Libéré de la tutelle qui pesait sur son organisation depuis deux ans et demi, l'Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ) reprend le flambeau et réclame une révision de la loi encadrant la profession pour rendre « obligatoire » la surveillance de chantiers de construction.

« Cette révision de la loi [qui date de 1964] est nécessaire et urgente », insiste la présidente de l'Ordre, Kathy Baig, en entrevue avec La Presse.

Elle ajoute : « Actuellement, les donneurs d'ouvrage peuvent dire [sans se justifier] qu'ils ne veulent pas de surveillance sur leurs chantiers. La loi est ainsi rédigée. »

Dans un tel contexte, les ingénieurs sont ainsi tenus à l'écart et ne peuvent donc pas exercer leur travail de vérification comme il se doit.

« Nous avons mis à jour tous nos mécanismes de protection du public. On a complété nos réformes. La prochaine étape, c'est l'adoption d'une loi modernisée pour être en mesure de nous accomplir à notre pleine mesure », explique Kathy Baig.

Un enjeu important

Mais les choses pourraient bientôt changer, avec la tenue d'une commission parlementaire, possiblement à l'automne, devant mener à l'adoption d'un nouveau projet de loi. La ministre de la Justice, Sonia LeBel, se serait montrée sensible aux arguments de l'Ordre, qui représente 66 000 membres.

« Nous demandons au gouvernement de prendre le temps de nous entendre sur cet enjeu important, pour la profession et pour la protection du public, précise Kathy Baig. Nous ne sommes pas les seuls à réclamer des modifications à loi ; d'autres groupes l'ont fait également, tout comme l'Association des firmes de génie-conseil. »

La présidente de l'Ordre espère que cette fois sera la bonne, étant donné que par le passé, la modernisation de la loi sur les ingénieurs a fait l'objet de trois projets de loi, qui sont toutefois morts au feuilleton.

Une profession qui se transforme

La surveillance des chantiers n'est pas le seul enjeu qui préoccupe la présidente de l'Ordre. « Si on insiste pour une loi modernisée, c'est parce que nous avons besoin de cet outil pour tenir compte de la nouvelle réalité au sein de la profession, dont la pratique s'est beaucoup diversifiée et a beaucoup évolué depuis plus de 50 ans. » Par exemple, le génie logiciel et le génie informatique ne sont pas reflétés dans la loi actuelle. 

La relève et la féminisation de la profession sont aussi des enjeux importants. « Le tiers de nos membres a plus de 50 ans. La relève est un enjeu. Nous allons faire une plus grande place aux ingénieurs immigrants dans l'avenir. » Il y a seulement 15 % de femmes ingénieures parmi les membres de l'OIQ. « Nous visons 30 % d'ici 2030. Pour y arriver, nous allons demander à des femmes ingénieures de faire la tournée des écoles secondaires pour inciter les jeunes filles étudiantes à faire le choix d'étudier en génie. »

Question de confiance

La question de la confiance à l'égard de la profession demeure un sujet sensible pour la présidente de l'Ordre. Elle aime rappeler que l'indice de confiance, à partir des sondages menés par son organisation, est « de retour » après avoir chuté à 49 % durant les travaux de la commission Charbonneau. « Avant la Commission, soumet-elle, l'indice était à 69 % ; il est maintenant à 73 % », indique Kathy Baig.