Éric Lefebvre, Parm Gill et Mike de Jong. Ces trois élus ne se connaissent pas. Le premier vient du Québec, le second de l’Ontario et le troisième de la Colombie-Britannique. Mais ils ont ceci en commun : ils ont récemment confirmé leur intention de quitter la scène provinciale afin de porter les couleurs du Parti conservateur aux prochaines élections fédérales.

À 18 mois du prochain scrutin, les conservateurs de Pierre Poilievre détiennent une large avance dans les sondages sur les libéraux de Justin Trudeau. Ils récoltent aussi des sommes record en dons. L’an dernier, ils ont recueilli quelque 35 millions de dollars, une somme sans précédent durant une année sans campagne électorale, laissant loin derrière les libéraux, qui, eux, ont obtenu 15 millions en dons de leurs sympathisants.

Voilà qu’un autre constat s’impose : le Parti conservateur attire de plus en plus d’élus provenant des capitales provinciales. L’attrait du pouvoir fait visiblement son œuvre sur plusieurs fronts.

La décision d’Eric Lefebvre de quitter le bateau caquiste et de démissionner de son poste de whip qui lui donnait accès aux réunions du Conseil des ministres a provoqué une commotion à Québec. D’autant que cette décision survient à peine 18 mois après les élections provinciales. On craint maintenant que d’autres puissent lui emboîter le pas. Selon des informations obtenues par La Presse, cette crainte est fondée. D’autres députés caquistes ont déjà manifesté à l’entourage de Pierre Poilievre leur intérêt de poursuivre leur carrière politique dans l’arène fédérale.

Il est toutefois loin d’être acquis que cet intérêt manifesté discrètement aura des suites. Car malgré son avance importante dans les sondages nationaux, le Parti conservateur ne domine pas au Québec, où l’on peut s’attendre à une rude lutte à trois avec le Bloc québécois et le Parti libéral. Des luttes à trois donnent souvent lieu à des victoires surprises et à des défaites inattendues. En coulisses, les stratèges conservateurs croient hautement possible de remporter une quinzaine de sièges au Québec, dont celui de Trois-Rivières, où l’ancien maire Yves Lévesque est de nouveau candidat, si leurs appuis dans les sondages se maintiennent.

À l’heure actuelle, le Parti conservateur détient neuf sièges dans la province, et il compte déployer les efforts qui s’imposent afin de conserver la circonscription de Richmond-Arthabaska, détenue par Alain Rayes, qui a quitté la barque conservatrice après l’élection de Pierre Poilievre comme chef. La candidature d’Éric Lefebvre n’est pas un hasard.

Résultat : le Parti conservateur pourrait remporter une poignée de sièges de plus dans la Belle Province au prochain scrutin. Mais s’il y a une vague conservatrice, le compte pourrait atteindre les 25 sièges, calcule-t-on en coulisses.

À Toronto, la décision en janvier de Parm Gill de démissionner non seulement de son poste de ministre de la Réduction des formalités administratives, mais aussi de député de Milton, a également causé une onde de choc à Queen’s Park. Son départ a forcé le premier ministre Doug Ford à remanier son cabinet en plein hiver, avant la reprise des travaux parlementaires à Queen’s Park. Dans le cas de M. Gill, c’est tout de même un retour aux sources qu’il espère, car il avait été député conservateur de la circonscription fédérale de Brampton – Springdale de 2011 à 2015.

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Parm Gill à la Chambre des communes en 2014

Au gouvernement de Doug Ford, on redoute aussi, comme à Québec, que d’autres députés choisissent de faire le saut sur la scène fédérale pour faire cause commune avec Pierre Poilievre. D’autant que le Parti conservateur fédéral détient seulement 37 des 121 sièges que compte aujourd’hui l’Ontario à la Chambre des communes. Selon le site 338Canada, il pourrait mettre la main sur 86 sièges en tout dans la province au prochain scrutin si la tendance dans les sondages se maintient.

« Mon message s’adresse à tout le monde […] : personne n’a de menottes sur qui que ce soit », avait d’ailleurs lancé le premier ministre Doug Ford environ une semaine après l’annonce de la démission de son ancien ministre.

En Colombie-Britannique, Mike de Jong, l’un des députés comptant le plus d’ancienneté à l’Assemblée législative à Victoria, a mis fin mercredi à plusieurs semaines de réflexion en confirmant qu’il souhaite poursuivre sa carrière à Ottawa. Il tentera de se faire élire dans la nouvelle circonscription d’Abbotsford – South Langley. Il a été élu sans interruption depuis 1994.

M. de Jong a dirigé plusieurs ministères (Finances, Sécurité publique, Procureur général, Santé, Forêts) dans l’ancien gouvernement de Gordon Campbell et celui de Christy Clark. S’il remporte son pari et que le Parti conservateur forme le prochain gouvernement, il est quasi assuré de faire partie du cabinet étant donné sa longue expérience.

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Mike de Jong en 2017

« Je me joins au mouvement de gros bon sens de Pierre Poilievre pour appuyer le seul chef qui a le courage de parler de la nécessité de restaurer la gestion responsable des finances au Canada », a affirmé M. de Jong mercredi en confirmant sa décision. « Il est temps que M. Trudeau cesse d’utiliser les contribuables canadiens comme un guichet automatique sans se soucier du fardeau que ses augmentations d’impôts et ses dépenses incontrôlées imposent aux familles canadiennes. »

Dans les rangs conservateurs, on se félicite d’attirer des candidats de la trempe d’Éric Lefebvre, Parm Gill et Mike de Jong. Des campagnes discrètes de recrutement sont en marche dans certaines provinces dirigées par des gouvernements conservateurs comme en Nouvelle-Écosse. Et on laisse entendre que d’autres candidats d’envergure se manifesteront au fur et à mesure qu’on se rapprochera de la bataille électorale.