La COVID-19 a forcé l’annulation des missions, des foires et des rencontres commerciales à l’étranger. Plutôt que de prendre l’avion, les PME exportatrices trouvent désormais de nouveaux clients devant leurs ordinateurs.

Avec la fermeture des restaurants pour éviter la propagation du coronavirus, l’entreprise Grandma Emily a perdu plusieurs clients. Cette PME, qui produit céréales, barres tendres et autres collations, voyait fondre une partie de son marché aux États-Unis, qui représentent environ la moitié de son chiffre d’affaires.

Elle s’est aussitôt attelée à trouver de nouveaux acheteurs au sud de la frontière. Mais avec la COVID-19, tous les salons de l’alimentation étaient sur pause. Qu’à cela ne tienne, Corey Eisenberg, président de Grandma Emily, a ouvert sa webcaméra. Il s’est inscrit à des évènements virtuels organisés par des entreprises qui mettent en communication des fournisseurs et des acheteurs par l’entremise de leurs plateformes numériques.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Grandma Emily produit céréales, barres tendres et autres collations.

Devant son ordinateur, il a ainsi multiplié les entretiens éclair d’une dizaine de minutes pour parler de ses produits et montrer son catalogue. Pas de doute, Corey Eisenberg préfère les réunions en personne. « Les gens pouvaient goûter les aliments devant nous et nous pouvions voir leur réaction, alors que nous devons maintenant leur faire livrer des échantillons », explique-t-il.

Néanmoins, les rencontres virtuelles ont permis à Grandma Emily de joindre une variété d’acheteurs, de conclure des ventes avec de nouveaux clients américains et de compenser en partie la perte de ceux du secteur de la restauration. « Ce n’est pas la formule idéale, mais c’est une bonne solution pour le moment. Autrement, on n’aurait pas eu de contacts avec les acheteurs. »

Formules « hybrides »

Martin Lavoie, président-directeur général du Groupe Export agroalimentaire, croit que ces nouvelles démarches adoptées par défaut présentent des inconvénients, mais aussi des avantages. « Il y a une certaine efficacité dans les rencontres virtuelles », soulève-t-il. Une fois la pandémie passée, il s’attend à voir apparaître des formules « hybrides ».

Les entreprises qui vont réussir dans les prochains mois et les prochaines années sont celles qui vont investir dans des plateformes de commerce en ligne ou dans le marketing web.

Véronique Proulx, présidente-directrice générale de Manufacturiers et Exportateurs du Québec

Véronique Proulx observe que les PME québécoises accusaient un retard en la matière. Avant mars dernier, elles se reposaient encore beaucoup sur les foires commerciales et les réseaux de distribution traditionnels. Même si ces derniers demeurent incontournables dans certains secteurs d’activité pour se lancer en affaires dans un autre pays, « le marketing web peut aussi être très utile pour trouver ces distributeurs », insiste-t-elle.

L’aide gouvernementale aux PME exportatrices s’est par ailleurs adaptée à la nouvelle donne. Investissement Québec International couvrait auparavant certaines dépenses, comme des billets d’avion ou des séjours à l’hôtel, pour les entrepreneurs en mission commerciale à l’extérieur du Canada. Il a réorienté ce soutien financier pour encourager leur participation à des activités virtuelles. De plus, la société a changé d’approche, puisqu’elle n’était plus en mesure d’inviter au Québec des clients d’ailleurs pour les présenter aux fournisseurs d’ici. « On a mis en place des plateformes électroniques pour créer ces possibilités de maillages entre les donneurs d’ordre ou les acheteurs étrangers et les PME québécoises », indique Marie-Ève Jean, vice-présidente, exportations, chez Investissement Québec International.

Même s’il reste adepte des rencontres en personne, Corey Eisenberg prévoit poursuivre ses réunions virtuelles pour communiquer avec des représentants, des courtiers et des distributeurs aux États-Unis. « Les chances de visites demeurent faibles dans la prochaine année », croit-il.