Les entreprises du secteur espèrent ardemment la reprise des activités à l'aluminerie de Bécancour, à l'arrêt depuis 14 mois

Alors que les yeux sont tournés vers Bécancour et l'aluminerie ABI - en lock-out depuis 14 mois -, sous-traitants de l'aluminium et fournisseurs croisent les doigts afin que l'activité reprenne et que les contrats reviennent.

« C'est certain que [la reprise des activités], c'est un sujet de conversation dans la région », convient Joachim Blanchette, directeur général et copropriétaire d'Hydrexcel.

Il ne cache pas que l'entreprise familiale a « subi les impacts » de ce conflit déclenché dans la nuit du 11 janvier 2018. « Nous avons dû nous réajuster rapidement et trouver de nouveaux clients », précise le dirigeant dont l'entreprise fabrique des équipements industriels sur mesure, principalement pour les alumineries et l'industrie minière.

« On a dû faire des mises à pied temporaires, mais on a eu la chance de trouver de nouveaux clients », tient-il à souligner.

Même son de cloche chez Maxi Concept. « On a fait du démarchage pour combler les trous, dit Luc Gentes, président de l'entreprise d'ingénierie mécanique. On voudrait bien que ça redémarre rapidement ! »

effet domino

Chose certaine, de très nombreux sous-traitants - qui hésitent à commenter publiquement leur situation, pour des raisons commerciales - ont dû se réaligner afin de maintenir la tête hors de l'eau.

« C'est un sujet délicat », convient Cynthia Rivard, directrice générale de Manufacturiers de la Mauricie et du Centre-du-Québec.

« Il ne faut pas oublier qu'ABI est un joueur majeur dans la transformation et le traitement de l'aluminium », relève pour sa part Frédéric Laurin, professeur au département de finance et économique à l'Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR).

« Il y a une très forte concentration de sous-traitants qui transforment les métaux par des travaux d'usinage et de pliage. L'aluminerie ABI [par sa seule présence dans la région] a un effet structurant pour  les entreprises du secteur. »

- Frédéric Laurin, professeur au département de finance et économique à l'UQTR

À l'Association de l'aluminium du Canada, le président Jean Simard voit dans ce conflit « un effet domino » qui a eu pour conséquence de déplacer les approvisionnements. Il évite de se prononcer sur ce conflit - l'Association qu'il dirige compte Rio Tinto et Alcoa parmi ses membres -, mais il constate que le contexte mondial [de la production et de la transformation de l'aluminium à grande échelle] n'est pas à son mieux, avec un prix de l'alumine qui a connu de fortes variations au cours des derniers mois.

« L'usine de Bécancour a plus de 30 ans et elle est loin d'être la plus productive, au niveau mondial, analyse-t-il. Il y a beaucoup de rattrapage à faire et des enjeux, bien entendu, de productivité pour faire face à la concurrence en Chine. »

Il fait valoir, toutefois, que « le produit fabriqué à l'usine de Bécancour [était] très en demande du côté américain », les États-Unis étant de gros consommateurs d'aluminium pour l'industrie de l'automobile, notamment.

PHOTO D'ARCHIVES ALAIN ROBERGE, LA PRESSE