M. Barrère. C'est ce genre de données dont tout le monde a besoin. »

Le duo transpose ensuite la stratégie sur sa plateforme internet, Potloc.com. Il invite les citoyens à exprimer leurs besoins sur celle-ci.

Selon Rodolphe Barrère, cette façon d'effectuer des études de marché « inversées » répond à l'un des phénomènes qui bousculent actuellement le commerce de détail : la naissance d'un nouveau type de consommateurs, constitué en grande part de milléniaux.

« Les milléniaux consomment différemment, explique-t-il. Ils achètent des histoires et des expériences plutôt que des produits. Ils cherchent aussi des commerces qui présentent des valeurs auxquelles ils adhèrent. »

Selon lui, connaître l'âge, le sexe et le revenu moyen des habitants d'un quartier ne suffit plus pour déterminer si un endroit est propice à l'implantation d'un certain commerce. Des données qualitatives sont nécessaires.

« On pourrait, par exemple, identifier qu'un secteur a besoin d'un café, dit-il, mais les gens qui vont rechercher un café indépendant ne seront pas nécessairement ceux qui voudront d'un Starbucks. Quand on ne fait que de la théorie, on ne peut pas départager les deux. »

L'objectif de l'équipe, qui compte sept employés et prévoit en ajouter sept autres dans les prochains mois, est donc de mettre le « consommateur au centre du processus ». En trois ans d'existence, des dizaines de milliers de personnes ont déjà participé à l'expérience, engendrant de belles réussites, selon le cofondateur de Potloc.

« Après 18 mois, c'est les deux tiers des nouveaux commerces qui sont habituellement encore en vie, explique-t-il. Les commerces indépendants qui sont passés par Potloc ont, eux, un taux de succès de 95 %. »

L'entreprise offre d'ailleurs gratuitement l'accès à sa plateforme aux entrepreneurs qui en sont à leur première expérience. « Aider les entrepreneurs, c'est ce qui fait qu'on se lève chaque matin », indique d'ailleurs M. Barrère.

Pour étendre du beurre sur ses rôties, le cofondateur de Potloc mise sur trois autres types de clients : des villes, des centres commerciaux ainsi que de grandes enseignes. Celles-ci paient pour accéder aux études de marché de Potloc, qui s'appuie sur sa stratégie de collecte d'information et sur ses algorithmes prédictifs pour offrir un service qui se distingue de celui de la concurrence.

Après s'être implantée au Québec, l'entreprise mettra bientôt le pied à Toronto, selon Rodolphe Barrère. Les fondateurs déploieront ensuite leur offre dans leur pays d'origine, la France.