Non seulement il redistribue des ressources au sein de l’écosystème économique du Lac-Saint-Jean, mais il permet également à des individus à situation particulière d’intégrer ou de réintégrer le marché de l’emploi. Pour l’organisme Réemploi+, la revalorisation n’est pas qu’une histoire de matériaux recyclés : elle revêt aussi une dimension humaine.

« Notre mission, c’est de détourner l’enfouissement des matières des entreprises ayant encore un potentiel de réemploi. C’est aussi la valorisation des personnes : on permet aux gens qui ont des défis d’intégration à l’emploi de contribuer au développement socio-économique dans notre région », affirme Katia Girard, directrice générale de Réemploi+.

En activité depuis l’automne 2021, Réemploi+ travaille en étroite collaboration avec la Régie des matières résiduelles (RMR) du Lac-Saint-Jean.

L’organisme a été créé pour répondre au Plan de gestion des matières résiduelles émanant justement de la RMR, qui vise à atteindre des cibles établies par le ministère de l’Environnement.

En 2023, on a cumulé 372 tonnes de matières détournées de l’enfouissement. Ça a en majorité pris le chemin de résidences privées, ce qui veut dire qu’on a trouvé quelqu’un qui a acheté le produit.

Katia Girard, directrice générale de Réemploi+

D’abord, Réemploi+ récupère les matériaux dans l’un de ses six Dômes R+, qui sont eux-mêmes installés dans les écocentres du Lac-Saint-Jean. La livraison est faite sur 240 km grâce à une optimisation des routes de camion en partenariat avec le Groupe Coderr, avant que les produits soient traités en atelier puis remis en vente à moindre coût dans ses trois quincailleries.

La quincaillerie principale se trouve à Alma, mais le groupe est également présent à Dolbeau-Mistassini et à Roberval depuis l’automne dernier.

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En plus de ses 32 employés réguliers, Réemploi+ a accueilli 107 personnes à besoins particuliers ou en réinsertion sociale en 2023. Elles peuvent rester quelques semaines ou de façon permanente, selon leurs besoins.

PHOTO FOURNIE PAR RÉEMPLOI+

Katia Girard est directrice générale de Réemploi+.

Ces individus proviennent de différents horizons : maisons de transition, centres jeunesse, centres carcéraux, centres de réadaptation en déficience intellectuelle... mais une fois arrivés, « on n’a pas de mesures spécifiques pour ces personnes-là, on fait juste les accueillir, explique Katia Girard. Pas d’obligation de rentabilité, puis une adaptation en fonction des objectifs et de la volonté de la personne ».

L’entreprise compte désormais plusieurs petites réussites. Deux participants à handicaps lourds qui s’y trouvent depuis un an, par exemple, ont gagné de l’autonomie à un point où ils ne doivent plus constamment être accompagnés. Ils se sentent utiles et accomplis.

Une autre personne, pour qui le marché du travail habituel représentait un défi en raison de sa situation personnelle et mentale, travaillait seulement dans l’entrepôt ou la réception... « Aujourd’hui, cette personne fait le même travail qu’un commis », se réjouit Mme Girard.

« Ça amène une ambiance vraiment particulière qu’on ne retrouve pas ailleurs, poursuit-elle. On enlève beaucoup d’étiquettes et de paramètres, [...] ça amène une dimension humaine particulière. »

Autrement, questionnée sur la réponse de la population à la présence de Réemploi+, Katia Girard appelle à un « changement de paradigmes de consommation » concernant le cycle de vie des matériaux. Selon elle, la situation peut encore s’améliorer.

« Les friperies, ça fait plusieurs années que c’est passé de “lutte contre la pauvreté” vers “façon de consommer”. Du côté des matériaux de construction, ce n’est pas encore acquis que la boîte de céramique supplémentaire de son projet de rénovations, on peut venir la porter chez Réemploi+. »